Blablabla… Blablabla… Certains continuent à professer hors des réalités…
Les femmes doivent porter plainte, peut-on lire ici ou là, les réseaux sociaux ne sont pas le lieu pour dénoncer, etc, etc…
Bah, si c’était si simple, si les victimes pouvaient être entendues ailleurs, le tag n’aurait pas rencontré un tel succès.
Pour commencer, 95% des femmes qui dénoncent un fait de harcèlement sexuel perdent leur emploi.
Mais ce n’est pas tout. Dans l’immense majorité des cas, elles perdent aussi toute crédibilité avec la décision de justice qui va nécessairement en découler.
Et quels sont les critères des magistrats pour refuser de poursuivre ou absoudre le délinquant ou criminel ?
Ils se résument presque toujours au classique « le viol d’une pute n’est pas un viol ».
Leur définition de « la pute » est celle des porcs : c’est celle qui dit non, elle n’avait qu’à dire oui.
Le juge est un porc.
http://www.francetvinfo.fr/culture/cinema/affaire-harvey-weinstein/balancetonporc-un-hashtag-ne-remplace-pas-un-proces_2422283.html
Mis à jour le 16/10/2017 | 11:58
publié le 16/10/2017 | 11:58
« Un hashtag ne remplace pas un procès », a tempéré la journaliste et philosophe des médias Clara Schmelck, invitée de franceinfo lundi 16 octobre, après le succès du hashtag #balancetonporc sur Twitter. Pour elle, ces harcèlements sexuels qui ont été dénoncés doivent « passer devant les tribunaux », car « ce sont des faits très graves. Ce ne sont pas juste des comportements indélicats ».
Après l’affaire Weinstein, des milliers de femmes en France ont raconté le harcèlement ou les agressions sexuelles dont elles ont pu être victimes. La journaliste Sandra Muller a créé le mot clé #balancetonporc sur le réseau social Twitter pour « dénoncer » ceux qui harcèlent.
franceinfo : Est-ce que le succès du hashtag « balance ton porc » vous étonne ?
Clara Schmelck : Non, car cela fait un moment déjà que Twitter est utilisé pour libérer la parole. Sandra Muller, celle qui a lancé le hashtag, l’a fait en temps voulu. Les femmes étaient prêtes à raconter, et on le voit d’ailleurs. Le sujet du harcèlement, des choses qui sont passibles de justice, ont été cadrées, énoncées et factualisées. Ça, c’est une avancée très grande.
Est-ce un cri de colère ou est-ce que cela pourra aller vers un procès ?
Ce sont des faits très clairs et très explicites qui ont été décrits. Surtout, on se demande comment cela n’a pas pu déjà être mis en procès. C’est vraiment la question de la rapidité de la justice, et en même temps sa nécessité qui est posée, car le hashtag ne remplace pas un procès. Quand vous regardez #balancetonporc, ce sont des faits très graves, des faits vraiment condamnables, ce ne sont pas juste des comportements indélicats. Certains récits remontent à plusieurs années. Ce qui a été dénoncé doit passer devant les tribunaux. C’est aussi pour donner l’exemple aux générations futures, leur montrer que ces pratiques sont d’un autre âge et que l’on ne peut plus faire ça maintenant.
Y-a-t-il un risque d’accuser nommément ses agresseurs ?
Accuser sans preuve est très risqué. Il y des risques de calomnie ou de règlement de comptes. Il y a aussi une autre difficulté, c’est d’énoncer des faits difficiles à raconter en 160 caractères.
http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20171016.OBS6065/balance-ton-porc-la-force-du-groupe-peut-provoquer-un-changement-social.html
« Un jour, je vais te baiser, que tu le veuilles ou non. » Avec le hashtag #BalanceTonPorc, des milliers de femmes livrent sur Twitter leurs témoignages de harcèlement sexuel au travail. Une action lancée en France après la prise de parole de nombreuses femmes contre le producteur américain Harvey Weinstein, accusé de harcèlement, d’agression sexuelle et de viol. Serge Hefez est psychiatre, et travaille entre autres sur les problématiques liées à la sexualité. Il décrypte pour « l’Obs » les mécanismes psychologiques à l’œuvre derrière ce hashtag.
« Balance ton porc » : l’affaire Weinstein libère la parole sur le harcèlement sexuel
Quel regard portez-vous sur cette vague de témoignages de harcèlement sexuel, regroupés sous le hashtag #balancetonporc ?
Ne soyons pas hypocrites : on ne tombe pas tous des nues quand on apprend qu’un producteur hollywoodien profite de sa position pour draguer lourdement, voire violer, un certain nombre d’actrices.
http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20171016.OBS6073/balance-ton-porc-quelles-suites-judiciaires-possibles-aux-temoignages.html
Le déferlement de témoignages avec le hashtag #balancetonporc charrie toutes sortes de récits, de propos ou gestes déplacés jusqu’aux agressions sexuelles. La plupart ne donne pas d’éléments d’identification, mais dans certains cas les hommes mis en cause sont identifiables. Avec quelles conséquences ?
Depuis la loi du 6 août 2012 (présentation, texte), le harcèlement sexuel est en France un délit, défini comme « le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ».
Et est assimilé au harcèlement sexuel « le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers ».
Dès lors, toutes les paroles, pour certaines précises, diffusées depuis le 13 octobre sur des « porcs » resteront-elles cantonnées au Net ou peuvent-elles entraîner des conséquences en justice ?
http://www.francetvinfo.fr/culture/cinema/affaire-harvey-weinstein/balancetonporc-denoncer-un-harcelement-sexuel-sur-un-reseau-social-avec-un-hashtag-ce-n-est-pas-du-tout-l-endroit_2422691.html
Ces publications contribuent à « la libération de la parole des femmes » et représente une »première étape avant l’intervention de la justice », abonde Céline Piques, porte-parole de l’association Osez le féminisme. Mais Christophe Noël, avocat spécialiste du droit du travail, prévient : « Quand on veut dénoncer une situation de harcèlement sexuel, il ne faut pas s’y prendre de cette façon-là. »
Franceinfo : Ces tweets n’exposent-ils pas à des attaques en diffamation ?
Christophe Noël : On est en plein dedans. Dénoncer un harcèlement sexuel sur un réseau social avec un hashtag, ce n’est pas du tout l’endroit. C’est une caisse de résonance phénoménale et c’est la porte ouverte à toutes sortes d’excès et de diffamations. Le problème, c’est qu’il y a à la fois du vrai et du faux et que tout se mélange. Il n’y a aucun moyen de contrôler ce qui est dit sur ce réseau social. On va sans doute retrouver des gens qui, par vengeance, vont calomnier des collègues de travail avec lesquels ils ne s’entendent pas.
Ce n’est pas bon : ça peut se retourner contre les victimes qui dénoncent un harcèlement sexuel. Les personnes qu’elles visent peuvent porter plainte pour « diffamation » ou « injure ». Les employeurs pris pour cible peuvent sanctionner leurs salariés. Il ne faut pas accuser à la légère, surtout en public. Quand on veut dénoncer une situation de harcèlement sexuel, il ne faut pas s’y prendre de cette façon-là. Il n’y a pas de publicité à donner à l’affaire. Il y a des moyens d’action sérieux, concrets, qui ne prêtent pas le flanc à la critique ou à la plainte.
Comment s’y prendre pour dénoncer un harceleur sexuel ?
En théorie, il y a plein de moyens. On peut porter plainte auprès des policiers ou des gendarmes, on peut aller voir la médecine ou l’inspection du travail, on peut dénoncer auprès de la direction de l’entreprise, voire le comité d’entreprise qui est là pour protéger la santé des salariés… Mais tout cela s’avère souvent soit théorique parce que les gens ne sont pas formés à répondre à cela, notamment les policiers et les gendarmes qui ne maîtrisent absolument pas ce délit la plupart du temps. La réponse donnée aux femmes qui se plaignent de ça est à 95% : « Mais madame, allez devant les prud’hommes. » L’inspection et la médecine du travail doivent constater quelque chose qui est souvent caché. Souvent, il n’y a pas de suites. Quant à dénoncer ces situations auprès de la direction de l’entreprise, la plupart des gens travaillent dans des PME et le harceleur est souvent le chef d’entreprise lui-même.
La meilleure façon de faire, c’est d’écrire au harceleur lui-même. Envoyer un petit mail, par exemple. A chaque fois qu’on subit un acte, un propos, un comportement pas tolérable, on l’écrit. « Ta remarque sur mon décolleté aujourd’hui, ça n’a pas sa place sur le lieu de travail », par exemple. Ça a un effet. D’abord, ça peut parfois résoudre le problème, même si c’est rare. Mais surtout, ça permet à la victime d’établir la situation. C’est un indice pour le procès futur qui va permettre de présumer la situation de harcèlement, parce que l’auteur du harcèlement va parfois répondre : « Tu le prends mal… C’est une plaisanterie grivoise… »
Il faut prendre les devants, sortir de son rôle de victime et dénoncer la situation le plus vite possible directement auprès du harceleur. C’est fondamental pour la suite, parce que souvent on se heurte à un problème de preuve. Le harcèlement, c’est souvent quelque chose de caché, de ténu, d’insidieux, qui ne se fait pas en public devant témoins et qui vise des personnes fragiles.
Cette initiative ne permet-elle pas surtout d’inciter les victimes à agir ?
Libérer la parole, c’est très bien. Le grand mérite des affaires comme celle d’Harvey Weinstein, c’est qu’elles sont des caricatures. Ces cas-là n’existent pas dans la vraie vie. On n’a pas de monstres pareils dans le monde du travail. Ce sont des cas moins extrêmes. Mais au moins elles ont un mérite : elles informent les victimes et leur permettent de prendre conscience qu’elles ont des droits, qu’elles peuvent agir.
Car il y a un gros défaut d’information des victimes, mais aussi de prise en charge par la justice. Les services de police et de gendarmerie ne sont pas formés à cela ou ils comprennent et maîtrisent assez mal ce délit. Sur le plan pénal, il faudrait faciliter l’action. La plupart du temps, ça ne débouche pas : les plaintes déposées en gendarmerie ou au commissariat sont classées sans suite. Sur le plan civil, la définition du harcèlement est claire et il y a un aménagement de la preuve qui aide la victime. Sur l’action aux prud’hommes, le Défenseur des droits n’est pas assez mis en avant. Il peut s’associer à l’action des victimes.
Ce n’est pas si compliqué d’agir, de dénoncer une situation de harcèlement sexuel. Il y a des moyens d’action. Les victimes peuvent saisir le Défenseur des droits. Il a un rôle fondamental dans la lutte contre le harcèlement au travail. Il a un pouvoir d’enquête, d’investigation, il pourra aussi vous conseiller utilement. En plus, c’est gratuit. Ce serait dommage de s’en priver. C’est un interlocuteur fiable et sérieux.
Vous pouvez saisir un avocat pour agir en justice. Et il n’y a pas que l’action au pénal, qui est compliquée, parce qu’il faut apporter la culpabilité de la personne devant le tribunal, il faut une preuve directe de la culpabilité de la personne. Devant un conseil de prud’hommes, la preuve est facilitée. On ne vous demande pas d’apporter la preuve, mais des éléments permettant de présumer un harcèlement sexuel. C’est beaucoup plus facile d’engager des poursuites. Et lorsque vous agissez pour dénoncer un harcèlement sexuel, vous ne pouvez pas être sanctionné pour ça. La victime n’a rien à perdre à agir. Et c’est libérateur.
http://www.rtl.fr/actu/societe-faits-divers/que-risque-t-on-en-denoncant-des-noms-sur-internet-7790546073
Diffamations, injures, dénonciations calomnieuses… S’exprimer sur les réseaux sociaux ne met pas à l’abris de poursuites judiciaires. La loi stipule que la personne dénoncée peut se défendre juridiquement si elle est nommément citée ou reconnaissable. Si c’est le cas, elle peut alors attaquer l’auteur du message, elle a trois mois pour le faire.
Twitter ne risque rien, mais les services juridiques du réseau social ont l’obligation de transmettre l’identité et les coordonnées de l’auteur, même si ce dernier utilise un pseudonyme. Personne n’est anonyme sur Twitter. Et si une personne retwitte, republie, le message incriminé, elle peut aussi être poursuivie. Tout comme l’accusateur principal elle risque jusqu’à 12.000 euros d’amende. Le lundi 16 octobre dans la soirée, le parquet de Paris n’avait pas encore été informé de plaintes à ce sujet.
L’affaire Weinstein a libéré la parole de nombreuses femmes qui racontent via le hashtag #BalanceTonPorc des cas de harcèlement de la vie quotidienne. Lancé par la journaliste Sandra Muller, le mouvement prend de plus en plus d’ampleur. Elle avait écrit sur Twitter, le vendredi 13 octobre : « #BalanceTonPorc : toi aussi raconte, en donnant le nom et les détails d’un harcèlement sexuel que tu as connu dans ton boulot. Je vous attends ».
Les femmes doivent porter plainte, peut-on lire ici ou là, les réseaux sociaux ne sont pas le lieu pour dénoncer, etc, etc…
Bah, si c’était si simple, si les victimes pouvaient être entendues ailleurs, le tag n’aurait pas rencontré un tel succès.
Pour commencer, 95% des femmes qui dénoncent un fait de harcèlement sexuel perdent leur emploi.
Mais ce n’est pas tout. Dans l’immense majorité des cas, elles perdent aussi toute crédibilité avec la décision de justice qui va nécessairement en découler.
Et quels sont les critères des magistrats pour refuser de poursuivre ou absoudre le délinquant ou criminel ?
Ils se résument presque toujours au classique « le viol d’une pute n’est pas un viol ».
Leur définition de « la pute » est celle des porcs : c’est celle qui dit non, elle n’avait qu’à dire oui.
Le juge est un porc.
http://www.francetvinfo.fr/culture/cinema/affaire-harvey-weinstein/balancetonporc-un-hashtag-ne-remplace-pas-un-proces_2422283.html
#balancetonporc : « Un hashtag ne remplace pas un procès »
La journaliste Clara Schmelck a estimé, lundi sur franceinfo, que les harcèlements qui ont été dénoncés sur Twitter via #balancetonporc doivent « passer devant les tribunaux ».
franceinfoRadio France
publié le 16/10/2017 | 11:58
« Un hashtag ne remplace pas un procès », a tempéré la journaliste et philosophe des médias Clara Schmelck, invitée de franceinfo lundi 16 octobre, après le succès du hashtag #balancetonporc sur Twitter. Pour elle, ces harcèlements sexuels qui ont été dénoncés doivent « passer devant les tribunaux », car « ce sont des faits très graves. Ce ne sont pas juste des comportements indélicats ».
Après l’affaire Weinstein, des milliers de femmes en France ont raconté le harcèlement ou les agressions sexuelles dont elles ont pu être victimes. La journaliste Sandra Muller a créé le mot clé #balancetonporc sur le réseau social Twitter pour « dénoncer » ceux qui harcèlent.
franceinfo : Est-ce que le succès du hashtag « balance ton porc » vous étonne ?
Clara Schmelck : Non, car cela fait un moment déjà que Twitter est utilisé pour libérer la parole. Sandra Muller, celle qui a lancé le hashtag, l’a fait en temps voulu. Les femmes étaient prêtes à raconter, et on le voit d’ailleurs. Le sujet du harcèlement, des choses qui sont passibles de justice, ont été cadrées, énoncées et factualisées. Ça, c’est une avancée très grande.
Est-ce un cri de colère ou est-ce que cela pourra aller vers un procès ?
Ce sont des faits très clairs et très explicites qui ont été décrits. Surtout, on se demande comment cela n’a pas pu déjà être mis en procès. C’est vraiment la question de la rapidité de la justice, et en même temps sa nécessité qui est posée, car le hashtag ne remplace pas un procès. Quand vous regardez #balancetonporc, ce sont des faits très graves, des faits vraiment condamnables, ce ne sont pas juste des comportements indélicats. Certains récits remontent à plusieurs années. Ce qui a été dénoncé doit passer devant les tribunaux. C’est aussi pour donner l’exemple aux générations futures, leur montrer que ces pratiques sont d’un autre âge et que l’on ne peut plus faire ça maintenant.
Y-a-t-il un risque d’accuser nommément ses agresseurs ?
Accuser sans preuve est très risqué. Il y des risques de calomnie ou de règlement de comptes. Il y a aussi une autre difficulté, c’est d’énoncer des faits difficiles à raconter en 160 caractères.
http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20171016.OBS6065/balance-ton-porc-la-force-du-groupe-peut-provoquer-un-changement-social.html
« Balance ton porc » : « La force du groupe peut provoquer un changement social »
Pour le psychiatre Serge Hefez, le hashtag #BalanceTonPorc permet aux femmes victimes de harcèlement sexuel de créer un mouvement social.
Mathilde GoupilPublié le 16 octobre 2017 à 16h37
« Un jour, je vais te baiser, que tu le veuilles ou non. » Avec le hashtag #BalanceTonPorc, des milliers de femmes livrent sur Twitter leurs témoignages de harcèlement sexuel au travail. Une action lancée en France après la prise de parole de nombreuses femmes contre le producteur américain Harvey Weinstein, accusé de harcèlement, d’agression sexuelle et de viol. Serge Hefez est psychiatre, et travaille entre autres sur les problématiques liées à la sexualité. Il décrypte pour « l’Obs » les mécanismes psychologiques à l’œuvre derrière ce hashtag.
« Balance ton porc » : l’affaire Weinstein libère la parole sur le harcèlement sexuel
Quel regard portez-vous sur cette vague de témoignages de harcèlement sexuel, regroupés sous le hashtag #balancetonporc ?
Ne soyons pas hypocrites : on ne tombe pas tous des nues quand on apprend qu’un producteur hollywoodien profite de sa position pour draguer lourdement, voire violer, un certain nombre d’actrices.
Vous dites « draguer lourdement », mais on parle de harcèlement sexuel, là ?
Oui, vous avez raison. Et dans le cas Weinstein, on parle aussi de viols, c’est bien de ça dont il est question.
Ce qui est intéressant avec ce hashtag, c’est que la façon dont se crée le lien social s’est renversée ces derniers jours. Il y a une espèce de complaisance sociale autour du sujet des agressions sexuelles. La complicité fait que tout le monde se voile la face, et le lien social se crée autour du fait de ne pas vouloir savoir. Jusqu’au moment où quelque chose brise l’omerta.
Désormais, on fait face à une irruption extrêmement brutale de femmes qui témoignent. On est passé d’une situation où être liés les uns aux autres, c’était faire semblant de ne pas savoir, à une situation où tout le monde témoigne dans la presse et sur Twitter de ces agressions. Et tant mieux. C’est comme des traînées de poudre, sauf que ce sont des traînées d’indignation partagée. On se relie tous les uns aux autres autour de la même émotion. Personne n’ignore que la plupart des femmes doivent subir un certain nombre d’agressions, des plus « minimes » aux plus majeures. Mais là, ça devient un fait social.
Pourquoi le mouvement a-t-il aussi bien pris sur les réseaux sociaux ?
Parce que tout sur les réseaux sociaux va très vite, ils permettent de créer très vite un groupe. Et il y a un pouvoir libérateur à la parole partagée : témoigner seul auprès d’un journaliste permet de se représenter soi-même comme victime, mais ça n’a pas force de ralliement.
Est-ce que ça n’est pas aussi parce qu’un tweet engage moins qu’une plainte ? Et dans les cas où les faits exposés sont prescrits, et qu’il n’existe donc pas de suite judiciaire possible, cela permet quand même de verbaliser son expérience ?
Oui, tout à fait. Mais j’ajouterais quand même que si le tweet engage moins, le lien virtuel reste très fort. Je change totalement de sujet pour l’illustrer, mais je travaille aussi sur le processus de radicalisation. Et les personnes que je rencontre se sont quasiment toutes radicalisées via internet. Il ne faut pas sous-estimer la puissance de ce lien-là.
Vous parlez de « pouvoir libérateur ». Donc le fait de verbaliser son agression est une première étape importante ?
C’est une première étape fondamentale. Non pas tant dans la perspective de revendiquer un statut de victime – même si ça n’est pas anodin de le faire. Mais surtout dans l’idée de faire du lien social, de sentir la force du groupe et du mouvement social autour de soi. On n’est pas seulement dans une position de victime qui cherche la réparation, on est membre d’un groupe de femmes qui, par la force du groupe, peut provoquer un changement social.
Justement, qu’est-ce qui vient après le témoignage ?
Ce qui vient après, c’est : comment l’individu se détache de ce groupe pour être dans sa propre mobilisation et sa propre action ? Il y a sans doute des femmes qui vont oser déposer plainte au pénal, portées par la force de la mobilisation sur Twitter. C’est à chaque femme de déterminer si elle se mobilise aussi personnellement.
Mais est-ce qu’il n’y a pas un risque pour ces femmes de se sentir abandonnées dans leur combat quand Twitter et les médias passeront à autre chose ?
Effectivement, c’est toujours le risque de ces mobilisations effervescentes : ça crée un mouvement collectif et ensuite ça retombe. Sans être cynique, que va-t-il se passer ? Des milliers de femmes vont témoigner sur les réseaux sociaux et dans la presse. Et puis dans deux mois, voire quinze jours, plus personne n’y pensera, et les femmes vont continuer à subir en silence.
Pour que ces femmes ne se sentent pas doublement agressées, il faut que leur indignation soit reprise sur un plan politique. Il faut qu’il y ait un changement perceptible dans la vie des femmes au quotidien : que le chef du rayon qui met la main aux fesses de la caissière ne le fasse plus. Et que les hommes commencent à avoir peur aussi, qu’ils ne se sentent plus impunis.
Comment on fait ?
Aux Etats-Unis ou dans les pays nordiques par exemple, l’acception de ce qu’est le harcèlement sexuel est beaucoup plus large : on ne dit pas à une collègue que sa robe lui va bien. Chez nous, il existe une sorte de marivaudage à la française qui brouille les repères entre la drague, la « drague lourde », et la violence sexuelle. Il faut travailler sur ces frontières-là, pour les rendre plus claires.
Il faut voir ce que proposera la loi qui est en préparation [le projet de loi « contre les violences sexistes et sexuelles », NDLR]. Mais c’est le rôle de toute la société : il existe une prévention à faire avec des affiches dans le métro, des spots à la télévision, mais aussi quelque chose de plus fin dans l’éducation, notamment des garçons. Mais aujourd’hui, cette idée rencontre beaucoup d’obstacles.
Propos recueillis par Mathilde Goupil
Oui, vous avez raison. Et dans le cas Weinstein, on parle aussi de viols, c’est bien de ça dont il est question.
Ce qui est intéressant avec ce hashtag, c’est que la façon dont se crée le lien social s’est renversée ces derniers jours. Il y a une espèce de complaisance sociale autour du sujet des agressions sexuelles. La complicité fait que tout le monde se voile la face, et le lien social se crée autour du fait de ne pas vouloir savoir. Jusqu’au moment où quelque chose brise l’omerta.
Désormais, on fait face à une irruption extrêmement brutale de femmes qui témoignent. On est passé d’une situation où être liés les uns aux autres, c’était faire semblant de ne pas savoir, à une situation où tout le monde témoigne dans la presse et sur Twitter de ces agressions. Et tant mieux. C’est comme des traînées de poudre, sauf que ce sont des traînées d’indignation partagée. On se relie tous les uns aux autres autour de la même émotion. Personne n’ignore que la plupart des femmes doivent subir un certain nombre d’agressions, des plus « minimes » aux plus majeures. Mais là, ça devient un fait social.
Pourquoi le mouvement a-t-il aussi bien pris sur les réseaux sociaux ?
Parce que tout sur les réseaux sociaux va très vite, ils permettent de créer très vite un groupe. Et il y a un pouvoir libérateur à la parole partagée : témoigner seul auprès d’un journaliste permet de se représenter soi-même comme victime, mais ça n’a pas force de ralliement.
Est-ce que ça n’est pas aussi parce qu’un tweet engage moins qu’une plainte ? Et dans les cas où les faits exposés sont prescrits, et qu’il n’existe donc pas de suite judiciaire possible, cela permet quand même de verbaliser son expérience ?
Oui, tout à fait. Mais j’ajouterais quand même que si le tweet engage moins, le lien virtuel reste très fort. Je change totalement de sujet pour l’illustrer, mais je travaille aussi sur le processus de radicalisation. Et les personnes que je rencontre se sont quasiment toutes radicalisées via internet. Il ne faut pas sous-estimer la puissance de ce lien-là.
Vous parlez de « pouvoir libérateur ». Donc le fait de verbaliser son agression est une première étape importante ?
C’est une première étape fondamentale. Non pas tant dans la perspective de revendiquer un statut de victime – même si ça n’est pas anodin de le faire. Mais surtout dans l’idée de faire du lien social, de sentir la force du groupe et du mouvement social autour de soi. On n’est pas seulement dans une position de victime qui cherche la réparation, on est membre d’un groupe de femmes qui, par la force du groupe, peut provoquer un changement social.
Justement, qu’est-ce qui vient après le témoignage ?
Ce qui vient après, c’est : comment l’individu se détache de ce groupe pour être dans sa propre mobilisation et sa propre action ? Il y a sans doute des femmes qui vont oser déposer plainte au pénal, portées par la force de la mobilisation sur Twitter. C’est à chaque femme de déterminer si elle se mobilise aussi personnellement.
Mais est-ce qu’il n’y a pas un risque pour ces femmes de se sentir abandonnées dans leur combat quand Twitter et les médias passeront à autre chose ?
Effectivement, c’est toujours le risque de ces mobilisations effervescentes : ça crée un mouvement collectif et ensuite ça retombe. Sans être cynique, que va-t-il se passer ? Des milliers de femmes vont témoigner sur les réseaux sociaux et dans la presse. Et puis dans deux mois, voire quinze jours, plus personne n’y pensera, et les femmes vont continuer à subir en silence.
Pour que ces femmes ne se sentent pas doublement agressées, il faut que leur indignation soit reprise sur un plan politique. Il faut qu’il y ait un changement perceptible dans la vie des femmes au quotidien : que le chef du rayon qui met la main aux fesses de la caissière ne le fasse plus. Et que les hommes commencent à avoir peur aussi, qu’ils ne se sentent plus impunis.
Comment on fait ?
Aux Etats-Unis ou dans les pays nordiques par exemple, l’acception de ce qu’est le harcèlement sexuel est beaucoup plus large : on ne dit pas à une collègue que sa robe lui va bien. Chez nous, il existe une sorte de marivaudage à la française qui brouille les repères entre la drague, la « drague lourde », et la violence sexuelle. Il faut travailler sur ces frontières-là, pour les rendre plus claires.
Il faut voir ce que proposera la loi qui est en préparation [le projet de loi « contre les violences sexistes et sexuelles », NDLR]. Mais c’est le rôle de toute la société : il existe une prévention à faire avec des affiches dans le métro, des spots à la télévision, mais aussi quelque chose de plus fin dans l’éducation, notamment des garçons. Mais aujourd’hui, cette idée rencontre beaucoup d’obstacles.
Propos recueillis par Mathilde Goupil
http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20171016.OBS6073/balance-ton-porc-quelles-suites-judiciaires-possibles-aux-temoignages.html
« Balance ton porc » : quelles peuvent être les suites judiciaires après tous ces témoignages ?
Certains des témoignages de harcèlement sexuel rapportés sur Twitter pourraient-ils déboucher sur une action en justice ? Possible, mais compliqué.
Thierry NoisettePublié le 16 octobre 2017 à 18h42
Le déferlement de témoignages avec le hashtag #balancetonporc charrie toutes sortes de récits, de propos ou gestes déplacés jusqu’aux agressions sexuelles. La plupart ne donne pas d’éléments d’identification, mais dans certains cas les hommes mis en cause sont identifiables. Avec quelles conséquences ?
Depuis la loi du 6 août 2012 (présentation, texte), le harcèlement sexuel est en France un délit, défini comme « le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ».
Et est assimilé au harcèlement sexuel « le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers ».
Le parquet peut être saisi d’éléments précis
Dès lors, toutes les paroles, pour certaines précises, diffusées depuis le 13 octobre sur des « porcs » resteront-elles cantonnées au Net ou peuvent-elles entraîner des conséquences en justice ?
Affaire Weinstein : comment est né « Balance ton porc », le hashtag contre le harcèlement sexuelInterrogée
par « l’Obs », Clarisse Taron, présidente du Syndicat de la
magistrature, souligne que « ce phénomène, c’est la preuve que c’est
difficile de porter plainte. Que la parole de ces femmes soit entendue,
c’est toujours compliqué. Ces messages par internet, ce n’est pas
toujours conforme à ce que la justice peut attendre, mais c’est la
traduction d’un réel besoin. »
Elle souligne qu’un parquet peut être saisi par tout moyen, et que le parquet peut s’auto-saisir s’il a suffisamment d’éléments précis portés à sa connaissance :
« Si quelqu’un écrit ‘j’ai été agressée par Untel’, ce n’est pas suffisant, mais si cette personne écrit ‘je travaille à tel endroit, où Untel m’a agressée’, c’est précis. Après, la chancellerie peut s’en saisir ou non, ou encore une association féministe locale peut saisir le parquet local en lui signalant ce qui a été écrit. »
Porter plainte n’est pas évident pour autant. Clarisse Taron observe que « ces affaires restent toujours compliquées à établir ».
Quid, en sens inverse, de la possibilité pour l’homme, mis au pilori virtuel par ses accusatrices, de contre-attaquer en justice ? La présidente du Syndicat de la magistrature précise que « contrairement au harcèlement où la justice peut s’auto-saisir, la plainte de la victime est indispensable en cas de diffamation. Ensuite, tout dépendra pour cette personne si les propos sont suffisamment précis. Et en face, on peut plaider l’exception de vérité… » – si on traite quelqu’un de voleur et que l’on prouve que c’est bien un voleur, le propos n’est plus condamnable comme diffamation. Pareil pour un harceleur. Eventuellement, « la personne désignée pourrait aussi attaquer pour injure, étant traitée de ‘porc’… ». A ses risques et périls…
Traitée de « conne » par Guy Bedos, Nadine Morano perd définitivement son procès
Jusqu’à présent, les plaintes pour harcèlement sexuel aboutissent rarement à des condamnations. Dans un rapport de la commission des Lois de l’Assemblée nationale en novembre 2016, sur l’évaluation de la loi n° 2012-954 du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel, les auteurs notaient que les condamnations pénales sont rares :
« Entre 30 et 40 condamnations pénales pour des faits de harcèlement sexuel ont été prononcées chaque année entre 1994 à 2003 et entre 70 à 85 condamnations entre 2006 et 2010. La plupart du temps, les coupables ont été condamnés à des peines de prison avec sursis (seules trois à quatre condamnations par an en moyenne comportaient une partie d’emprisonnement ferme). Dans 10 à 12% des cas, une peine d’amende était prononcée, d’un montant moyen de 1.000 euros. »
Et de souligner :
« Par ailleurs, la durée moyenne des procédures était très longue : le délai moyen entre les faits les plus récents et la date du jugement en première instance était de 27 mois. »
18 mois de prison pour un ex- »dircom » de Versailles condamné pour harcèlement sexuel
La loi d’août 2012 semble avoir eu peu d’effet : le directeur des affaires criminelles et des grâces, entendu par la commission des Lois, a « constaté que le nombre de plaintes et de condamnations n’avait pas augmenté depuis 2012. Ainsi en 2014, si 1.048 plaintes ont été déposées pour des faits de harcèlement sexuel, seules 65 condamnations ont été prononcées, 50% des poursuites ayant donné lieu, par ailleurs, à des procédures alternatives (rappel à la loi, composition pénale…). Seules 30 à 40% de ce type d’affaires font généralement l’objet de poursuites. »
6,2 % des plaintes aboutissent à une condamnation.
« Cet écart est encore plus flagrant avec le nombre potentiel de victimes de harcèlement, une femme active sur cinq déclarant avoir une fois été confrontée à de genre de comportement au cours de leur carrière », notaient les députés en citant une étude de l’Ifop de 2014.
T.N.
Elle souligne qu’un parquet peut être saisi par tout moyen, et que le parquet peut s’auto-saisir s’il a suffisamment d’éléments précis portés à sa connaissance :
« Si quelqu’un écrit ‘j’ai été agressée par Untel’, ce n’est pas suffisant, mais si cette personne écrit ‘je travaille à tel endroit, où Untel m’a agressée’, c’est précis. Après, la chancellerie peut s’en saisir ou non, ou encore une association féministe locale peut saisir le parquet local en lui signalant ce qui a été écrit. »
Prescription, diffamation : des écueils
Porter plainte n’est pas évident pour autant. Clarisse Taron observe que « ces affaires restent toujours compliquées à établir ».
« Il y a des enquêtes, des déclarations, des témoignages recueillis. Mais toutes les affaires de harcèlement, moral ou sexuel, restent compliquées, le risque étant qu’elles aboutissent à une situation de parole contre parole. »
Par ailleurs, les faits peuvent être frappés de prescription s’ils remontent, selon les cas, à plus de 3 ou 6 ans : la loi du 27 février 2017 sur la prescription a en effet fixé comme nouvelle durée de prescription d’un délit (cas du harcèlement) 6 ans. Mais si les faits étaient déjà prescrits avant la loi – remontant à 3 ans au moins -, ils le restent après.Quid, en sens inverse, de la possibilité pour l’homme, mis au pilori virtuel par ses accusatrices, de contre-attaquer en justice ? La présidente du Syndicat de la magistrature précise que « contrairement au harcèlement où la justice peut s’auto-saisir, la plainte de la victime est indispensable en cas de diffamation. Ensuite, tout dépendra pour cette personne si les propos sont suffisamment précis. Et en face, on peut plaider l’exception de vérité… » – si on traite quelqu’un de voleur et que l’on prouve que c’est bien un voleur, le propos n’est plus condamnable comme diffamation. Pareil pour un harceleur. Eventuellement, « la personne désignée pourrait aussi attaquer pour injure, étant traitée de ‘porc’… ». A ses risques et périls…
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Très peu de condamnations
Jusqu’à présent, les plaintes pour harcèlement sexuel aboutissent rarement à des condamnations. Dans un rapport de la commission des Lois de l’Assemblée nationale en novembre 2016, sur l’évaluation de la loi n° 2012-954 du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel, les auteurs notaient que les condamnations pénales sont rares :
« Entre 30 et 40 condamnations pénales pour des faits de harcèlement sexuel ont été prononcées chaque année entre 1994 à 2003 et entre 70 à 85 condamnations entre 2006 et 2010. La plupart du temps, les coupables ont été condamnés à des peines de prison avec sursis (seules trois à quatre condamnations par an en moyenne comportaient une partie d’emprisonnement ferme). Dans 10 à 12% des cas, une peine d’amende était prononcée, d’un montant moyen de 1.000 euros. »
Et de souligner :
« Par ailleurs, la durée moyenne des procédures était très longue : le délai moyen entre les faits les plus récents et la date du jugement en première instance était de 27 mois. »
18 mois de prison pour un ex- »dircom » de Versailles condamné pour harcèlement sexuel
La loi d’août 2012 semble avoir eu peu d’effet : le directeur des affaires criminelles et des grâces, entendu par la commission des Lois, a « constaté que le nombre de plaintes et de condamnations n’avait pas augmenté depuis 2012. Ainsi en 2014, si 1.048 plaintes ont été déposées pour des faits de harcèlement sexuel, seules 65 condamnations ont été prononcées, 50% des poursuites ayant donné lieu, par ailleurs, à des procédures alternatives (rappel à la loi, composition pénale…). Seules 30 à 40% de ce type d’affaires font généralement l’objet de poursuites. »
6,2 % des plaintes aboutissent à une condamnation.
« Cet écart est encore plus flagrant avec le nombre potentiel de victimes de harcèlement, une femme active sur cinq déclarant avoir une fois été confrontée à de genre de comportement au cours de leur carrière », notaient les députés en citant une étude de l’Ifop de 2014.
T.N.
http://www.francetvinfo.fr/culture/cinema/affaire-harvey-weinstein/balancetonporc-denoncer-un-harcelement-sexuel-sur-un-reseau-social-avec-un-hashtag-ce-n-est-pas-du-tout-l-endroit_2422691.html
#balancetonporc : « Dénoncer un harcèlement sexuel sur un réseau social avec un hashtag, ce n’est pas du tout l’endroit »
Christophe Noël, avocat spécialiste du droit du travail, alerte contre les risques auxquels s’exposent les victimes qui dénoncent une situation de harcèlement sexuel sur Twitter : les personnes qu’elles visent peuvent porter plainte « diffamation » ou « injure ».
Mis à jour le 16/10/2017 | 20:22
publié le 16/10/2017 | 20:22
« Balance ton porc. » Depuis que cette injonction a été lancée sur Twitter sous la forme d’un hashtag, vendredi 13 octobre, dans la foulée de l’affaire Harvey Weinstein, des centaines de femmes ont relaté dans des tweets
le harcèlement voire les agressions sexuelles dont elles ont été
victimes. Pour la journaliste Sandra Muller à l’origine de cette
initiative, c’est une manière de « crever l’abcès ».publié le 16/10/2017 | 20:22
Ces publications contribuent à « la libération de la parole des femmes » et représente une »première étape avant l’intervention de la justice », abonde Céline Piques, porte-parole de l’association Osez le féminisme. Mais Christophe Noël, avocat spécialiste du droit du travail, prévient : « Quand on veut dénoncer une situation de harcèlement sexuel, il ne faut pas s’y prendre de cette façon-là. »
Franceinfo : Ces tweets n’exposent-ils pas à des attaques en diffamation ?
Christophe Noël : On est en plein dedans. Dénoncer un harcèlement sexuel sur un réseau social avec un hashtag, ce n’est pas du tout l’endroit. C’est une caisse de résonance phénoménale et c’est la porte ouverte à toutes sortes d’excès et de diffamations. Le problème, c’est qu’il y a à la fois du vrai et du faux et que tout se mélange. Il n’y a aucun moyen de contrôler ce qui est dit sur ce réseau social. On va sans doute retrouver des gens qui, par vengeance, vont calomnier des collègues de travail avec lesquels ils ne s’entendent pas.
Ce n’est pas bon : ça peut se retourner contre les victimes qui dénoncent un harcèlement sexuel. Les personnes qu’elles visent peuvent porter plainte pour « diffamation » ou « injure ». Les employeurs pris pour cible peuvent sanctionner leurs salariés. Il ne faut pas accuser à la légère, surtout en public. Quand on veut dénoncer une situation de harcèlement sexuel, il ne faut pas s’y prendre de cette façon-là. Il n’y a pas de publicité à donner à l’affaire. Il y a des moyens d’action sérieux, concrets, qui ne prêtent pas le flanc à la critique ou à la plainte.
Comment s’y prendre pour dénoncer un harceleur sexuel ?
En théorie, il y a plein de moyens. On peut porter plainte auprès des policiers ou des gendarmes, on peut aller voir la médecine ou l’inspection du travail, on peut dénoncer auprès de la direction de l’entreprise, voire le comité d’entreprise qui est là pour protéger la santé des salariés… Mais tout cela s’avère souvent soit théorique parce que les gens ne sont pas formés à répondre à cela, notamment les policiers et les gendarmes qui ne maîtrisent absolument pas ce délit la plupart du temps. La réponse donnée aux femmes qui se plaignent de ça est à 95% : « Mais madame, allez devant les prud’hommes. » L’inspection et la médecine du travail doivent constater quelque chose qui est souvent caché. Souvent, il n’y a pas de suites. Quant à dénoncer ces situations auprès de la direction de l’entreprise, la plupart des gens travaillent dans des PME et le harceleur est souvent le chef d’entreprise lui-même.
La meilleure façon de faire, c’est d’écrire au harceleur lui-même. Envoyer un petit mail, par exemple. A chaque fois qu’on subit un acte, un propos, un comportement pas tolérable, on l’écrit. « Ta remarque sur mon décolleté aujourd’hui, ça n’a pas sa place sur le lieu de travail », par exemple. Ça a un effet. D’abord, ça peut parfois résoudre le problème, même si c’est rare. Mais surtout, ça permet à la victime d’établir la situation. C’est un indice pour le procès futur qui va permettre de présumer la situation de harcèlement, parce que l’auteur du harcèlement va parfois répondre : « Tu le prends mal… C’est une plaisanterie grivoise… »
Il faut prendre les devants, sortir de son rôle de victime et dénoncer la situation le plus vite possible directement auprès du harceleur. C’est fondamental pour la suite, parce que souvent on se heurte à un problème de preuve. Le harcèlement, c’est souvent quelque chose de caché, de ténu, d’insidieux, qui ne se fait pas en public devant témoins et qui vise des personnes fragiles.
Cette initiative ne permet-elle pas surtout d’inciter les victimes à agir ?
Libérer la parole, c’est très bien. Le grand mérite des affaires comme celle d’Harvey Weinstein, c’est qu’elles sont des caricatures. Ces cas-là n’existent pas dans la vraie vie. On n’a pas de monstres pareils dans le monde du travail. Ce sont des cas moins extrêmes. Mais au moins elles ont un mérite : elles informent les victimes et leur permettent de prendre conscience qu’elles ont des droits, qu’elles peuvent agir.
Car il y a un gros défaut d’information des victimes, mais aussi de prise en charge par la justice. Les services de police et de gendarmerie ne sont pas formés à cela ou ils comprennent et maîtrisent assez mal ce délit. Sur le plan pénal, il faudrait faciliter l’action. La plupart du temps, ça ne débouche pas : les plaintes déposées en gendarmerie ou au commissariat sont classées sans suite. Sur le plan civil, la définition du harcèlement est claire et il y a un aménagement de la preuve qui aide la victime. Sur l’action aux prud’hommes, le Défenseur des droits n’est pas assez mis en avant. Il peut s’associer à l’action des victimes.
Ce n’est pas si compliqué d’agir, de dénoncer une situation de harcèlement sexuel. Il y a des moyens d’action. Les victimes peuvent saisir le Défenseur des droits. Il a un rôle fondamental dans la lutte contre le harcèlement au travail. Il a un pouvoir d’enquête, d’investigation, il pourra aussi vous conseiller utilement. En plus, c’est gratuit. Ce serait dommage de s’en priver. C’est un interlocuteur fiable et sérieux.
Vous pouvez saisir un avocat pour agir en justice. Et il n’y a pas que l’action au pénal, qui est compliquée, parce qu’il faut apporter la culpabilité de la personne devant le tribunal, il faut une preuve directe de la culpabilité de la personne. Devant un conseil de prud’hommes, la preuve est facilitée. On ne vous demande pas d’apporter la preuve, mais des éléments permettant de présumer un harcèlement sexuel. C’est beaucoup plus facile d’engager des poursuites. Et lorsque vous agissez pour dénoncer un harcèlement sexuel, vous ne pouvez pas être sanctionné pour ça. La victime n’a rien à perdre à agir. Et c’est libérateur.
http://www.rtl.fr/actu/societe-faits-divers/que-risque-t-on-en-denoncant-des-noms-sur-internet-7790546073
#BalanceTonPorc : que risque-t-on en dénonçant sur internet ?
La parole se libère concernant le harcèlement sexuel via les réseaux sociaux. Mais peut-on dénoncer quelqu’un sur internet sans de possibles conséquences juridiques ?
publié le 16/10/2017 à 20:03
Diffamations, injures, dénonciations calomnieuses… S’exprimer sur les réseaux sociaux ne met pas à l’abris de poursuites judiciaires. La loi stipule que la personne dénoncée peut se défendre juridiquement si elle est nommément citée ou reconnaissable. Si c’est le cas, elle peut alors attaquer l’auteur du message, elle a trois mois pour le faire.
Twitter ne risque rien, mais les services juridiques du réseau social ont l’obligation de transmettre l’identité et les coordonnées de l’auteur, même si ce dernier utilise un pseudonyme. Personne n’est anonyme sur Twitter. Et si une personne retwitte, republie, le message incriminé, elle peut aussi être poursuivie. Tout comme l’accusateur principal elle risque jusqu’à 12.000 euros d’amende. Le lundi 16 octobre dans la soirée, le parquet de Paris n’avait pas encore été informé de plaintes à ce sujet.
L’affaire Weinstein a libéré la parole de nombreuses femmes qui racontent via le hashtag #BalanceTonPorc des cas de harcèlement de la vie quotidienne. Lancé par la journaliste Sandra Muller, le mouvement prend de plus en plus d’ampleur. Elle avait écrit sur Twitter, le vendredi 13 octobre : « #BalanceTonPorc : toi aussi raconte, en donnant le nom et les détails d’un harcèlement sexuel que tu as connu dans ton boulot. Je vous attends ».
"Balance to porc", c'est bien ! Non, j'aime bien ! C'est très bien trouvé d'abord, et puis y en a marre quoi de subir le harcèlement, les violences, des hommes, trop sûrs d'eux-mêmes. Non, mais ça dit bien ce qu'il en est. Quand est-ce que les femmes ne seront plus victimes ? C'est bien, mais j'aime bien aussi quand les choses se passent comme dans le roman de Ayn Rand," La source vive" entre la page 202 et la page 211, entre Dominique Francon et Howard Roark. Non mais la vie, parfois , n'est pas ce qu'on a prévu, pensé, voulu.
RépondreSupprimerOn se connaît ?
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