Comme tous les ans, le jour de la fête nationale du 14 juillet, les
forces armées françaises défileront sur les Champs-Elysées. Toutefois,
cette année, cette grande revue militaire sera faite à l’économie. En
effet, le général Hervé Charpentier, le gouverneur militaire de Paris, a
ainsi expliqué que
le programme du défilé sera amputé de 15 minutes et de 30 % d’engins par rapport à l’édition de 2014.
Depuis début janvier et
les attentats qui ont ensanglanté la France,
la police nationale, la gendarmerie et 10.000 militaires sont engagés
dans le cadre du plan Vigipirate, tandis que plus de 7.000 hommes des
différentes forces armées françaises sont déployés hors des frontières
de la République dans les opérations
Barkhane (Afrique sub-saharienne),
Chammal (Moyen-Orient), ou encore en Centrafrique.
Malgré tout, 3.500 hommes et femmes seront présents, de même que 208
véhicules, 240 cavaliers de la Garde républicaine, 55 avions et 31
hélicoptères. Toutefois, les célèbres chars Leclerc, très apprécié du
public, seront, cette fois, absents du défilé.
Ce 14 juillet sera l’occasion de rendre hommage à la Résistance française en cette année de 70
e
anniversaire de la fin de la Seconde guerre mondiale. La Patrouille de
France survolera la capitale dans une formation inédite à 12 appareils
afin de représenter la Croix de Lorraine, symbole de la Résistance
française et des Forces françaises libres.
Enfin un hommage inédit sera rendu aux hommes qui composent les
commandos du GIGN, du RAID et de la Brigades de recherches et
d’intervention (BRI). Ces unités d’élite, spécialisées dans la lutte
contre le terrorisme défileront cette année en tête de cortège, pour
rendre hommage à leurs interventions décisives du début d’année
à Dammartin-en-Goële et à l’Hypercacher de Paris contre les trois
terroristes responsables des attentats de janvier à Paris.
Un concert et le traditionnel feu d’artifice clôtureront la journée.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Centre_d%27instruction_%C3%A0_la_pacification_et_%C3%A0_la_contre-gu%C3%A9rilla
Centre d’instruction à la pacification et à la contre-guérilla
Les
Centres d’instruction à la pacification et à la contre-guérilla (CIPCG), étaient deux écoles de
guerre psychologique créées en
Algérie par les officiers d’état-major
Raoul Salan et
Charles Lacheroy durant la
guerre d’Algérie, sur l’initiative de
Jacques Chaban-Delmas, ministre de la Défense à l’époque.
École de guerre psychologique
Durant la guerre d’Algérie, les CIPCG étaient une école destinée à la formation des cadres sur la guerre psychologique. Le
renseignement et la
propagande sont intégrés comme une « arme psychologique » à part entière, que le colonel Lacheroy compare à d’autres
armes conventionnelles telles que les chars ou l’aviation
1. Fondé à partir d’une réflexion sur la
guerre d’Indochine et l’expérience acquise lors des combats contre le
Viet Minh, la «
guerre contre-révolutionnaire »
exige, pour ces officiers, de nouvelles méthodes, en particulier
l’importance accordée à l’aspect politique de la guerre : on insiste sur
la capacité à démanteler l’«
Organisation politico-administrative » (OPA) du FLN, ce qui exige de surveiller la population civile, d’arrêter les militants de base et de les
interroger
afin de remonter les filières. Or, pour Lacheroy, ceci pose des
problèmes de « réglementation » de ce qui est « toléré », ou non, dans
la conduite de cette guerre : « On ne fait pas une guerre
révolutionnaire avec le
Code Napoléon »
2.
Créée en 1958, sous la direction de
Marcel Bigeard, les instructeurs étaient pour la plupart eux aussi des vétérans de la
guerre d’Indochine. Comme Bigeard, vétéran de la
bataille de Diên Biên Phu, beaucoup avaient été fait prisonniers, envoyés dans les
camps de rééducation où ils avaient subi le travail psychologique des commissaires politiques
Viet Minh, ainsi que de communistes français tels que
Georges Boudarel. Fort de l’expérience de ces vétérans, l’état-major souhaitait sa mise en pratique contre la rébellion du
FLN.
De 1958 à 1960, plus de 8 000 officiers et sous-officiers l’ont fréquenté. Ouverte à l’international, des stagiaires
belges et
portugais y furent instruits afin d’apprendre à lutter contre les mouvement indépendantistes naissant au
Congo belge, en
Angola et au
Mozambique.
CIPCG de Philippeville
Le premier des deux centres a été créé à
Philippeville (Skikda) dans le district du
Constantinois.
Situé dans le hameau de Jeanne-d’Arc, à l’est de Philippeville, le
Centre d’entraînement à la guerre subversive, surnommé « école
Bigeardville », a été inauguré officiellement le 10 mai 1958, en
présence de
Jacques Chaban-Delmas,
ministre de la Défense nationale du
gouvernement Félix Gaillard, et de
Jean Lartéguy, l’auteur des
Centurions 3.
Dans ses
Mémoires, Chaban-Delmas a écrit que Bigeard était
« l’homme qu’il fallait pour faire subir aux officiers subalternes un
véritable électrochoc psychologique qui changerait à jamais leur façon
d’envisager les choses »
4.
Dirigée par
Marcel Bigeard,
l’école a pour mission d’organiser des stages d’une « durée de quatre à
six semaines » afin de « former des officiers avertis aux formes de la
guerre révolutionnaire pour lutter pratiquement contre elles, grâce à
une instruction sur la lutte contre l’infrastructure politico-militaire
et un entraînement à la conduite des opérations de jour et de nuit
contre les bandes »
5. Interrogé par la journaliste
Marie-Monique Robin sur le contenu de l’enseignement dispensé, Bigeard lui répond :
« Concrètement… Les organigrammes, comment on remonte les filières,
les enquêtes de police… Et puis, en plus, la forme physique, l’idéal, la
grandeur, défendre la patrie ! Apprendre à regarder la mort en face,
enfin, vous voyez. Je transformais les types, un petit peu comme font
les islamistes, si vous voulez, prêts à sauter avec leurs bombes
6! »
Dans
Les Crimes de l’armée française, l’historien
Pierre Vidal-Naquet reproduit un article publié le 18 décembre 1958 dans
Témoignage chrétien, où le journaliste,
Robert Barrat, rapporte le témoignage d’un officier, ancien stagiaire du centre:
« Comment n’y aurait-pas complicité de l’ensemble de la hiérarchie
quand, dans une école comme celle de Jeanne-d’Arc, on nous expliquait,
pendant le cours sur le renseignement, qu’il y avait une
torture
humaine. (…) Le capitaine L. nous a donné cinq points que j’ai là, de
façon précise, avec les objections et les réponses: 1) il faut que la
torture soit propre; 2) qu’elle ne se fasse pas en présence de jeunes;
3) qu’elle ne se fasse pas en présence de sadiques; 4) qu’elle soit
faite par un officier ou par quelqu’un de responsable; 5) surtout
qu’elle soit « humaine », c’est-à-dire qu’elle cesse dès que le type a
parlé et qu’elle ne laisse pas de trace. Moyennant quoi – conclusion –
vous aviez droit à
l’eau et à
l’électricité7. »
C’est d’ailleurs dans un brouillon établi par le capitaine Chabannes
(maintenant général), qui travaillait au Centre sous les ordres de
Bigeard, qu’apparaît le mot « torture », ainsi que celui de
« génératrice » ; mot qui, lorsque le programme d’enseignement est tapé à
la machine, est remplacé par « L’action policière: nouvelles méthodes
menées pendant les mois précédents »
8.
CIPCG d’Arzew
Le second centre était basé dans la ville portuaire d’
Arzew, près de
Mostaganem, district de l’
Oranie. Dépendant du
5e bureau du
SDECE (l’ancêtre de la
DGSE), il était dirigé par un ancien prisonnier des
camps de rééducation Viet-Minh en
Indochine, le lieutenant-colonel André Bruge, qui avait proposé dès l’été 1956 au ministre-résident et gouverneur général en Algérie du
gouvernement Guy Mollet,
Robert Lacoste, d’appliquer les méthodes de «
lavage de cerveau » du Viêt-minh aux prisonniers algériens
9.
Filmographie
Références
- ↑ Conférence [archive] de Charles Lacheroy n°2, La guerre révolutionnaire
- ↑ Voir conférence [archive] n°3 de Lacheroy
- ↑ Marie-Monique Robin, Escadrons de la mort, l’école française [détail des éditions], 2008, p.133
- ↑ Jacques Chaban-Delmas, Mémoires pour demain, Flammarion, Paris, 1997, cité in Marie-Monique Robin, Escadrons de la mort, l’école française [détail des éditions], 2008, chap. IX, « La torture: l’arme de la guerre antisubversive », p.133
- ↑ Note non datée signée du général Lorillot, secrétaire d’Etat aux Forces armées Terre, au général commandant la 10e région militaire. Document SHAT cité in Marie-Monique Robin, Escadrons de la mort, l’école française [détail des éditions], 2008, chap. IX, p.133
- ↑ Cité in Marie-Monique Robin, Escadrons de la mort, l’école française [détail des éditions], p.133
- ↑ Cité in Marie-Monique Robin, Escadrons de la mort, l’école française [détail des éditions], 2008, p.134
- ↑ Document reproduit in Marie-Monique Robin, Escadrons de la mort, l’école française [détail des éditions], photos; cf. aussi chap. IX, p.135
- ↑ Marie-Monique Robin, Escadrons de la mort, l’école française [détail des éditions], 2008, chap.VIII, p.113
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
Bibliographie
https://fr.wikipedia.org/wiki/Georges_Boudarel
Georges Boudarel
Émile Raymond Georges Marius Boudarel (
21 décembre 1926,
Saint-Étienne –
26 décembre 2003,
Les Lilas) est un
universitaire et
militant communiste français, responsable dans un camp de prisonniers, accusé d’avoir torturé des
soldats français lors de la
guerre d’Indochine.
Biographie
Né à
Saint-Étienne en
1926 d’un père comptable, il étudie dans un
séminaire des
pères maristes.
Chrétien progressiste et
marxiste, il milite au
parti communiste français. Après l’obtention de sa licence de philosophie, sursitaire, il rejoint l’
Indochine en
avril 1948 et il est nommé professeur de philosophie au
lycée Yersin de
Dalat. En 1949, il est nommé au lycée Marie-Curie à
Saigon. Il anime l’antenne indochinoise du PCF, le groupe culturel marxiste, auquel
Jean Chesneaux a appartenu.
Il abandonne son poste le
17 décembre 1950 pour rejoindre le
Việt Minh. Il est affecté comme rédacteur créateur de l’émission en langue française de
La Voix de Saïgon-Cholon libre, station de radio clandestine du Việt Minh dissimulée dans une boucle de la rivière Song Bé. Il y restera 18 mois. En
juin 1952, il est désigné pour rejoindre le
Tonkin. Ce voyage à pied durera 6 mois
1. Selon une autre source, il n’aurait été désigné qu’en
décembre 1951, mis en route début 1952 pour n’arriver au Tonkin qu’en décembre 1952 après un voyage à pied de 9 mois
2. Pendant ce temps, il est
appelé sous les drapeaux en Indochine et, ne se présentant pas, sera considéré comme «
insoumis par l’armée française puis
déserteur et
condamné à mort par
contumace2 ».
Arrivé au
Tonkin, il est nommé
commissaire politique dans un camp de rééducation de prisonniers, le camp 113
3, et est appelé Dai Dong
4.
D’après de nombreux témoignages de rescapés du camp, il se serait rendu
coupable de tortures contre des soldats de l’armée française. Durant
l’année de son activité au camp 113, Boudarel reconnait lui-même un taux
de mortalité de 50 %
5. Les survivants eux assurent qu’il y eut 278 morts sur 320 prisonniers
6.
Georges Boudarel se marie à Hanoi en 1962 (il divorcera en 1974), puis quitte le pays en
19647 et se rend en
URSS, puis travaille en
Tchécoslovaquie pour la
Fédération syndicale mondiale (FSM) sous domination de l’URSS.
Il rentre en France en 1966, profitant de la loi d’
amnistie votée en
juin 19668 : devenu l’assistant de
Jean Chesneaux — professeur et fondateur, avec
Emmanuel Le Roy Ladurie,
de la section Histoire du département de « Géographie – Histoire et
Sciences de la société » et membre du PCF —, il est ensuite promu
maître de conférences à l’
Université de Paris VII et chercheur au
CNRS, se spécialisant dans l’histoire du
Viêt Nam.
Affaire Boudarel I
Le
13 février 1991, lors d’un colloque organisé au
Sénat par le
centre des hautes études sur l’Afrique et l’Asie modernes, il est reconnu par
Jean-Jacques Beucler, ancien
secrétaire d’État aux
anciens combattants
ayant lui-même participé à la guerre d’Indochine durant laquelle il
avait été prisonnier pendant 4 ans dans le camp n°1. D’autres
témoignages sont déposés ensuite contre Georges Boudarel qui fait
l’objet en
1991 d’une plainte pour
crimes contre l’humanité
déposée par d’anciens prisonniers français du camp 113. Cette plainte a
donné lieu à un rejet de la Cour de cassation motivé par la loi
d’amnistie de 1966
9.
Affaire Boudarel II
L’affaire Boudarel II commence en mai
199310.
Boudarel décide, malgré l’arrêt des poursuites contre lui à la suite de
la décision de la Cour de cassation, de maintenir la plainte en
diffamation qu’il avait déposée en retour contre ses accusateurs.
Il précise son accusation dans les mois suivants en isolant cinq
accusations dont il assure qu’elles sont sans fondement, et donc
diffamatoires. Afin de trancher clairement la question de la vérité de
ces accusations, le juge
Jean-Pierre Getti
décide alors de mener une instruction la plus exhaustive possible pour
déterminer les éléments matériels qui accusent Boudarel, ainsi que leur
contexte, et relance donc le débat que la décision de la Cour de
cassation semblait pourtant avoir fermé sur leur qualification de «
crimes contre l’humanité ».
Il finit, après avoir mis en examen l’un des accusateurs en
199411 et recueilli 23 volumes de dépositions, par clôturer l’affaire sur une ordonnance de non-lieu en
199612.
Le feuilleton ne s’arrête pas là, puisque les accusateurs lancent à
la suite de cette décision une nouvelle procédure contre Boudarel, cette
fois pour dénonciation calomnieuse
12.
Celle-ci est rapidement rejetée en 1998, la Cour considérant que
l’amnistie éteint aussi la possibilité de cette action. Ils soumettent
alors en 2000 leurs griefs à la
CEDH qui met un terme définitif aux procédures en
2003, considérant que la décision remise en cause est en fait celle de la Cour de cassation en
1993, et donc que la demande a été déposée hors délai.
Publications
- Dir. Jean Chesneaux, George Bourdarel, Daniel Hémery, Tradition et révolution au Viêt Nam, Paris, Anthropos, 1971
- Giap, éditions Atlas, 1977
- La Bureaucratie au Viêt Nam, L’Harmattan, 1983
- Cent fleurs éclosent dans la nuit du Viêt Nam : communisme et dissidence, 1954-1956, Jacques Bertoin, 1991
- Autobiographie, Jacques Bertoin, 1991
- Avec Nguyên Van Ky, Hanoi 1936-1996 : du drapeau rouge au billet vert, Autrement, 1997
Notes et références
Jurisprudence
Références
- ↑ Jacques-René Doyon, Les Soldats blancs de Hô Chi Minh : Les transfuges antifascistes et les communistes français dans le camp du Viêt Minh, Paris, Fayard, 1973 (réimpr. 1986), 22 cm (avec cartes et 1 dépliant), 521 p. (notice BnF no FRBNF35304942)
- ↑ a et b Biographie de Georges Boudarel [archive].
- ↑ Situé à Lang-Kieu non loin de la frontière de la Chine, au sud d’Ha-Giang, dans le bassin de la Rivière Claire (Song Lô), à une vingtaine de kilomètres de Vinh Thuy.
- ↑ « Paris Journal; Vietnam Echo Stuns France: Case of Treachery? » [archive], New York Times, 20 mars 1991.
- ↑ Biographie de Georges Boudarel [archive].
- ↑ L’affaire Boudarel [archive].
- ↑ Chronique nécrologique [archive].
- ↑ Loi 66-409 du 18 juin 1966 portant amnistie [archive], article 30 [archive] :
« Sont amnistiés de plein droit tous crimes ou délits commis en liaison
avec les événements consécutifs à l’insurrection vietnamienne et
antérieurement au 1er octobre 1957. » Cet article a été
inséré dans ce texte prévu à l’origine pour amnistier les actes commis
durant la guerre d’Algérie à la demande de députés communistes.
- ↑ De même un recours du 25 février 2000 devant la Cour européenne des droits de l’homme
à l’encontre de la France contestant l’arrêt de la Cour de cassation et
invoquant une violation du droit à la liberté d’expression a été
déclaré irrecevable en mars 2003 (Sobanski c. France, 20 mars 2003, no 56165/00 [archive]).
- ↑ Éric Conan, « Boudarel, le retour » [archive], L’Express, 14 octobre 1993.
- ↑ ANAPI 1994 – 1997 Chronologie des événements et des procédures [archive].
- ↑ a et b CEDH décision sur la recevabilité de la requête no 56165/00 Wladyslaw Sobanski contre la France [archive].
Voir aussi
Bibliographie
- Marc Charuel, L’Affaire Boudarel, éditions du Rocher, 1991
- Claude Baylé, Prisonnier au camp 113 : le camp de Boudarel, Perrin, 1991
- Thomas Capitaine, Captifs du Viet-Minh, les victimes de Boudarel parlent, préface de Jean-Jacques Beucler, UNI CED, Paris, 1991
- Jean-Jacques Beucler, Mémoires, France-Empire, 1991
- « Le dossier de l’affaire Boudarel », in L’Histoire, no 144, mai 1991, p. 48-54
- Langlois (Bernard).- Georges Boudarel In Le lynchage médiatique ; dir. Par Guy Coq et Charles
Conte.- Condé-sur-Noireau : Panoramiques, 1998, pp. 100-103. –
(Panoramiques. Politiques, cultures et sociétés, 4e trimestre 1998, n°
35
- Yves Daoudal, (préf. de Jean-Baptiste Biaggi), Le Dossier Boudarel ou le procès impossible du communisme, éd. Rémi Perrin, 2002
- Claude Cohen, « La Problématique du crime contre l’humanité », in Gazette du Palais, 26 février 2002, no 57, p. 46
- Gérard Gilles Epain, Indo-Chine : une histoire coloniale oubliée, L’Harmattan, 2008
Articles connexes
Liens externes
http://www.contre-info.com/commissaire-politique-stalinien-du-viet-minh-boudarel-le-monstre-francais-du-camp-113#
19 mai 2014
« Dès le déclenchement de la deuxième guerre mondiale l’Indochine fut
envahie par l’armée japonaise qui occupait déjà la Chine et qui avait
proclamé en 1938 sa volonté d’éradiquer toute présence d’homme blanc en
Extrême-Orient allant jusqu’à introniser, à son départ, le 2 septembre
1945, le gouvernement communiste Hô Chi Minh.
Lors des hostilités avec la France, le Viêt Minh effectua de
nombreuses prises d’otages, incluant des civils. Beaucoup de prisonniers
militaires français passèrent dans des camps d’internement situés dans
les régions sous contrôle indépendantiste et furent soumis à une
tentative de « rééducation marxisante » par des commissaires politiques
au nombre desquels des communistes étrangers et Français faisaient
montre d’un zèle excessif… Ainsi le PCF, par la voix de ses
responsables, Maurice Thorez, Jacques Duclos, le couple Joliot-Curie…
joua un rôle essentiel, non seulement dans la conception, mais aussi
dans l’exécution du lavage de cerveau.
Le sort des prisonniers dans ces camps de rééducation fut longtemps méconnu du grand public. L’affaire
Georges Boudarel contribua à la rappeler à l’opinion dans les années 1990.
Militant du parti communiste français, chrétien progressiste et
marxiste, Georges Boudarel naquit en 1926. En avril 1948, il s’embarqua
pour l’Indochine comme professeur de philosophie et anima l’antenne
indochinoise du PCF, le groupe culturel marxiste auquel Jean Chesneaux,
l’historien communiste, appartient.
Le 17 décembre 1950, refusant d’être incorporé dans l’armée française
et considéré comme « insoumis » puis déserteur, il rejoignit le Việt
Minh et se rendit après une longue marche au Tonkin où, en 1953, il fut
nommé commissaire politique dans un camp de rééducation de prisonniers,
le camp 113.
Situé près du village de Nam Nahm, à 25 km à l’ouest du kilomètre 32
de la RC2 (60 kms au sud de la frontière de Chine et 30kms au sud-ouest
de Bac.Giang), ce camp, insalubre, connut très vite une intense activité
mortuaire… Son cimetière débordait de cadavres que les grosses pluies
d’automne déterraient. Les rats pullulaient et s’attaquaient aux
mourants à l’infirmerie. Dès lors, la situation sanitaire devint telle
qu’il fallut évacuer ce camp et le reconstruire 30 kilomètres plus à
l’est, au nord de VINT-THUY, non loin de la RC2, près de LANG-KIEU.
Quelque 320 prisonniers, survivants d’un triste
bétail pensant, abandonnés à leurs délires, à leurs rêves et à leur
rancœur, tous d’origine européenne, officiers, sous-officiers et
soldats, croupissaient dans ce camp dans des conditions infâmes
d’alimentation, d’hygiène et de prophylaxie. A l’infirmerie, véritable
antichambre de la mort, des squelettes vivants agonisaient, vaincus par
la faim, la maladie et rongés par la vermine, sous un essaim de grosses
mouches vertes. Ils étaient, en effet, vidés par la dysenterie, minés
par le paludisme, l’avitaminose, les ascaris, la peau rongée par les
champignons de la dartre annamite, de la bourbouille et du
hong-kong-foot. Parmi ceux qui n’avaient plus aucune réaction et qui
allaient mourir le soir même ou dans la nuit, certains avaient les lobes
d’oreilles et la base des narines entamés par les rats. C’était un
spectacle affreux.
Tous ceux qui étaient admis à l’infirmerie mouraient. Les agonisants
attendaient la mort, les épuisés prenaient la place des agonisants, les
sans-espoirs succédaient aux épuisés, les nouveaux arrivés comblaient
les vides entretenant ainsi le cycle. Dans un endroit retiré, des
latrines avaient été creusées où grouillaient des millions d’asticots
qui donnaient naissance à des multitudes de mouches vecteurs de toutes
les maladies, véritable « pont aérien entre ce lieu et les cuisines »
selon le mot même de Boudarel. Le taux de mortalité variait
entre 25 et 40 décès par mois, et même plus, selon les saisons.
C’est en ce lieu sinistre que Boudarel, surnommé « Dai Dông », mit au
point ses sévices chaque jour plus raffinés et excella dans le lavage
de cerveau imprégné des doctrines du marxisme-léninisme et de
l’internationalisme prolétarien.
Dans ce « mouroir », sa spécialité : « La mise à mort sans toucher » consistait :
- à abreuver de cours de « rééducation politique » des hommes blessés, malades, éreintés, affamés
- à obliger les moribonds à se lever pour assister à ces séances, qui contribuaient à les achever
- à exploiter la pratique clé la « critique et de l’autocritique » pour
créer un détestable climat de méfiance, de discorde et de délation
- à remettre au Vietminh des médicaments parachutés par la Croix Rouge
Française et en les refusant aux malades abandonnés sans soins
- à réserver aux évadés repris un sort qui menait à une fin quasi certaine
- à établir lui-même la liste des « libérables », c’est-à-dire en s’attribuant le droit de vie et de mort
- à pousser la cruauté jusqu’à renvoyer au camp des prisonniers déjà sur
le chemin de la libération : Certains en mourront de désespoir
- à détenir un record de mortalité, avec 1 à 8 décès par jour.
Boudarel étant devenu
le « conseiller technique » pour l’action psychologique,
les chefs des 130 camps Việt Minh appliquaient avec zèle, sur ses
indications, les séances de tribunal populaire destinés à juger ceux qui
étaient considérés comme « fautifs ». Les prisonniers subissaient des
traumatismes importants dus au viol psychologique de l’endoctrinement,
des séances d’autocritique et d’encouragement à la délation.
Ils furent, ainsi, victimes « d’agressions psychologiques découlant
d’une doctrine monstrueuse, appliquée par un État pratiquant une
politique d’hégémonie idéologique et d’intolérance active ». Tous les
éléments du génocide constituant le crime contre l’humanité furent
réunis, tel que le définit la Convention des Nations Unies du 9 décembre
1948 : « Atteintes graves à l’intégrité physique et mentale du groupe ;
soumission intentionnelle de celui-ci à des conditions d’existence
devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ».
Par ailleurs, en dépit de leur extrême faiblesse, tous ceux qui
pouvaient tenir debout participaient aux corvées et aux activités du
camp. « Si pas travailler, pas manger ! » Telle était la devise du
surveillant général.
«
Notre estomac est un chien enragé qui glapit, s’élance et se déchaîne, déchire les entrailles de ses dents »…
Pour preuve de son implacable inhumanité et de la jouissance dont il
devait probablement se repaître, Boudarel fit condamner à mort Jean
CHAMINADAS qui commandait la 7ème Compagnie du 5ème Régiment Etranger
d’Infanterie au motif d’avoir tenté trois évasions et tué une sentinelle
lors de la dernière. Mais là ne s’arrêta pas son abjection… Il demanda
au frère du condamné, Max CHAMINADAS, également prisonnier, de
commander, en personne, le peloton d’exécution… ce que Max refusa,
évidemment. Qu’à cela ne tienne : Jean fut exécuté, pour l’exemple, sous
les yeux de ses camarades d’infortune. Aujourd’hui, sa dépouille (ou ce
qu’il en reste) repose au mémorial dédié aux « Morts pour la France »
implanté à Fréjus.
Parmi les punitions – identiques à tous les camps- l’une des plus
terribles était le séjour prolongé dans la sinistre « cage à buffles »
sous une maison sur pilotis où le prisonnier, attaché à un poteau dans
une eau putride sans pouvoir se protéger des piqûres d’insectes, était
supplicié jusqu‘à la folie et la mort.
Durant l’année de son activité au camp 113, Boudarel reconnut
lui-même un taux de mortalité atteignant les 70 %. Sur les 320
prisonniers Français, 278 moururent de mauvais traitements et de torture
physique et psychologique. Lorsqu’ils débarquèrent à Marseille, les
survivants, squelettes ambulants ou morts-vivants portés sur civière,
furent la cible des jets de boulons, de crachats et d’injures par des
dockers communistes de la CGT.
Inculpé de trahison Georges Boudarel fut condamné à mort par
contumace en juin 1953. Après les accords de Genève, ce tortionnaire,
bénéficiant de la loi d’amnistie gaulliste du 18 juin 1966, revint en
France et fut aussitôt coopté au CNRS par ses amis communistes pour y
préparer une thèse de troisième cycle d’histoire à l’université Paris
VII Jussieu. Il devint maître de conférences à Jussieu et ces mêmes
communistes et syndicalistes feront ensuite valider ses années «
d’expérience » en Indochine pour favoriser sa carrière…
Durant ces années, il fréquente assidument les milieux trotskistes,
en particulier la ligue d’Alain Krivine et comptera parmi ses amis et «
protecteurs » Gisèle Halimi, Suzan Sontag, Marianne Schaub, Laurent
Schwartz, Marcel Kahn, Madeleine Rebérioux… tout le gratin de la gauche
intellectuelle qui sera à l’origine de la création de la « Ligue Contre
Révolutionnaire ».
Le 13 février 1991, lors d’un colloque au Sénat sur le Vietnam auquel
Boudarel participait, il fut reconnu et apostrophé par Jean-Jacques
Beucler, ancien secrétaire d’État aux anciens combattants ayant lui-même
participé à la guerre d’Indochine durant laquelle il avait été
prisonnier pendant 4 ans dans le camp 113.
«
Vous avez du sang sur les mains. Votre présence à cette tribune est indécente ! » vitupéra Beucler.
L’affaire fit grand bruit, d’autant plus que Boudarel adopta une
attitude provocatrice, affirmant ne rien regretter et allant jusqu’à se
moquer publiquement de ses anciennes victimes. D’autres témoignages
furent déposés ensuite contre Boudarel qui fit l’objet en 1991 d’une
plainte pour crimes contre l’humanité déposée par d’anciens prisonniers
français du camp 113. Contre toute attente, articles et pétitions en
faveur de Boudarel ne manquèrent pas dans le camp « progressiste » (Jean
Lacouture, Pierre Vidal-Naquet…) et la justice rejeta l‘accusation de
crime contre l’humanité portée par une association d’anciens
combattants, au motif que les faits étaient couverts par la loi
d’amnistie de 1966.
Suprême dérision : Soutenu par l’ensemble de la gauche
intellectuelle, il échappa également à toute sanction dans le cadre
universitaire.
A 65 ans, l’ancien commissaire politique du camp 113 put en toute
légalité faire valoir ses droits à la retraite. Il mourra paisiblement
dans son lit le 26 décembre 2003 à l’âge de 77 ans.
«
Et ton nom paraîtra dans la race future, aux plus cruels tyrans, une cruelle injure ! » (Racine)
José CASTANO