Affaire Fañch. Bientôt un décret pour la reconnaissance du tilde
Un décret pour que les signes singuliers des langues régionales, les
signes diacritiques, soient reconnues par l’administration. C’est ce que
promet Nicole Belloubet, la ministre de la Justice. Les prochains
petits Fañch ne devraient donc plus avoir de souci pour être reconnus
par l’état civil.
Le petit Fañch et sa famille, pris en photo en novembre 2018. | ARCHIVES OUEST-FRANCE
Ouest-France Didier GOURIN. Publié le 04/02/2020 à 14h24
Cette fois, après des décisions de justice, Nicole Belloubet,
ministre de la Justice, veut clarifier la situation. Surtout, dans un
courrier écrit à Richard Ferrand, député du Finistère,
et président de l’Assemblée nationale, elle annonce un décret pour les
prochains petits Fañch, et tous les prénoms d’origine régionale qui
portent aussi l’un de ces signes diacritiques.
La ministre de la Justice se dit favorable à leur usage à condition,
précise-t-elle, que leur utilisation dans les seuls noms et prénoms des
personnes n’affecte pas le principe énoncé à l’article 2 de la Constitution selon lequel la langue de la République est le français. Pour Fañch, pas de problème, tout le monde comprend. En Bretagne comme ailleurs.
Une loi ne sera pas nécessaire. Un décret en Conseil d’État suffira. Un projet de décret en ce sens est en voie de finalisation et sera prochainement transmis au Conseil d’État, détaille encore la ministre de la Justice.
Elle explique aussi la nécessité qu’un prénom avec de tels signes
diacritiques soit reconnu, après l’état-civil, par tous les systèmes
informatiques des administrations qu’il s’agisse de délivrer un
passeport ou de signer un contrat de travail. Cela nécessite une
adaptation des systèmes d’information de tous les services publics pour
garantir que les personnes y seront désignées conformément à leur
état-civil, et pour assurer qu’elles y seront reconnues, détaille
encore la ministre de la Justice. Aussi, une étude sera-t-elle
entreprise pour bien recenser toutes les adaptations nécessaires afin
qu’un signe diacritique soit bel et bien reconnu tout au long de la vie.
Affaire du tilde de Fañch : la mise au point du procureur général
Jean-François Thony, procureur général auprès de la cour d’appel de Rennes. (Le Télégramme/Philippe Créhange)
Le signe diacritique est toujours interdit sur les prénoms bretons.
Le procureur général de la cour d’appel de Rennes souhaite désormais une
décision définitive de la cour de cassation.
C’est ce qui s’appelle une mise au point. Depuis plusieurs mois, des élus bretons dénoncent une forme d’acharnement de la justice
au sujet de l’affaire du tilde. Rappelons qu’une famille finistérienne
se bat depuis déjà plus de deux ans et demi pour rendre légal
l’utilisation du signe diacritique et ainsi valider le prénom de son
enfant Fañch. Et en octobre, le parquet de Brest rappelait contre toute attente l’interdiction
qui leur était faite. Dans ce contexte, Jean-François Thony, procureur
général auprès de la cour d’appel de Rennes, a tenu à réagir alors qu’il
tenait un point presse ce lundi matin avant la traditionnelle audience
solennelle de début d’année. « On s’est étonné que des instructions
aient pu être données pour refuser le tilde malgré la décision de la
cour de cassation. Mais la cour de cassation n’a pas statué, elle a
formulé un rejet pour des questions de pure forme. Donc, on est revenu à
la décision de la cour d’appel de Rennes ».
C’est aux responsables nationaux de déposer des projets
de loi s’ils veulent que la loi change. Ce n’est pas à la justice de
jouer aux législateurs
Et le magistrat de rappeler le droit : « Pour nous, le droit, c’est
la circulaire relative au droit civil selon laquelle le signe n’est pas
reconnu par la langue française. Je ne souhaite donc qu’une chose, c’est
que la cour de cassation donne une décision définitive. Je souhaite
qu’il y ait de nouveaux recours pour qu’on puisse aller en cour de
cassation ». Car derrière cette affaire très bretonne, Jean-François
Thony craint que, demain, d’autres cas extérieurs à la langue régionale
arrivent dans les salles d’audience, tels que le a cédille de la
communauté turque ou le o barré des Suédois.
Mais le procureur général a aussi profité de cette mise au point pour
répondre, avec un certain agacement, aux attaques des députés bretons :
« C’est aux responsables nationaux de déposer des projets de loi s’ils
veulent que la loi change. Ce n’est pas à la justice de jouer aux
législateurs ». À bon entendeur.
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