«Au début, nous n’avons pas soupçonné qu’il y avait quelque chose de louche. Ce n’est que quelques semaines plus tard que nous avons appris, par une connaissance, que le chirurgien avait été interdit de bloc. Cela nous a mis la puce à l’oreille. » (Emilie Latour, fille du patient décédé)
C’est pareil pour moi : quand je vois que l’ancienne psychiatre hospitalière Brigitte Sintes-Le Goff n’assure plus qu’une consultation externe à l’hôpital Morvan et que son ancienne chef de service à l’hôpital psychiatrique de Bohars, Yvonne Quemener, n’assure plus pour sa part qu’une simple consultation de médecine générale dans son ancien service, je me dis tout naturellement qu’elles ont vraiment dû très largement dépasser les bornes pour n’avoir plus ni l’une ni l’autre aucun lit sous leur responsabilité. Pour autant, elles exercent toujours…
Sauf exception, comme le montre bien cette nouvelle affaire qui est aujourd’hui médiatisée, il faut attendre qu’un fonctionnaire fautif vis-à-vis de ses administrés, des justiciables quand il s’agit d’un magistrat, ou de ses patients lorsqu’il est médecin, s’attaque aussi à ses pairs de manière pour eux inacceptable pour que ceux-ci commencent à réagir. Cela peut durer des années, voire toute sa carrière, si le fonctionnaire en question est assez habile pour éviter de se mettre ses collègues à dos.
http://www.leparisien.fr/societe/bourges-un-chirurgien-accuse-d-homicide-sur-un-patient-18-04-2016-5724915.php
Bourges : un chirurgien accusé d’homicide sur un patient
Une plainte pour « homicide involontaire » a été déposée contre un chirurgien du centre hospitalier Jacques-Coeur de Bourges (Cher). Son patient est décédé lors d’une banale opération de la prostate.
Marc Payet | 18 Avril 2016, 00h00 | MAJ : 18 Avril 2016, 07h01
Info le Parisien
Que s’est-il passé le 14 janvier dernier au bloc de l’hôpital de Bourges (Cher) où Henry Latour, 60 ans, est décédé lors d’une banale opération de la prostate ?
Selon nos informations, une enquête préliminaire est en cours, à la suite d’une plainte pour « homicide involontaire » déposée contre un chirurgien urologue par la famille de la victime le 3 mars auprès du procureur de la République de Bourges.
Leur avocat, Philippe Courtois, dénonce « une affaire tout à fait hors norme » et estime que le chirurgien a commis « plusieurs fautes caractérisées à l’origine du décès du patient ». Il décrit « un comportement parfaitement inadapté, une agressivité, un état hystérique, des insultes et des menaces envers les autres personnels », mais aussi « une insuffisance de maîtrise de certains gestes chirurgicaux réalisés de façon brutale et violente qui ont causé une hémorragie importante », et enfin une « non-prise en charge des hémorragies » malgré les rappels de ses collègues du bloc opératoire.
«Cette intervention était une véritable boucherie»
Selon le rapport de l’anesthésiste, adressé à la direction de l’hôpital, le chirurgien entre ce jour-là en salle « agité, en colère, parlant fort ». « C’est à nouveau du matériel de merde » lance-t-il, avant d’insulter une infirmière. Un coordinateur du bloc estime que « le chirurgien n’est pas dans son état normal, inaccessible à tout raisonnement ». Mais il n’y a pas d’autres urologues disponibles pour opérer. Alors que le chirurgien « hurle », l’anesthésiste lui rappelle « que le patient est sous rachianesthésie et entend tout ». Décision est alors prise d’endormir le patient. Selon le compte rendu, minute par minute, l’intervention tourne alors au cauchemar. « Le chirurgien continue à pratiquer des gestes brutaux et violents à l’origine des fortes pertes hémorragiques, plus de 5 litres », sans que les apports extérieurs massifs en sang ne les compensent. L’état de santé du patient se dégrade progressivement. A 15 h 25 l’anesthésiste signale « à plusieurs reprises que le patient n’est pas bien et qu’il faut arrêter l’intervention ». Sans succès. A 15 h 52 le chirurgien stoppe finalement l’opération.
A 16 h 9, malgré une tentative de réanimation, le patient décède. Les six membres de l’équipe médicale et l’infirmière, à l’exception du chirurgien, se réunissent, sous le choc. « Nous sommes tous parvenus à la conclusion que cette intervention était une véritable boucherie, indigne de n’importe quel bloc opératoire » écrivent-ils.
L’agence régionale de santé a diligenté une enquête et l’ordre des médecins du Cher a été saisi. Le chirurgien, qui n’opère plus depuis le drame, mais consulte toujours à l’hôpital, se défend de toute faute. « C’était un événement complexe. Un cas exceptionnel. J’estime avoir tout fait dans les règles de l’art, mais le risque zéro n’existe pas. Je suis très touché par ce qui est arrivé », ajoute-t-il. « Une expertise devra être ordonnée pour dire s’il y a eu ou non faute, précise son avocate Amélie Chiffert. On peut être face à un aléa thérapeutique et il peut s’agir d’une complication de l’acte chirurgical. »
« L’hôpital a tenté d’étouffer l’affaire »
Emilie Latour (notre photo) veut savoir ce qui a provoqué le décès de son père. « A 60 ans, il était en bonne forme et devait juste avoir une intervention bénigne sur la prostate. C’était un homme exceptionnel, qui donnait encore beaucoup de son temps pour les autres. » Henry Latour avait notamment une activité syndicale à Force ouvrière à l’Urssaf du Cher, département dans lequel il vivait depuis quelques années, après avoir habité en région parisienne. Juste avant qu’il entre au bloc au CH de Bourges, le 14 janvier, Emilie, qui vit à Montmorency (Val-d’Oise), a eu son père au téléphone. « Il n’était pas stressé et était en bonne forme », confie-t-elle. Sans nouvelles au bout de plusieurs heures, elle finit tout de même par s’inquiéter. « J’ai alors reçu un appel du chirurgien qui m’a dit : je suis désolé, votre papa a fait un arrêt cardiaque. » Sa belle-mère, qui habite à Bourges, se rend à l’hôpital, où le chirurgien lui confirme l’arrêt du coeur.
Emilie Latour (notre photo) veut savoir ce qui a provoqué le décès de son père. « A 60 ans, il était en bonne forme et devait juste avoir une intervention bénigne sur la prostate. C’était un homme exceptionnel, qui donnait encore beaucoup de son temps pour les autres. » Henry Latour avait notamment une activité syndicale à Force ouvrière à l’Urssaf du Cher, département dans lequel il vivait depuis quelques années, après avoir habité en région parisienne. Juste avant qu’il entre au bloc au CH de Bourges, le 14 janvier, Emilie, qui vit à Montmorency (Val-d’Oise), a eu son père au téléphone. « Il n’était pas stressé et était en bonne forme », confie-t-elle. Sans nouvelles au bout de plusieurs heures, elle finit tout de même par s’inquiéter. « J’ai alors reçu un appel du chirurgien qui m’a dit : je suis désolé, votre papa a fait un arrêt cardiaque. » Sa belle-mère, qui habite à Bourges, se rend à l’hôpital, où le chirurgien lui confirme l’arrêt du coeur.
Emilie Latour, fille de la victime, a eu accès au dossier médical. (photo LP / Frérédic Dugit )
«Au début, nous n’avons pas soupçonné qu’il y avait quelque chose de louche. Ce n’est que quelques semaines plus tard que nous avons appris, par une connaissance, que le chirurgien avait été interdit de bloc. Cela nous a mis la puce à l’oreille. » La famille demande alors à récupérer le dossier médical. On lui transmet un premier exemplaire, mais incomplet. Emilie insiste et finit par obtenir, comme la loi l’exige, la totalité du dossier, y compris les examens et comptes rendus de l’opération au bloc. « On était abasourdi de ce que nous découvrions. Il s’était passé quelque chose de très grave, et on nous le cachait. L’hôpital a tenté d’étouffer l’affaire. » Un rendez-vous est fixé avec la direction le 23 février. « La directrice semblait très embêtée, assez confuse. Elle a fini par admettre que le chirurgien avait eu un comportement extrêmement bizarre pendant cette opération. »
La famille, pas très convaincue, contacte une association
spécialisée et saisit un avocat. Sa belle-mère a été entendue par les
policiers, et Emilie s’attend à l’être prochainement. Sollicitée, la
direction de l’hôpital de Bourges se défend d’avoir pratiqué une
politique d’opacité. « L’agence régionale de santé, le centre national
de gestion qui gère les praticiens hospitaliers ainsi que le procureur
de la République ont été saisis. L’établissement collabore étroitement
aux procédures en cours. En accord avec les parties prenantes et le
praticien concerné, ce dernier a limité son exercice à la réalisation de
consultations mais n’exerce pas au bloc opératoire pendant toute la
durée de la procédure. Nous comprenons la douleur de la famille qui a
été reçue. »
Les anesthésistes au front
« Suite à la survenue d’un événement tragique le 14 janvier 2016, ayant entraîné le décès d’origine chirurgicale d’un homme en parfait état de santé, nous avons collectivement décidé de ne plus prendre en charge, au bloc opératoire, les patients du docteur [...] pour des raisons de compétence et d’aptitude mentale. » Dans un courrier interne adressé à la directrice de l’hôpital le 22 janvier 2014, soit huit jours après le drame, 7 praticiens hospitaliers tiraient le signal d’alarme. « Madame la directrice, nous venons vous informer des dérives professionnelles du docteur [...], qui peuvent parfois exposer les patients à des risques graves. Il s’agit notamment de l’inexactitude des intitulés d’interventions avec rajout d’actes, des durées opératoires en dehors des standards avec parfois poursuite des actes une fois l’anesthésie locorégionale levée, avec des conséquences néfastes pour le patient, des hémorragies préopératoires anormalement importantes exposant le patient à des accidents. Malgré nos remarques réitérées, et son absence de coopération, le service d’anesthésie a malgré tout continué de collaborer en assurant un maximum de sécurité dans l’intérêt des patients. »
http://www.francetvinfo.fr/sante/patient/droits-et-demarches/deces-suspect-a-l-hopital-de-bourges-qui-commande-au-bloc-operatoire_1411211.html
Décès suspect à l’hôpital de Bourges : qui commande au bloc opératoire ?
Un patient de 60 ans est décédé au cours d’une intervention bénigne de la prostate au centre hospitalier Jacques-Cœur de Bourges (Cher). La famille a déposé une plainte pour « homicide involontaire » à l’encontre du chirurgien qui aurait eu un comportement particulièrement agressif et commis plusieurs fautes caractérisées, selon l’avocat de la famille. Les autres membres de l’équipe chirurgicale décrivent une « véritable boucherie ». Lorsque de tels actes sont commis dans l’univers très codifié du bloc opératoire, qui prend les rênes ? Qui porte les responsabilités ?
Le patient de 60 ans « en pleine forme », selon sa fille, était entré le 14 janvier au matin au bloc opératoire du centre hospitalier de Bourges pour une intervention à la prostate, sous anesthésie régionale. Il était décédé quelques heures plus tard d’un arrêt cardiaque, après une importante hémorragie.
Ce retraité avait été incinéré, sans qu’une autopsie n’ait pu être réalisée. Ce n’est que par hasard que la famille découvrira quelques semaines plus tard que l’urologue a été suspendu de toute activité au bloc. En proie au doute, la famille, qui a obtenu un compte-rendu accablant de l’anesthésiste, a alors déposé le 3 mars auprès du procureur de la République une plainte pour « homicide involontaire », visant le chirurgien et la direction de l’hôpital.
« Dès son entrée au bloc, le chirurgien était dans un état mental second », a accusé lundi 18 avril, l’avocat de la fille du patient, Me Philippe Courtois, lors d’une conférence de presse. Selon lui, « il ne s’agit pas d’un aléa thérapeutique mais d’une erreur médicale provoquée par des gestes brutaux répétés » de l’urologue.
Demander l’aide d’un confrère en cas de problème
Face à la violence de ces gestes, qui pouvait intervenir ? Au sein du bloc opératoire, il est à noter que le chirurgien est responsable de l’intervention, du début à la fin. Il doit vérifier que le patient est correctement installé sur la table et c’est toujours lui qui a la charge des suites opératoires. Mais il n’est jamais seul : anesthésistes, infirmiers et aides opératoires l’accompagnent toujours. « Au bloc opératoire, tout le monde surveille tout le monde pour le bien du malade. Et lorsque quelque chose est différent de d’habitude, ils vont appeler à l’aide ou demander un avis« , explique le Pr François Desgrandchamps, chef du service d’urologie de l’hôpital Saint-Louis (AP-HP), à Paris.
Lorsque le chirurgien est confronté à une complication qui le dépasse, une hémorragie ou une tumeur par exemple, il est censé s’arrêter et demander l’aide d’un confrère. Néanmoins, s’il ne le fait pas ou si son comportement met en danger la vie du patient, aucune loi ne dit explicitement qui, au sein de l’équipe médicale, doit l’empêcher de poursuivre son geste. Chaque professionnel présent au bloc opératoire est censé pouvoir le faire mais tout dépend de la personnalité du praticien. « Il y a des chirurgiens qui peuvent avoir des personnalités pathologiques et c’est là où la médecine du travail des centres hospitaliers est fondamentale pour vérifier que la personnalité du chirurgien est en adéquation avec sa responsabilité« , estime le Pr François Desgrandchamps.
« Une véritable boucherie »
Dans un rapport adressé à la direction et consulté par l’AFP, l’anesthésiste avait dénoncé le comportement « agité » du chirurgien et ses gestes « violents » lors de l’intervention pour enlever un nodule à la prostate. Devant le patient décédé, le chirurgien aurait commencé à le « frapper » en criant : « Pourquoi tu m’as fait ça ? » et « en se frappant la tête, disant à toute l’équipe » : « Vous êtes responsables de cette mort ». L’anesthésiste et les membres de l’équipe médicale s’étaient réunis après l’intervention. Leur conclusion :
»Cette intervention était une véritable boucherie indigne de n’importe quel bloc opératoire »De son côté, le centre hospitalier a affirmé avoir ouvert « une enquête interne (…) dès que nous avons été informés du décès (…) Tous les éléments de notre enquête interne ont été transmis au procureur de la République de Bourges, à l’Agence régionale de santé et au Centre national de gestion (qui gère les praticiens hospitaliers) », a indiqué la directrice Agnès Cornillault.
Contactée par l’AFP, l’avocate du chirurgien n’était pas joignable dans l’immédiat.
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