Saccage : qui s’est attaqué au tribunal administratif ?
Publié le 10/03/2015 à 03:54, Mis à jour le 10/03/2015 à 07:47
Faits divers
Les pompiers sont intervenus sur les lieux hier matin à 7 h 30. Les locaux étaient en partie inondés./DDM. Thierry Bordas
D’importantes dégradations et des inscriptions menaçantes non
revendiquées ont été découvertes, hier matin, à l’intérieur du tribunal
adminisratif de Toulouse.
Qui en veut au tribunal administratif de Toulouse ? Cette enceinte
judiciaire de la rue Raymond IV, située face à la gare routière, qui
juge les litiges entre citoyens et administrations n’a pas l’habitude
cristalliser la haine ou les déferlements de violence. Fait rare, hier
matin, les locaux de la juridiction administrative ont été visés par
d’importantes dégradations. Des détériorations importantes non
revendiquées par un groupe ou une organisation.
Appelés à intervenir pour un dégât des eaux peu avant 7 heures, les
pompiers découvrent des traces d’intrusion et des locaux saccagés,
notamment au second étage du bâtiment. Dans l’enceinte judiciaire où
travaillent environ 60 personnes (magistrats et personnel
administratif), sur l’ensemble des quatre étages, de nombreuses
infiltrations d’eau provoquées par des ouvertures de robinet, viennent
d’endommager les sols et faux plafonds dans les étages du bâtiment.
Photocopieurs renversés, dossiers jetés au sol, bureaux fouillés et des
inscriptions à la bombe de peinture noire tout aussi troublantes
découvertes sur des murs intérieurs : «Le prophète te jugera» et
«Avertisse-ment». Le nom d’une fonctionnaire travaillant dans ce
bâtiment a également été inscrit à la bombe sur l’un de ces murs. Une
mise à sac qui pourrait remonter à ce week-end.
Ces écrits et ces dégradations sont-ils en lien avec un événement
précis survenu au sein de l’enceinte judiciaire ces derniers jours ? Une
question au cœur de l’enquête désormais confiée à la brigade de
répression du banditisme du SRPJ de Toulouse. Le tribunal administratif
juge en grande majorité des contentieux portant sur le droit des
étrangers. Lorsque la préfecture prend une mesure d’expulsion, le
tribunal est saisi par la personne visée à la suite d’un recours. «C’est
un lieu relativement tranquille mais il a à juger des situations
humainement délicates», précise un avocat qui intervient régulièrement
dans des dossiers de reconduite à la frontière. Car c’est aussi, ici,
que se joue une partie de la vie de nombreuses personnes en situation
irrégulière. Hasard du calendrier, ces actes de vandalisme interviennent
le jour de la visite officielle du vice-président du conseil d’État,
Jean-Marc Sauvé et de la présidente de la cour administrative d’appel de
Bordeaux, Anne Guérin. La venue de ces deux personnalités «était
programmée de longue date», assure une source judiciaire. C’est aussi la
première fois qu’un tribunal administratif subi de tels foudres. Il y a
une vingtaine d’années des Corses s’en étaient pris aux locaux de cette
juridiction, à Limoges. Hier, l’accès au tribunal est resté interdit au
public.
31 % des affaires jugées concernent le droit des étrangers
Le Tribunal administratif de Toulouse couvre les départements de
l’Ariège, l’Aveyron, la Haute-Garonne, le Tarn et le Tarn-et-Garonne. La
juridiction comporte 6chambres qui prennent en charge les contentieux
dans divers domaines : fiscalité, santé, travail, droit des étrangers,
urbanisme, environnement, logement, marchés et contrats, travaux
publics, collectivités locales, fonction publique, aide sociale,
agriculture… En 2014 6 045 affaires ont été enregistrées et 6 196
affaires ont été jugées dont 1 853 en lien avec le droit des étrangers,
parmi lesquelles 504 mesures d’éloignement/juge des 72 heures (31 % des
affaires). Les enregistrements de dossiers d’étrangers sont en
augmentation de 11 % et ceux qui relèvent du délai de jugement de 72
heures en augmentation de 25,06 %. Les contentieux sociaux marquent
également un net accroissement de 23,5 %. Idem pour les dossiers fiscaux
en augmentation sensible de 13,4 %.
Patrick Fouinneteau, représentant national FO./DDM. X. de F.
L’émotion était grande hier matin au sein du personnel du tribunal administratif de Toulouse.
La juridiction administrative, présidée par M. Richard Moussaron,
emploie un effectif de soixante-dix personnes dont 27 magistrats et 37
agents de greffe. Selon le syndicat FO, une greffière et un magistrat
auraient été nommément visés sur les graffitis découverts dans les
locaux. Inquiète pour la sécurité du personnel, l’intersyndicale demande
un droit de retrait des fonctionnaires et la mise en place d’une
cellule psychologique. «On est face à un événement grave», dit Patrick
Fouinneteau, représentant national FO pour les juridictions
administratives, venu spécialement hier de Montpellier. «J’ai rencontré
quelques agents de greffe qui sont choqués. Je demande à ce qu’une
cellule psychologique soit mise en place à Toulouse. Conformément au
statut des fonctionnaires s’ils se sentent en danger dans l’exercice de
leur fonction, nous demandons l’exercice du droit de retrait. Il va
falloir que le CHSCT (ndlr : comité d’hygiène, de sécurité et des
conditions de travail) prenne des décisions sur la sécurisation du
personnel toulousain et au-delà sur la sécurisation de toutes les
juridictions administratives, poursuit ce délégué du syndicat
majoritaire. «On ne peut que constater qu’on n’est pas aujourd’hui dans
des conditions optimales de travail. Ce bâtiment a pris l’eau de toutes
parts, les plafonds s’affaissent, il faut absolument sécuriser
l’électricité car il y a des risques d’électrocution. C’est dans cette
optique que j’ai demandé à l’Administration l’exercice du droit de
retrait pour au moins 48 heures».
Jean-Marc Sauvé : «Des actes de vandalisme graves»
Publié le 10/03/2015 à 07:39
Faits divers
Jean-Marc Sauvé : «Des actes de vandalisme graves»
Coïncidence, le vice-président du Conseil d’Etat, juge suprême des
juridictions administratives, était hier en visite au tribunal
administratif de Toulouse.
Jean-Marc Sauvé a d’emblée écarté tout lien entre sa visite dans la
juridiction de Toulouse et les dégradations commises dans les locaux du tribunal durant le week-end. Le vice-président du conseil d’Etat a
participé à une longue réunion avec le président du tribunal
administratif de Toulouse Richard Moussaron, des agents et des
magistrats. Selon M. Sauvé, «tout porte à croire qu’il s’agit d’un acte
isolé».
Le tribunal administratif de Toulouse peut-il continuer à fonctionner ?
Oui, le tribunal administratif tiendra les audiences programmées. Dès
demain la direction de l’équipement de la juridiction administrative
vient pour examiner la situation et pour étudier toutes les mesures de
sécurité supplémentaires qui doivent être prises pour protéger les
locaux, les audiences et le personnel. Trois niveaux ont été
délibérément inondés, quelques matériels et dossiers jetés par terre, et
on a trouvé une demi-douzaine de graffitis mais une grande partie des
locaux est au sec et l’immense majorité des dossiers et des matériels
bureautiques sont en état.
L’intersyndicale demande à l’Administration d’exercer un droit de retrait de 48 heures au moins…
Je comprends la réaction du personnel, c’est une réaction d’émotion
compréhensible. Cette situation qui perturbe notre juridiction nous
désole. Nous examinerons cette demande, dans le cadre de l’hygiène et la
sécurité, mais je ne pense pas que le droit de retrait s’exerce ici.
Les locaux du tribunal administratif de Toulouse sont
installés dans un immeuble où se trouvent également d’autres bureaux et
des logements…
Cette situation n’est pas exceptionnelle. Beaucoup de juridictions
administratives sont installées dans des édifices de bureaux. La
direction de l’équipement des juridictions administratives déterminera
quelles sont les mesures de sécurité pour éviter que ne se reproduisent
de pareils actes. La réfection des locaux et la sécurisation du bâtiment
sont une priorité budgétaire absolue. Les personnes nominativement
visées font l’objet d’un soutien particulier et bénéficient de la
protection fonctionnelle de l’Etat comme le veut la loi.
L’étrange blackout sur le saccage du Tribunal administratif de Toulouse
Par Gilles Gaetner | Atlantico.fr – jeu. 12 mars 2015
Dans la nuit du 8 au 9 mars, le Tribunal administratif de Toulouse
a été entièrement vandalisé : dossiers éparpillés sur le sol, bureaux
visités, photocopieurs renversés etc… Une magistrate a fait l’objet de
menaces de mort. Ce tribunal juge un fort contentieux concernant le
droit des étrangers. Y aurait-il là un début d’explication à ce saccage ?
C’est
un fait divers, si l’on peut l’appeler ainsi, dont personne ou presque,
ne parle. Et pourtant, il est d’une particulière gravité. Pour la
première fois, depuis que la France se voit touchée par une série de
dégradations, d’actes racistes, antisémites et d’attentats, un bâtiment
judiciaire a fait l’objet d’un saccage en bonne et due forme. Cela s’est
passé au Tribunal administratif de Toulouse, où sur quatre étages,
bureaux de magistrats, de greffiers ont été littéralement vandalisés,
vraisemblablement lors du week-end du 8 au 9 mars. Le lundi matin, vers 6
heures 30, les pompiers sont appelés pour un dégât des eaux au
Tribunal. Ils sont abasourdis. La juridiction baigne dans l’eau.
Visiblement au cours de la nuit, les robinets de l’ensemble du bâtiment
ont été sciemment ouverts. L’eau a coulé plusieurs heures durant,
abîmant sols et faux-plafonds…
Mais le pire est à venir : des dossiers
sont éparpillés, parfois déchirés, des photocopieurs ont été renversés,
des bureaux visités… Et surtout, sur les quatre étages
apparaissent sous forme de tags, les mêmes inscriptions à la bombe de
peinture noire : « Le prophète te jugera » ou encore « Avertissement. » Le nom d’une magistrate, de confession musulmane, est même écrit sur les murs. Comme ceux de fonctionnaires de police. Les menaces de mort sont à peine voilées. Passé
le moment de stupeur, le personnel prend vite conscience que ce saccage
n’est sans doute pas le fait d’une bande de jeunes voyous et
désoeuvrés… Non, cette intrusion, la (…)lire la suite sur Atlantico
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