Attention, les gars, l’un devient fou à cause d’un
moustique et l’autre finit traqué comme le bandit qu’il est, puis
supplicié jusqu’à la fin du monde…
https://fr.wikipedia.org/wiki/Nimrod
Nimrud ou Nimrod, Nemrod (en arabe نمرود du verbe tamarada, et qui signifie « se rebeller », en hébreu נִמְרוֹד du verbe maradh, qui dérive du verbe mered, qui signifie également « se rebeller ») est un personnage biblique du livre de la Genèse. Le nom de Nimrod peut signifier également « celui qui a dompté le tigre », en partant de la signification arabe de Nimr, « tigre » et Rawad, « dompter ».
Dans la Genèse, Nimrod est présenté comme un fils de Koush1, lui-même fils aîné de Cham et petit-fils de Noé. Nimrod est le premier héros sur la terre, et le premier roi après le Déluge. Il est décrit comme un « chasseur héroïque devant Dieu »2. La ville de Babel, au pays de Shinar, est une capitale de son royaume. En Assyrie, Nimrod a fondé Ninive, Kalkhu et Résen.
Le titre de « chasseur devant Dieu », donné à Nimrod, est peut-être péjoratif. En effet, le mot hébreu liphné, « à la face de », peut signifier « contre » ou « en opposition avec ». Bien que, dans ce cas, certains spécialistes prêtent à la préposition hébraïque le sens favorable, « en face de », les Targoumim juifs, ainsi que les Antiquités juives de l’historien Flavius Josèphe, mais aussi le contexte du chapitre 10 de la Genèse lui-même laissent entendre que Nimrud était un puissant chasseur qui provoquait Dieu.
Selon les traditions juive et chrétienne, Nimrod, le « roi-chasseur » régnant sur les descendants de Noé, eut l’idée de construire à Babel (Babylone) une tour assez haute pour que son sommet atteigne le ciel, et rassemblant tous les hommes en opposition avec l’ordre Divin donné à Noé et à ses fils de remplir la terre (Genèse 9:1).[réf. nécessaire]
Nimrod était le fils-époux de Sémiramis[réf. nécessaire], la déification et le culte voué à ce couple incestueux sont traces de la naissance du mythe de la Mère et de l’Enfant commun à de très nombreuses religions.
Nimrod meurt d’une façon humiliante. Un moustique s’est introduit dans son nez, provoquant d’atroces migraines[réf. nécessaire]. Il demande à tous les passants de lui donner une tape sur le crâne dans l’espoir de faire tomber le moustique. C’est ainsi que celui qui se prenait pour un Dieu meurt victime d’un moustique. Dans le Talmud, la mort du « méchant Titus » qui a détruit le Temple de Jérusalem est décrite par un midrash identique. Selon les sources juives, Nimrod a été tué après avoir été provoqué en duel par Esaü, frère de Jacob[réf. nécessaire].
L’opinion juive traditionnelle considère que la construction de Babel et de la tour de Babel débuta sous sa direction. Josèphe écrivit : « [Nimrud] peu à peu, transforme l’état de choses en une tyrannie. Il estimait que le seul moyen de détacher les hommes de la crainte de Dieu, c’était qu’ils s’en remissent toujours à sa propre puissance. Il promet de les défendre contre une seconde punition de Dieu qui veut inonder la terre : il construira une tour assez haute pour que les eaux ne puissent s’élever jusqu’à elle et il vengera même la mort de leurs pères. Le peuple était tout disposé à suivre les avis de [Nimrod], considérant l’obéissance à Dieu comme une servitude ; ils se mirent à édifier la tour […] ; elle s’éleva plus vite qu’on eût supposé. » — Antiquités judaïques, I, 114, 115 (IV, 2, 3).
Archéologiquement parlant, la Tour de Babel a été restaurée par Nabuchodonosor au VIe siècle avant notre ère, plus de 1 000 années après l’existence de Nimrod selon la Bible. [réf. nécessaire]
Étant un des plus anciens rois d’Assyrie, puissant chasseur, inaugurateur des guerres, il fut aussi un des premiers à regrouper les hommes en tribus et à construire des cités (Babylone et Ninive sont les plus importantes)[réf. nécessaire].
Nimrod appartient également au domaine légendaire arabe et persan[réf. nécessaire].
Selon Alexandre Hislop, pasteur protestant du XIXe siècle, après la mort de Nimrod, les Babyloniens se sentirent poussés à l’honorer grandement en tant que fondateur, bâtisseur et premier roi de leur ville, et comme organisateur de l’Empire babylonien initial. D’après la tradition, Nimrod mourut de mort violente. Puisque le dieu Mardouk (Merodak) était tenu pour le fondateur de Babylone, Hislop a émis l’hypothèse que Mardouk représente Nimrod déifié. De même, il en rapproche la figure des divinités méditerranéennes et orientales Bacchus-Dionysos, voire Cupidon et Mithra archétypes antiques de l’Enfant Divin à la mort tragique.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Loki
Loki (aussi appelé Loptr et Hveðrungr) est le dieu de la discorde dans la mythologie nordique. Il est le fils du géant Farbauti et de Laufey. Loki est le père de plusieurs monstres ; le serpent Jörmungand, le loup Fenrir, et la déesse du monde des morts Hel. Il est également le parent du cheval d’Odin à huit jambes Sleipnir. Malgré ses origines, il est accueilli dans le panthéon divin des Ases par Odin.
Loki est capable de métamorphose, et il est aussi impulsif et irresponsable que malin et rusé. Les Ases ont souvent recours à lui pour régler des problèmes, alors que bien souvent c’est Loki lui-même qui en est la cause. De nature fondamentalement négative et traître, sa jalousie l’amène à causer la mort du dieu Baldr. Furieux, les Ases le punissent en l’attachant avec les entrailles d’un de ses fils sous un serpent dont le venin goutte sur son visage. Il en sera ainsi jusqu’à la fin prophétique du monde, le Ragnarök, où Loki se libèrera et mènera les géants à l’assaut contre les dieux et les hommes. Loki et son dieu opposé, Heimdall, s’entretueront pendant la bataille.
La nature changeante et ambiguë de Loki est sujette à débats chez les spécialistes quant à son rôle dans le panthéon divin, et il a été comparé à divers personnages d’autres mythologies. Loki est un dieu récurrent et célèbre qui a survécu dans le folklore moderne d’Europe du Nord, et son personnage est référencé et source d’inspiration dans de nombreuses œuvres de la culture moderne.
L’étymologie du nom « Loki » est discutée. Elle pourrait être apparentée au vieux norrois lúka, signifiant « proche »1. Une autre origine possible serait le verbe du germanique commun *lukijan, désignant l’action de fermer un anneau ou, par extension, de voyager par des chemins sinueux. Ce dernier sens pourrait être adapté pour le nom d’un dieu escroc[réf. nécessaire]. La Fibule de Nordendorf datée du VIIe siècle porte une inscription runique de dieux germaniques dont Logaþore, proche des termes du vieil anglais logþor ou logþer qui signifient « malicieux » ce qui correspond à la nature de Loki. S’appuyant sur ces éléments, le linguiste Jean Haudry avance que le nom Loki serait une hypocoristique de Logaþore, qu’il faudrait interpréter comme « celui qui dépasse la flamme »2, mais cette interprétation n’est pas entièrement acceptée3.
Plusieurs sources primaires désignent Loki sous le nom de LoptrNote 2. En vieux norrois loptr signifie « air »4 ou « vent »5,6.
Loki est également nommé HveðrungrNote 3 dont l’étymologie est incertaine. Il signifie peut être « hurleur »7 ou « écumant »8. Ce nom est également rapproché à hvida qui signifie « coup de vent », associant Loki au vent immatériel[réf. nécessaire].
Le kenning (au pluriel, kenningar) est une figure de style propre à la poésie scandinave qui consiste à remplacer un mot, ou le nom d’un personnage ou d’une créature par une périphrase. Le chapitre 16 de la partie Skáldskaparmál de l’Edda en prose de Snorri Sturluson révèle les kenningar qui peuvent désigner Loki et qui font référence à sa famille, sa nature ou aux mythes qui lui sont associés ;
Le chapitre 33 du Gylfaginning propose les kenningar « calomniateur des Ases », « initiateur des tromperies », « honte de tous les dieux et de tous les hommes ». On lit également « père du Loup », « artisan de malheur », « corneille du mal » et « fils de Laufey » dans Lokasenna 10, 41, 43, 52. « Fils de Laufey » apparaît également dans Þrymskviða 18 et 20. Loki est appelé « frère de Býleist » dans Völuspá 51 et Hyndluljóð 40. La strophe 7 du poème scaldique Haustlǫng désigne Loki par le kenning « charge des bras de Sigyn ».
Parallèlement, un kenning pour le dieu Heimdall est « ennemi de Loki » d’après le chapitre 8 du Skaldskaparmal10. « Fils/fille de Hveðrungr » sont des kenningar servant à désigner respectivement Fenrir et Hel dans Völuspá 55 et Ynglingatal 327.
Loki est le fils du géant Fárbauti et de LaufeyNote 5. Ses deux frères sont Býleist et Helblindi. Les sources primaires ne mentionnent ces personnages qu’en raison de leur parenté à Loki ; autrement nous ne disposons d’aucune information sur eux. D’après le poème eddique Lokasenna 9, le dieu Odin et Loki ont fait un pacte de sang ce qui a permis de l’intégrer dans le panthéon des Ases.
Loki est le parent de plusieurs créatures spectaculaires. Métamorphosé en jument, il engendra avec l’étalon Svadilfari le cheval à huit jambes Sleipnir, qui devient le monture d’Odin. Le chapitre 34 de la Gylfaginning de l’Edda de Snorri raconte que Loki a procréé trois enfants monstrueux avec la géante Angrboda : le loup Fenrir, le serpent de Midgard Jörmungand et Hel, qui sont élevés à Jötunheim. Comme les prophéties racontent que ceux-ci causeront le malheur des dieux, ces derniers décident de s’en débarrasser. Odin jette alors Jörmungand dans la mer et envoie Hel dans Niflheim, le monde des morts, dont elle devient la gardienne. Le loup Fenrir est quant à lui enchaîné11. Angrboda est également mentionnée comme mère de Fenrir dans le poème eddique Hyndluljóð 40.
Hyndluljóð évoque à la strophe 41 un mythe énigmatique où Loki mange le cœur brûlé d’une femme sorcière ou géante, et en tombe enceinte d’un monstre9,12. Le poème eddique Lokasenna évoque aux strophes 23 et 33 la métamorphose de Loki en femme féconde qui aurait enfanté ; nous ignorons les mythes auxquels ces strophes font référence13, mais la seconde pourrait être une référence à Sleipnir14. Lokasenna 40 mentionne également que Loki aurait eu un fils de la femme du dieu Týr, toutefois aucun mythe préservé ne le confirme, et nous ne connaissons pas de femme pour Týr15.
Loki est cependant marié à la déesse Asyne Sigyn qui selon l’Edda de Snorri lui donna un fils « Nari ou Narfi ». Loki a également un autre fils, Vali, dont la mère n’est pas mentionnée. Ceci est contradictoire avec l’épilogue en prose de la Lokasenna où Nari et Narfi sont deux fils distincts de Loki.
Dans la partie Gylfaginning de l’Edda de Snorri, Loki est décrit au chapitre 33 comme suit :
Loki est compté parmi les Ases bien qu’il n’ait aucun lien de parenté avec eux ; il a été accepté dans la famille par Odin. Il apparaît dans de nombreux mythes comme compagnon de route pour Odin et pour Thor. Il sert en quelque sorte de bouffon pour les dieux, qui l’utilisent comme messager et semblent le considérer comme un inférieur. Malgré son ingéniosité, sa nature impulsive conduit à ce qu’il soit la cause de problèmes et de malheurs, qu’il est contraint de réparer sous la menace des autres dieux, ce qu’il réussit grâce à sa ruse et ses tromperies. Loki est un observateur curieux et détient le don de métamorphose, changeant sa forme parfois en saumon, en cheval, en oiseau, en phoque ou encore en mouche. Il peut également changer de sexe, se métamorphosant en jument ou en femme. Loki est foncièrement amoral, traître, injurieux et menteur, des qualités qu’il utilise pour sauver sa peau ou simplement par plaisir. Il s’amuse de farces perverses qui le mettent souvent dans des situations délicates, et il se révèle mauvais joueur. Finalement, sa nature négative et haineuse culmine dans sa part dans le meurtre gratuit du dieu Baldr. Il ne se soucie pas des répercussions de ses actes, et finit traqué comme un bandit; il est finalement puni jusqu’à la fin du monde prophétique, le Ragnarök, où, libéré, il mènera les géants et forces du mal contre les dieux17.
Les récits nordiques proviennent de sources éparses avec peu d’informations chronologiques, ainsi les différents mythes mentionnés dans cette section n’ont pas volonté à être présentés de manière chronologique, excepté les mythes qui possèdent un repère de temps indéniable, comme la première rencontre entre Loki et Odin, forcément au début, et le Ragnarök à la fin. L’organisation des mythes présentée ci-dessous s’appuie néanmoins en partie sur la chronologie théorique proposée par le spécialiste Viktor Rydberg dans Investigations sur la Mythologie germanique, Volume II (1889)18.
Loki est le fils des géants Farbauti et Laufey, toutefois il fait partie du panthéon des Ases. Dans le poème eddique Lokasenna, à la strophe 9, Loki rappelle brièvement (et énigmatiquement) les circonstances de son adoption par les Ases, lorsqu’Odin et lui se sont liés par une fraternité sacrée, le rite du fóstbroedralag, un rite que se retrouve également dans le cycle héroïque de Sigurd19.
Au chapitre 35Note 6 du Skáldskaparmál de l’Edda de Snorri le farceur Loki coupe la chevelure de la déesse Sif, épouse de Thor, pendant son sommeil. Lorsque Thor menace Loki de le broyer, ce dernier propose de récupérer chez les nains une chevelure d’or. Alors les nains fils d’Ivaldi fabriquent pour les dieux la chevelure de Sif ainsi que le bateau Skidbladnir pour Freyr et la lance d’Odin, Gungnir. Ensuite, Loki parie sa tête avec les nains Brokk et son frère Eitri qu’ils ne pourraient fabriquer des objets aussi précieux. À la forge, Eitri demande à Brokk d’actionner le soufflet sans s’arrêter avant qu’il n’ait retiré l’objet qu’il a fabriqué. Afin de gagner son pari, Loki métamorphosé en mouche vient piquer Brokk pour le distraire mais ce dernier continue à actionner le soufflet jusqu’au bout, et le forgeron retire du fourneau le verrat aux soies d’or Gullinbursti pour Freyr. Pour le second objet, Eitri place de l’or dans le fourneau et Brokk ne cède pas aux piqures de Loki avant qu’Eitri ne retire du fourneau un anneau d’or appelé Draupnir, pour Odin. Ensuite Eitri place du fer dans le fourneau en exigeant à Brokk de ne pas arrêter d’actionner le soufflet sinon tout serait gâché. Mais Loki en mouche le pique entre les paupières jusqu’au sang, alors Brokk s’arrête un court instant, et il en a fallu de peu pour que tout soit gâché. Ils sortent du fourneau le marteau Mjöllnir pour Thor, mais à cause de Loki le manche du marteau est trop court. Brokk et Loki présentent les objets aux Ases pour qu’ils décident lesquels sont les plus précieux. Les Ases décident que le marteau est la plus grande protection possible contre les géants du givre. Ainsi le nain a gagné le pari pour la tête de Loki. Ce dernier essaye alors de s’échapper grâce à ses chaussures qui lui permettent de courir à travers les airs et la mer, mais Thor le rattrape pour qu’il honore son engagement. Afin de sauver sa peau, Loki déclare qu’il avait mis sa tête en gage et non pas son cou. Finalement, le nain Brokk se contente de lui coudre les lèvres21.
Les chapitres 44 à 47 de la Gylfaginning racontent la légende de Thor, Loki et Thjálfi chez le roi géant Útgarða-Loki. Au chapitre 44, Thor et Loki sont reçus par un paysan pour la nuit. Les boucs de Thor servent de repas mais Thjálfi, le fils du paysan, casse un os pour récupérer la moelle. Le lendemain matin, Thor bénit les restes des boucs qui ressuscitent, mais l’un d’entre eux boite. Furieux il accuse les paysans d’avoir cassé un os. Terrifiés ils acceptent de lui donner en compensation leurs deux enfants comme servants, Thjálfi et Roskva. Au chapitre 45, les quatre protagonistes marchent vers Jötunheim, et se reposent une nuit dans une grande maison. Ils découvrent le lendemain matin que la maison était en fait le gant du géant Skrymir, qui propose de les accompagner. L’arrogance et les moqueries de Skrymir sur leur petite taille énervent Thor à plusieurs reprises, mais ses grands coups de marteau font tellement peu d’effet contre le géant que ce dernier semble à peine les remarquer, demandant par exemple si un gland lui est tombé sur la tête. Skrymir leur indique ensuite la route pour atteindre le fort d’Utgard où réside le géant Útgarða-Loki et il conseille les compagnons de bien s’y tenir car les géants sont très puissants. Au chapitre 46 les compagnons arrivent à l’immense fort d’Utgard et se présentent au roi Útgarða-Loki qui en se moquant de leur petite taille leur demande s’ils ont quelconque talent supérieur aux autres hommes. Loki répond qu’il mange plus vite qu’aucun autre. Il se mesure alors à un certain Logi qui le défait au jeu puisque Loki n’a mangé que la viande alors que Logi a mangé les os également. Thjálfi affirme qu’il est plus rapide que tous les hommes, mais il perd sa course contre un garçonnet nommé Hugi. Thor déclare qu’il est bon buveur, mais il peine à baisser le niveau d’une corne à boire après trois traits. Riant de sa faiblesse, Útgarða-Loki propose à Thor de tenter de soulever son chat, mais le dieu parvient difficilement à soulever une de ses pattes. Furieux des moqueries du roi, Thor demande que quelqu’un se mesure à lui en lutte. Le roi le fait alors combattre sa vieille nourrice Elli qui réussit à mettre Thor sur un genou. Au chapitre 47 on lit que le lendemain matin le roi les accompagne à la sortie du royaume et demande à Thor s’il avait déjà rencontré d’adversaire plus puissant, ce à quoi Thor répond qu’il a effectivement subit un grand déshonneur. Alors Útgarða-Loki lui explique les illusions visuelles qu’il leur ont fait subir. Il avoue qu’il était le géant Skrymir et que ses coups de marteau l’ont en fait raté et ont créé trois vallées profondes. Loki s’était battu contre le feu sauvage, et Thjálfi contre son esprit. La corne que Thor but était reliée à l’océan et le dieu but tellement qu’il a créé les marées, le chat était en fait le serpent de Midgard que Thor a quand même réussit à soulever, et enfin la vieille qu’il combattit était en fait une personnification de la vieillesse. Tous les témoins furent impressionnés et terrifiés par les prouesses des trois compagnons, qui excédaient largement leurs attentes. Furieux Thor brandit son marteau pour frapper le géant mais celui-ci disparait ainsi que son fort22.
Le poème eddique Hymiskviða, à la strophe 37, attribue à Loki la responsabilité de la boiterie du bouc, mais la strophe suivante mentionne la compensation des deux enfants d’un géant, ce qui est plus en accord avec le récit du Gylfaginning23. Aux strophes 60 et 62 du poème eddique Lokasenna, Loki se moque de la rencontre de Thor avec Skrymir24.
Le chapitre 18Note 7 du Skáldskaparmál raconte qu’un jour, Loki s’amuse à voler sous la forme de faucon qui appartient à Frigg. Il vole par curiosité dans la demeure du géant Geirröd et se pose sur une lucarne pour observer la halle. Voyant l’oiseau, Geirröd ordonne qu’on lui amène. Loki reste posé s’amusant des difficultés du serviteur à grimper jusqu’à lui, mais lorsqu’il décide de s’envoler il réalise que ses pattes restent collées. Loki est capturé et Geirröd soupçonne sa véritable nature d’humain, mais le dieu ne l’avouant pas le géant l’enferme dans un coffre pendant trois mois jusqu’à ce que Loki lui révèle son identité et pour racheter sa vie il lui jure d’attirer Thor dans son domaine mais sans son marteau Mjöllnir ni ses autres attributs puissants. Lorsque Thor et Loki arrivent dans la halle de Geirröd en tant qu’invités, les géants tentent de tuer Thor mais ce dernier parvient malgré tout à en sortir victorieux, massacrant Geirröd et ses deux filles25.
L’expédition de Thor chez Geirröd est également raconté dans le poème scaldique Þórsdrápa qui est vraisemblablement la source de Snorri Sturluson qui en cite des strophes. Toutefois dans le poème, Thor visite Geirröd accompagné de son valet Thjálfi et non de Loki. Loki est tout de même indiqué comme l’instigateur de l’expédition et est qualifié de « grand menteur » dès la première strophe26.
Le mythe burlesque du vol du marteau de Thor est raconté dans le poème eddique Þrymskviða. Thor se réveille et constate la disparition de son marteau Mjöllnir. Loki s’envole alors le chercher dans le monde des géants, et rencontre le géant Þrymr qui déclare l’avoir pris, et ne le rendrait qu’en échange de la main de la déesse Freyja. Loki retourne en informer Thor, et Freyja furieuse refuse de se donner au géant. Le dieu Heimdall propose de travestir Thor en mariée pour tromper le géant, ce qu’il fait alors non sans réticences. Loki l’accompagne déguisé en servante. Les deux dieux sont accueillis à un banquet du géant qui est trompé par le subterfuge. Le géant remarque quelques éléments étranges dans la façon d’agir de son épouse ; elle mange et boit beaucoup plus que l’on s’attendrait. Loki déguisé explique que c’est parce qu’elle a voyagé huit nuits de suite sans manger dans son empressement de prendre sa main. Þrymr demande ensuite pourquoi elle a des yeux aussi enragés. Loki répond que c’est parce qu’elle n’a pas dormi pendant huit nuits dans son empressement pour prendre sa main. Þrymr ordonne qu’on lui apporte le marteau pour consacrer la fiancée, alors Thor s’en empare, jette son déguisement et tue Þrymr avant de massacrer toute sa famille27.
Si le thème du poème émane sans doute d’un mythe authentique, cette version rédigée au XIIIe siècle, sans doute par Snorri Sturluson, trahit son christianisme par son ton évidemment satirique, amusé de la goinfrerie et de la brutalité de Thor, sans toutefois être méprisant28.
Au chapitre 42 de la Gylfaginning, un maître-bâtisseur se présente aux dieux et propose de leur construire une forteresse pour Ásgard en seulement trois semestres, ce qui les protégera des géants. Il demande alors comme payement la déesse Freyja, le Soleil et la Lune à condition qu’il réussisse son exploit. Les dieux acceptent, pensant qu’il ne réussirait pas. Mais l’étranger, avec l’aide de son étalon Svadilfari, entame la construction à une vitesse impressionnante. Inquiets qu’il réussisse sa prouesse, les dieux tiennent conseil et forcent Loki à empêcher l’étranger de finir son travail à temps. Loki se transforme en jument en rut pour distraire le cheval de l’étranger l’empêchant par ce biais d’accomplir à temps son ouvrage. Pris de fureur, le maître-bâtisseur révèle sa véritable identité de géant. Les dieux invoquent Thor qui lui fracasse le crâne avec son marteau. Loki fut néanmoins fécondé par l’étalon, et engendre le cheval à huit pattes Sleipnir, qui devient la monture d’Odin29.
Le premier chapitre de la partie Skáldskaparmál de l’Edda de Snorri raconte l’enlèvement d’Idunn. Odin, Loki et Hœnir voyagent loin de chez eux et capturent un bœuf pour le manger, mais étrangement la viande ne cuit pas. Un aigle perché sur un chêne au-dessus d’eux leur explique qu’il en est la cause et propose de laisser se faire la cuisson si les dieux lui permettent d’en manger tout son soûl. Ils acceptent, et le bœuf cuit, l’aigle emporte une grande partie de la viande. Alors Loki en colère frappe l’aigle avec une perche mais la perche reste accrochée à ses mains et au dos de l’oiseau qui s’envole. Saisi par la douleur, Loki supplie l’aigle de le relâcher, et ce dernier accepte à la seule condition que Loki attire la déesse Idunn et ses pommes hors d’Ásgard. Libéré, Loki emmène alors Idunn dans un bois hors d’Ásgard, sous le prétexte qu’il a trouvé d’autres pommes remarquables. Il lui recommande d’emporter ses propres pommes pour les comparer. Le géant Thjazi sous la forme d’un aigle s’empare d’Idunn et l’emporte chez lui à Thrymheim. Privés de ses pommes de jouvence, les Ases vieillissent rapidement. Ils tiennent conseil et comprennent qu’elle a été vue pour la dernière fois sortant d’Ásgard avec Loki. Ils le menacent alors des pires supplices s’il ne retrouve pas Idunn. Apeuré, Loki promet de la ramener et réclame à Freyja son plumage de faucon. Loki s’envole alors vers le Nord à Jötunheim pour la demeure de Thjazi où il retrouve Idunn seule, Thjazi étant sorti. Loki la transforme en noix afin de la porter dans ses serres et il la ramène vers Ásgard. Lorsque Thjazi rentre et constate la disparition d’Idunn, il prend sa forme d’aigle et se lance à leur poursuite. Les Ases voient alors Loki arriver vers eux avec la noix, poursuivi par un aigle, et comprennent la situation. Dès que Loki franchit l’enceinte d’Ásgard, les Ases enflamment les copeaux qui brûlent les plumes de l’aigle. Il tuent ensuite le géant au sol. Alors, Skadi, la fille du géant, marche vers Ásgard pour venger son père. Les Ases lui proposent comme compensation de choisir n’importe quel mari d’entre eux mais en ne regardant que leurs pieds. Elle choisit alors le dieu Njörd bien qu’elle ait espéré tomber sur Baldr. L’autre clause était de parvenir à la faire rire. Loki attache une corde à la barbe d’une chèvre et l’autre bout à ses propres bourses, et chacun tire tour à tour, ce qui fait rire la géante30.
Les strophes 2 à 13 du poème scaldique Haustlǫng racontent le même mythe en s’arrêtant à la mort de Thjazi, mais ne précisent pas la métamorphose d’Idunn en noix31. Snorri Sturluson a utilisé ce poème comme source pour son récit, et il le cite dans son œuvre. À la strophe 50 du poème eddique Lokasenna, Loki fait allusion à son rôle dans la mort du géant32.
Dans le poème eddique héroïque Reginsmál, on apprend que Regin élève Sigurd et lui raconte l’histoire de l’or d’Andvari. Ce mythe est également raconté dans la Völsunga saga et au chapitre 39Note 8 du Skáldskaparmál, avec peu de variations. Regin explique qu’Odin, Hoenir et Loki arrivent à une cascade et Loki tue avec une pierre une loutre qui mangeait un saumon. Loki se vante alors de sa double prise. Cette loutre n’est autre que Ótr métamorphosé, le frère de Reginn et de Fafnir, fils de Hreidmarr. Le soir même, les dieux se logent chez Hreidmarr avec leur butin. Hreidmarr et ses fils s’emparent des dieux et demandent en réparation assez d’or pour remplir et recouvrir la peau de la loutre. Loki est envoyé pour récupérer l’or, et il capture le nain Andvari métamorphosé en brochet. Loki exige l’or d’Andvari qui le lui donne. Le nain dissimule tout de même un anneau mais Loki le voit et lui prend, alors Andvari prononce la malédiction sur l’or. Les Ases remplissent ensuite la peau de la loutre et la recouvrent d’or. Hreidmarr voit qu’un poil de moustache dépasse, et donc Odin place l’anneau d’Andvari pour le recouvrir. Loki informe Hreidmarr de la malédiction sur l’or, et annonce la trame du cycle de Sigurd33,34.
Il existe plusieurs allusions au mythe du vol par Loki du collier des Brísingar qui appartient à la déesse Freyja. Dans le poème scaldique Haustlǫng 9, et dans Skáldskaparmál 16, un kenning pour désigner Loki est « voleur du collier des Brísingar ». Le poème scaldique Húsdrápa préservé en partie dans le Skáldskaparmál, mentionne que Loki a volé l’objet précieux à Freyja. Celle-ci demande à Heimdall de le retrouver et ils découvrent que Loki en est le voleur. S’ensuit un combat entre les deux dieux métamorphosés en phoques, où Heimdall triomphe.
Dans le texte évhémériste Sörla þáttr rédigé au XIVe siècle, Freyja est la maîtresse favorite du roi Odin. Elle désire un collier fabriqué par des nains, qui lui donnent à condition qu’elle passe une nuit d’amour avec chacun d’entre eux, ce qu’elle fait. Un certain Loki est au courant du marché scandaleux et en informe Odin qui ordonne de ravir le collier à Freyja. Alors il lui vole métamorphosé en mouche pendant qu’elle dort. Lorsque Freyja réclame le collier à Odin, il lui rend à la seule condition qu’elle provoque une guerre éternelle entre deux rois, ce qu’elle réussit au troisième essai. Cette guerre se termine finalement avec l’avènement du christianisme.
Le chapitre 49 de la Gylfaginning raconte que Baldr, l’un des fils d’Odin, rêve de sa mort prochaine ce qui inquiète les Ases. Sa mère Frigg fait alors jurer à chaque élément de ne jamais faire de mal à son fils. Ainsi les Ases s’amusent à honorer Baldr en lançant vers lui des objets qui conséquemment ne lui font aucun mal. Ceci déplaisant à Loki35, il prend l’apparence d’une femme et obtient l’aveu de Frigg qu’elle n’a pas demandé de serment au gui, tant cette pousse lui paraissait inoffensive. Loki recueille alors le rameau de gui, et incite le dieu aveugle Höd, frère de Baldr, de le lancer contre lui pour se joindre à l’activité. Loki guide le jet de Höd, et le rameau transperce Baldr et le tue devant la stupéfaction des Ases. Le dieu Hermód se porte alors volontaire pour voyager au monde des morts pour demander à la gardienne Hel de leur rendre Baldr. Celle-ci accepte à condition que toutes choses au monde le pleurent. Les Ases envoient donc des messagers à travers les mondes pour leur demander de pleurer la mort de Baldr, mais ils confrontent une géante appelée Thokk, qui est en fait Loki déguisé, qui refuse de le pleurer, empêchant ainsi Baldr de revenir des morts36.
Le poème eddique Baldrs draumar raconte le meurtre de Baldr par Höd, mais le rôle de Loki n’y est pas mentionné. De même, le poème Völuspá aux strophes 31 à 34 évoque ce meurtre sans impliquer Loki, toutefois la strophe 35 mentionne la punition de Loki (cf. infra). Dans le poème eddique Lokasenna, Loki se vante d’avoir causé la mort de Baldr :
Le poème runique norvégien offre un moyen mnémotechnique pour mémoriser les runes, Loki est associé à la rune Berkanan (bouleau) et on lit à la strophe 13 : « Ruse à Loki valut misère »39. Il s’agit peut être d’une référence à son rôle dans le meurtre de Baldr[réf. nécessaire].
Dans le poème eddique Lokasenna, le dieu malin Loki profère des insultes à l’encontre des principaux Ases lors d’un banquet. Le prologue en prose raconte que le géant Ægir tient un banquet pour tous les Ases. Loki est énervé par la louange des domestiques du géant, Eldir et Fimafeng, ainsi il tue le second et se fait chasser du banquet par les Ases. En revenant, Loki croise Eldir et le poème commence à cet instant. Eldir lui informe que les dieux parlent de leurs prouesses et ne parlent pas de Loki en bien. Dès la strophe 3, Loki précise ses intentions pour la suite :
Entré dans la halle qui est devenue silencieuse à son arrivée, Loki exige à boire et Odin lui permet de s’assoir pour le calmer. S’ensuit un échange verbal entre Loki et les principaux dieux, où Loki les insulte et les nargue tour à tour. Beaucoup de mythes sont rappelés dans le poème, et d’autres qui ne nous sont pas parvenus. À la strophe 57, Thor, qui était absent, arrive au banquet et menace Loki, « être abject », de le tuer avec son marteau. Après un bref échange, Loki se résigne à partir car il sait que Thor le frapperait, puis il maudit Ægir. L’épilogue en prose raconte alors la capture et la punition de Loki par les Ases40.
Au chapitre 50 de la Gylfaginning, les dieux, excédés par le meurtre de Baldr, décident de rechercher Loki, qui s’était caché sur une montagne. Il s’y construit une maison dotée de quatre portes, une sur chaque façade, afin de pouvoir surveiller toutes les directions. Le jour, il se transforme parfois en saumon dans les cascades de la rivière Fránangr. Réfléchissant à la manière dont les Ases pourraient l’attraper sous sa forme de poisson, il invente le premier filet de pêche avec des fibres de lin. Il voit alors les Ases s’approcher, il jette le filet au feu avant de bondir dans la rivière. Kvasir entre en premier dans la maison et en voyant les cendres laissés par le filet il comprend son utilité pour pêcher les poissons, ainsi les Ases en fabriquent un à leur tour. Les Ases se divisent en deux groupes et remontent la rivière, finissant ainsi par capturer Loki. Thor attrape Loki par la queue, et depuis les saumons sont minces à l’arrière. Les Ases emmènent Loki dans une caverne, ainsi que ses fils Narfi (ou Nari) et Vali. Ils métamorphosent Vali en loup qui déchire son frère Narfi, et avec les boyaux de ce dernier ils attachent Loki à trois pierres. Skaði place un serpent au-dessus de lui, de manière à ce que le venin coule sur son visage. Sigyn, la femme de Loki, recueille le venin dans une cuvette. Toutefois, lorsqu’elle vide la cuvette pleine, du venin coule sur le visage de Loki ce qui le fait se tordre de douleur et causer les tremblements de terre. Loki restera ainsi jusqu’au Ragnarök41.
L’épilogue du poème eddique Lokasenna raconte en moins de détails le supplice de Loki. Une différence notable avec la Gylfaginning est que dans ce poème les deux fils de Loki sont Nari et Narfi, et Vali n’y est pas mentionné42. À la strophe 49 de ce poème, Skaði annonce à Loki qu’il sera entravé par les entrailles de son fils sur un rocher. Le supplice de Loki est également mentionné par la völva (prophétesse) à la strophe 35 du poème Völuspá, où Sigyn est décrite siégeant à ses côtés :
Le chapitre 51 du Gylfaginning raconte en détail les évènements de la fin du monde prophétique du Ragnarök. Le monde sera ravagé par les guerres et un hiver de trois ans, le Fimbulvetr. Toutes les chaînes se briseront, ainsi le loup Fenrir et Loki seront libérés, et le serpent Jörmungand dévastera les terres. Les géants et Loki accompagné du cortège des morts de Hel combattront les dieux sur la plaine de Vigrid. Presque tous périront. Fenrir engloutira Odin avant d’être tué par Vidar, Jörmungand et Thor s’entretueront, et Loki combattra le dieu Heimdall et ils s’entretueront également. Le géant du feu Surt enflammera le monde, avant qu’il renaisse des flammes45.
Le poème eddique Völuspá raconte également les évènements du Ragnarök, et a servi de source pour Snorri Sturluson. Le poème précise à la strophe 51 que Loki arrivera de l’est sur un bateau46, ce qui contraste avec la Gylfaginning qui mentionne également un bateau, Naglfar, mais c’est le géant Hrym qui le gouvernera45.
La fibule de Nordendorf I est une fibule d’argent de 13 cm découverte en 1843 vers Nordendorf, au sud de l’Allemagne et datée de la première moitié du VIIe siècle. Cette pièce figure une inscription runique qui semble mentionner des noms de dieux47. On lit :
Si wodan et wigiþonar sont vraisemblablement les noms alémaniques des dieux Odin et Thor, logaþore pose problème. Certains spécialistes ont proposé Lódur et Loki, mais aucune conclusion satisfaisante n’a été trouvée48,3.
La croix de Gosforth, retrouvée en Cumbrie (Angleterre), et datée de la première moitié du Xe siècle, présente un mélange d’iconographies chrétienne et païenne. Une image sur la face ouest représente certainement Loki enchaîné et protégé par Sigyn du venin d’un serpent49,50. Cette scène fait écho à une autre représentation de la sculpture, celle du Christ sur sa croix assisté par Marie-Madeleine51. Il s’agit là d’un exemple de syncrétisme entre la religion païenne nordique et le christianisme ; ici des mythes païens ont servi à établir des concepts chrétiens à une population christianisée et certainement versée en légendes nordiques52.
Une croix fragmentée de la fin du Xe siècle, retrouvée à Kirkby Stephen en Cumbrie, porte une figure entravée dotée de cornes et d’une barbe. Ce personnage est parfois pensé représenter Loki53. La pierre, découverte en 1870, est en grès jaune pâle ; elle est aujourd’hui placée à l’entrée de l’église de Kirkby Stephen. Une pierre portant des gravures similaires, découverte à Gainford, dans le nord de l’Angleterre, est abritée à la cathédrale de Durham54.
Au printemps 1950, une pierre plate semi-circulaire portant, gravé un visage moustachu, fut retrouvée sur une plage proche de Snaptun, au Danemark. Les gravures de la pierre, une stéatite de Norvège ou de Suède, ont été datées aux environs de l’an Mil. Le personnage moustachu fut identifié grâce aux cicatrices figurant sur ses lèvres, en référence à un conte du Skáldskaparmál, une section de l’Edda poétique, où les fils d’Ivaldi, des nains, cousent ensemble les lèvres de Loki55.
La pierre de Snaptun est une pierre d’âtre ; le museau du soufflet se plaçait dans le trou situé à l’avant de la pierre, et l’air produit par le soufflet poussait la flamme à travers l’orifice supérieur. La pierre protégeait ainsi le soufflet de la chaleur du feu et d’une exposition directe aux flammes. D’après Hans Jørgen Madsen, la pierre de Snaptun est « la plus belle pierre d’âtre ouvragée connue ». La pierre, qui pourrait suggérer une connexion entre Loki et la forge ou les flammes, est aujourd’hui exposée au musée Moesgård, près d’Århus au Danemark55.
Loki est une divinité complexe qui se laisse difficilement ramener à un seul élément explicatif. Si les philologues du XIXe siècle sont enclins à mettre en avant des explications naturalistes aux nombreuses indications notamment folkloriques d’une divinité du feu, Jan de Vries propose une théorie de « trickster » (de fourbe, d’escroc), puis Georges Dumézil, tout en rappelant les éléments naturalistes, préfère mettre en avant un type psychologique « mal né contestataire ». Pour Rudolf Simek, il s’agit de « la figure la plus complexe, mais aussi la plus négative du panthéon germanique »56. Jean Haudry avance que la mythologie de Loki ne peut être comprise que par la duplicité fondamentale du feu, puis de l’image héritée de la « parole de feu » car la parole elle-même est ambiguë, ce qui explique son rôle de satiriste, puis finalement de messager, d’être en marge qui peut tromper et persifler.
Des spécialistes ont longtemps cherché une fonction pour Loki, et Jacob Grimm en a fait un dieu du feu, ce qui a été repris par plusieurs spécialistes, le feu étant comme Loki ; ambivalent, bénéfique ou destructeur. Cette association est également issue de la proximité linguistique avec le mot logi (« feu »). Mais les mythes n’associent pas particulièrement Loki à un élément. Georges Dumézil note tout de même que le feu est parfois associé à Loki dans les proverbes et expressions qui ont survécu à l’époque moderne. Le vent est également parfois associé à Loki, et un de ses autres noms, Lopt, signifie « air » en vieux norrois57.
Sophus Bugge estime en 1888 que Loki est dérivé de Lucifer (« Luki-fer ») de la mythologie chrétienne, une théorie qui n’est plus acceptée aujourd’hui. En revanche, il n’est pas exclu que Loki ait été assimilé au diable par les populations nordiques christianisées. Le diable est, selon son nom grec, « celui qui divise », et la proximité de Loki avec le feu ne pouvait que favoriser ce rapprochement58.
Rudolf Simek estime que Loki n’a rien à voir avec le feu, ni avec aucun autre élément59.
Dans sa monographie de Loki (1933), Jan de Vries propose une nouvelle théorie qui présente le dieu nordique comme un trickster, un fripon fourbe et parfois dangereux. Georges Dumézil, dans son ouvrage Loki (1948, 1986), développe largement cette interprétation psychologique et sociale, présentant Loki comme un de ces « êtres « en marge », de naissance inférieure, traités en inférieurs, incomplètement adoptés par la société et se détachant eux-mêmes de la société »60. Il avance également que cette figure est une figure héritée de la période commune proto-indo-européenne et trouve des équivalents en termes de personnalité dans le farceur semi-divin Syrdon de la mythologie ossète (et caucasienne en général) et le personnage irlandais Bricriu. En effet, comme Loki, Syrdon est indirectement responsable de la mort d’un personnage héroïque quasi-immortel en poussant un autre à l’acte, et s’est même métamorphosé en femme pour obtenir des informations sur le point faible de sa victime. Bricriu est, lui, un semeur de zizanie. Il établit ainsi un personnage divin de satiriste qui utilise une partie de ses dons « à ruser, à tromper, à intriguer, et aussi […] à persifler, à nuire, à haïr »61.
Dumézil reconnaît, néanmoins, l’importance des « vêtements naturalistes » de Loki, mais préfère les considérer comme symboliques.
Dans son étude de Loki (1988), Jean Haudry affirme qu’il faut reconsidérer la présence du feu, « presque omniprésent dans sa mythologie »62 et amène une nouvelle comparaison avec le dieu du feu indien Agni, dont l’une des désignations est la « qualification des seigneurs »63. Cette qualification est, dès le départ, ambiguë, aussi bien louange que calomnie. La parole, pareille au feu, est caractérisée par sa duplicité fondamentale. Le feu passant constamment du monde des ténèbres à la lumière58, la parole peut être bienfaisante ou dangereuse. Loki, comme Agni, assume également un rôle de messager, d’éclaireur et de compagnon. Haudry reconstruit ainsi une notion héritée de « parole de feu » qui permet une réinterprétation de la mythologie du dieu nordique, tant dans ses aspects naturalistes, que dans le type de mal né contestaire, persifleur, dont l’apparition, dans les sociétés traditionnelles est particulièrement redoutée: la médisance et la satire pouvant avoir des effets destructeurs.
C’est en tant que personnage subversif, qui pousse les dieux au parjure, que Loki joue un rôle décisif dans le Ragnarök, car l’énonciation de la vérité, l’ordre moral, l’ordre social et l’ordre du monde sont homologues64. Il correspond alors au démon indien Kali, celui qui provoque le dernier âge du monde, le Kali Yuga65.
Les auteurs de synthèses comme Régis Boyer ou Rudolf Simek préfèrent mettre en avant la complexité de la divinité. Boyer souligne son aspect « intelligent, mais amoral, aimant à faire le mal pour s’amuser », un « tissu de traits contradictoires »66.
Le mythe de la punition de Loki a également été comparé à ceux du Titan grec Prométhée (un voleur du feu), du géant Typhon et du géant du Caucase Amiran59.
Axel Olrik a publié deux articles dans la revue Danske Studier, l’un en 1908 et l’autre en 1909, regroupés sous le même titre de Loki i nyere Folkeoverlevering (« Survivances de Loki dans le folklore moderne »), où il note de nombreux proverbes, expressions et gestes rituels qui se référent à Loki, ainsi que des contes et récits populaires qui le mettent en scène, dans plusieurs pays et régions d’Europe du Nord ; les pays scandinaves, l’Islande, les Îles Féroé, l’Angleterre et les Shetland. Une ballade des Îles Féroé recueillie au XIXe siècle implique également Odin et Hœnir, et son caractère païen était tel qu’il était interdit de la raconter au moment de sa rédaction. La plupart des récits modernes mettent en scène un Loki malin voir cruel, parfois étourdi. Au XVIIIe siècle en Telemarken (sud de la Norvège), Lokje était un mauvais esprit parfois associé au diable67.
Des expressions incluent au Danemark « porter des lettres de Lokke » (mentir), en Norvège « Lokje bat ses enfants » (lorsqu’un feu pétille fort). Un proverbe islandais est « Loki et Thor marchent longtemps, les orages n’en finissent pas » (Leingi geingr Loki ok Þór, léttir ei hríðum). Certains termes modernes tirent leur étymologie de Loki. En Islande, Lokabrenna désigne la canicule, et Lokasjóðr (« bourse de Loki ») les plantes qu’on appelle ailleurs « monnaie de Judas »67.
En 1898, le clergyman Robt M. Kennley raconte que pendant son enfance en Lincolnshire (Angleterre), il apporta de la quinine a un enfant malade et observa sa grand-mère frapper un à un avec son marteau trois fers de cheval cloués au pied du lit de l’enfant et récitant67 :
C’est un personnage, sous la graphie « Loge », de L’Anneau du Nibelung de Richard Wagner : il est physiquement présent dans L’Or du Rhin, et Wotan l’invoque à la fin de La Walkyrie.
Loki apparaît dans de nombreux romans de fantasy, dont Le masque de Loki (en) (1990) de Roger Zelazny, la trilogie Everworld (1999-2001) de Katherine Alice Applegate, American Gods (2001) de Neil Gaiman, et les séries Amos Daragon (2003-2007) de Bryan Perro et Arielle Queen (2006-) de Michel J. Lévesque
Loki est un personnage Marvel Comics (première apparition en 1949 dans Venus, no 6)68. C’est également le nom du héros du manga et de l’animé Matantei Loki Ragnarok (en) et de Fairy Tail. Il apparait aussi dans Thorgal dans les tomes 29 à 32. Il apparait également dans la bande-dessinée Mythos.
Dans la série de livres «Gaïg», de Dynah Psyché, Loki est un Pookah, c’est-à-dire un lutin des bois farceur.
Loki apparaît ou a inspiré des personnages dans de nombreuses œuvres de cinéma et de télévision69.
Dans le film The Mask (1994), le masque est censé être celui du dieu Loki, qui apparaît en personne dans la suite Le Fils du Mask (2005) où il est interprété par Alan Cumming. Loki est également un ange de la mort interprété par Matt Damon dans le film Dogma (1999). Le personnage Marvel Comics Loki est interprété par Tom Hiddleston dans le film Thor (2011) ainsi que dans The Avengers (2012) et Thor : Le Monde des ténèbres (2013).
Dans la série de science-fiction Stargate SG-1 (1997-2007), Loki est un extra-terrestre de la race des Asgards, antagoniste des autres Asgards.
Dans la série fantastique Supernatural, Saison 5, épisode 19 : Une réunion de dieux païens à laquelle le dieu Loki est présent (il s’avérera que ce n’était qu’un usurpateur qui utilisait la ruse et la métamorphose pour se faire passer pour tel).
Dans la deuxième saison de Lost Girl, Bo apprend par Ryan (une Fée de l’Ombre) qu’il est un Loki[Quoi ?].
Loki est régulièrement référencé dans les jeux vidéo, où il apparait sous différentes graphies soit en tant que véritable dieu nordique, soit en tant que personnage ou unité inventé qui porte son nom et s’inspire de sa nature. Parmi ces jeux on compte Valkyrie Profile (1999), Rune (2000), Age of Mythology (2002), World of Warcraft (2004), Loki (2007), Too Human (2008), StarCraft II (2010), The Binding of Isaac (2011), Divina (2012) et SMITE (2014)
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Nimrod
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Nimro par Yitzhak Danziger
Sommaire
Nimrod dans la Bible
Récit biblique
Dans la Genèse, Nimrod est présenté comme un fils de Koush1, lui-même fils aîné de Cham et petit-fils de Noé. Nimrod est le premier héros sur la terre, et le premier roi après le Déluge. Il est décrit comme un « chasseur héroïque devant Dieu »2. La ville de Babel, au pays de Shinar, est une capitale de son royaume. En Assyrie, Nimrod a fondé Ninive, Kalkhu et Résen.
Interprétation et tradition juive puis chrétienne
Le titre de « chasseur devant Dieu », donné à Nimrod, est peut-être péjoratif. En effet, le mot hébreu liphné, « à la face de », peut signifier « contre » ou « en opposition avec ». Bien que, dans ce cas, certains spécialistes prêtent à la préposition hébraïque le sens favorable, « en face de », les Targoumim juifs, ainsi que les Antiquités juives de l’historien Flavius Josèphe, mais aussi le contexte du chapitre 10 de la Genèse lui-même laissent entendre que Nimrud était un puissant chasseur qui provoquait Dieu.
Selon les traditions juive et chrétienne, Nimrod, le « roi-chasseur » régnant sur les descendants de Noé, eut l’idée de construire à Babel (Babylone) une tour assez haute pour que son sommet atteigne le ciel, et rassemblant tous les hommes en opposition avec l’ordre Divin donné à Noé et à ses fils de remplir la terre (Genèse 9:1).[réf. nécessaire]
Nimrod était le fils-époux de Sémiramis[réf. nécessaire], la déification et le culte voué à ce couple incestueux sont traces de la naissance du mythe de la Mère et de l’Enfant commun à de très nombreuses religions.
Nimrod meurt d’une façon humiliante. Un moustique s’est introduit dans son nez, provoquant d’atroces migraines[réf. nécessaire]. Il demande à tous les passants de lui donner une tape sur le crâne dans l’espoir de faire tomber le moustique. C’est ainsi que celui qui se prenait pour un Dieu meurt victime d’un moustique. Dans le Talmud, la mort du « méchant Titus » qui a détruit le Temple de Jérusalem est décrite par un midrash identique. Selon les sources juives, Nimrod a été tué après avoir été provoqué en duel par Esaü, frère de Jacob[réf. nécessaire].
L’opinion juive traditionnelle considère que la construction de Babel et de la tour de Babel débuta sous sa direction. Josèphe écrivit : « [Nimrud] peu à peu, transforme l’état de choses en une tyrannie. Il estimait que le seul moyen de détacher les hommes de la crainte de Dieu, c’était qu’ils s’en remissent toujours à sa propre puissance. Il promet de les défendre contre une seconde punition de Dieu qui veut inonder la terre : il construira une tour assez haute pour que les eaux ne puissent s’élever jusqu’à elle et il vengera même la mort de leurs pères. Le peuple était tout disposé à suivre les avis de [Nimrod], considérant l’obéissance à Dieu comme une servitude ; ils se mirent à édifier la tour […] ; elle s’éleva plus vite qu’on eût supposé. » — Antiquités judaïques, I, 114, 115 (IV, 2, 3).
Archéologiquement parlant, la Tour de Babel a été restaurée par Nabuchodonosor au VIe siècle avant notre ère, plus de 1 000 années après l’existence de Nimrod selon la Bible. [réf. nécessaire]
Étant un des plus anciens rois d’Assyrie, puissant chasseur, inaugurateur des guerres, il fut aussi un des premiers à regrouper les hommes en tribus et à construire des cités (Babylone et Ninive sont les plus importantes)[réf. nécessaire].
Nimrod appartient également au domaine légendaire arabe et persan[réf. nécessaire].
Déification
Selon Alexandre Hislop, pasteur protestant du XIXe siècle, après la mort de Nimrod, les Babyloniens se sentirent poussés à l’honorer grandement en tant que fondateur, bâtisseur et premier roi de leur ville, et comme organisateur de l’Empire babylonien initial. D’après la tradition, Nimrod mourut de mort violente. Puisque le dieu Mardouk (Merodak) était tenu pour le fondateur de Babylone, Hislop a émis l’hypothèse que Mardouk représente Nimrod déifié. De même, il en rapproche la figure des divinités méditerranéennes et orientales Bacchus-Dionysos, voire Cupidon et Mithra archétypes antiques de l’Enfant Divin à la mort tragique.
Nimrod dans d’autres ouvrages
- Il est possible de voir en Nimrod, un personnage repris dans Les Mille et Une Nuits, mentionné dans L’Histoire du Portefaix avec les jeunes filles, Histoire de Zobéida, la première adolescente. Cette dernière, à la suite de quelques mésaventures, échoue dans une cité où les personnages ont été changés en statues de pierre noire. Seul le fils du roi, converti à la religion d’Allah et de son Prophète par son éducatrice, a survécu à la punition qui a frappé la ville. En effet, ses habitants étaient des mages qui vénéraient « le terrible Nardoun », roi des Géants rebelles à Dieu, tout comme Nimrod.
- Dans l’Enfer, Dante fait de Nimrod l’un des gardiens du Puits aux Géants, se trouvant au fond du huitième cercle de l’enfer. Ce puits est le passage vers le 9e cercle et terme de l’enfer. En voyant Dante et Virgile approcher, Nimrod leur crie ces paroles mystérieuses : « Raphél mai amèche zabi almi », mots vraisemblablement inventés par Dante pour retranscrire le mélange des langues (arabes et hébraïques) à Babylone, Nimrod étant celui qui causa la perte du langage unique et la division des hommes.
- Nimrod est un personnage majeur de la franc-maçonnerie. Dans son encyclopédie maçonnique, Albert Mackey écrit que Nimrod fut l’un des fondateurs de la franc-maçonnerie.
- Dans La Fin de Satan de Victor Hugo, Nimrod est représenté comme un tyran qui tentera d’atteindre les cieux après avoir conquis et ravagé la Terre. Il construit une grande cage, y accroche quatre aigles et au-dessus d’eux quatre carcasses de lions, et s’envole vers les cieux. Au bout de plusieurs jours de vols, il bande son arc et tire une flèche, « Et la terre entendit un long coup de tonnerre »3. Nimrod retombe mort sur Terre. « Auprès de lui gisait sa flèche retombée. La pointe, qui s’était enfoncée au ciel bleu, Était teinte de sang. Avait-il blessé Dieu ? »3
- Friedrich Nietzsche, dans ses Dithyrambes de Dionysos, qualifie son Zarathoustra de « cruel Nemrod », dans Entre Oiseaux de proie.4
- Lucrèce Nemrod est un personnage féminin créé par l’écrivain Bernard Werber apparu dans Le Père de nos pères, L’Ultime Secret et Le Rire du cyclope.
Articles connexes
Bibliographie
- Alexandre Hislop, Les deux babylones, 1889
Notes et références
- ↑ Genèse 10,8–10,10.
- ↑ En allemand : http://bitflow.dyndns.org/german/MartinLuther/Von_Der_Babylonischen_Gefangenschaft_Der_Kirche.html [archive]
- ↑ a et b Victor Hugo, La Fin de Satan.
- ↑ Friedrich Nietzsche, « Dithyrambes de Dionysos », {{Article}} : paramètre «
périodique
» manquant, 1892, https://fr.wikisource.org/wiki/Dithyrambes_de_Dionysos#cite_note-1 [archive]
https://fr.wikipedia.org/wiki/Loki
Loki
Pour les articles homonymes, voir Loki (homonymie).
Loki | |||||
Dieu de la mythologie nordique | |||||
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Loki tel que représenté dans le manuscrit MS NKS 1867 4° du XVIIIe siècle. | |||||
Caractéristiques | |||||
Autre(s) nom(s) | Loptr, Hveðrungr | ||||
Fonction principale | Dieu fripon | ||||
Équivalent(s) par syncrétisme | Syrdon (mythologie ossète) Prométhée et Typhon (mythologie grecque) Amiran (mythologie géorgienne) Lucifer (religions abrahamiques) Seth (Mythologie égyptienne). |
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Culte | |||||
Région de culte | Scandinavie | ||||
Mentionné dans | Edda poétique
Sörla þáttr (en) Poème runique norvégien 13 |
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Famille | |||||
Père | Farbauti | ||||
Mère | Laufey | ||||
Fratrie | Býleist et Helblindi « Frère de sang » d’Odin. |
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Premier conjoint | Sigyn | ||||
• Enfant(s) | Nari et/ou Narfi | ||||
Deuxième conjoint | Angrboda | ||||
• Enfant(s) | Fenrir, Jörmungand et Hel | ||||
Troisième conjoint | Svadilfari | ||||
• Enfant(s) | Sleipnir | ||||
Quatrième conjoint | Inconnue | ||||
• Enfant(s) | Vali | ||||
Symboles | |||||
Attribut(s) | Feu et vent ? | ||||
modifier |
Loki (aussi appelé Loptr et Hveðrungr) est le dieu de la discorde dans la mythologie nordique. Il est le fils du géant Farbauti et de Laufey. Loki est le père de plusieurs monstres ; le serpent Jörmungand, le loup Fenrir, et la déesse du monde des morts Hel. Il est également le parent du cheval d’Odin à huit jambes Sleipnir. Malgré ses origines, il est accueilli dans le panthéon divin des Ases par Odin.
Loki est capable de métamorphose, et il est aussi impulsif et irresponsable que malin et rusé. Les Ases ont souvent recours à lui pour régler des problèmes, alors que bien souvent c’est Loki lui-même qui en est la cause. De nature fondamentalement négative et traître, sa jalousie l’amène à causer la mort du dieu Baldr. Furieux, les Ases le punissent en l’attachant avec les entrailles d’un de ses fils sous un serpent dont le venin goutte sur son visage. Il en sera ainsi jusqu’à la fin prophétique du monde, le Ragnarök, où Loki se libèrera et mènera les géants à l’assaut contre les dieux et les hommes. Loki et son dieu opposé, Heimdall, s’entretueront pendant la bataille.
La nature changeante et ambiguë de Loki est sujette à débats chez les spécialistes quant à son rôle dans le panthéon divin, et il a été comparé à divers personnages d’autres mythologies. Loki est un dieu récurrent et célèbre qui a survécu dans le folklore moderne d’Europe du Nord, et son personnage est référencé et source d’inspiration dans de nombreuses œuvres de la culture moderne.
Sommaire
- 1 Noms
- 2 Parenté et filiation
- 3 Nature
- 4 Mythes
- 5 Témoignages archéologiques
- 6 Théories
- 7 Folklore et survivances modernes
- 8 Dans les œuvres modernes
- 9 Annexes
- 10 Bibliographie
Noms
Étymologie
L’étymologie du nom « Loki » est discutée. Elle pourrait être apparentée au vieux norrois lúka, signifiant « proche »1. Une autre origine possible serait le verbe du germanique commun *lukijan, désignant l’action de fermer un anneau ou, par extension, de voyager par des chemins sinueux. Ce dernier sens pourrait être adapté pour le nom d’un dieu escroc[réf. nécessaire]. La Fibule de Nordendorf datée du VIIe siècle porte une inscription runique de dieux germaniques dont Logaþore, proche des termes du vieil anglais logþor ou logþer qui signifient « malicieux » ce qui correspond à la nature de Loki. S’appuyant sur ces éléments, le linguiste Jean Haudry avance que le nom Loki serait une hypocoristique de Logaþore, qu’il faudrait interpréter comme « celui qui dépasse la flamme »2, mais cette interprétation n’est pas entièrement acceptée3.
Plusieurs sources primaires désignent Loki sous le nom de LoptrNote 2. En vieux norrois loptr signifie « air »4 ou « vent »5,6.
Loki est également nommé HveðrungrNote 3 dont l’étymologie est incertaine. Il signifie peut être « hurleur »7 ou « écumant »8. Ce nom est également rapproché à hvida qui signifie « coup de vent », associant Loki au vent immatériel[réf. nécessaire].
Kenningar
Le kenning (au pluriel, kenningar) est une figure de style propre à la poésie scandinave qui consiste à remplacer un mot, ou le nom d’un personnage ou d’une créature par une périphrase. Le chapitre 16 de la partie Skáldskaparmál de l’Edda en prose de Snorri Sturluson révèle les kenningar qui peuvent désigner Loki et qui font référence à sa famille, sa nature ou aux mythes qui lui sont associés ;
« Fils de Farbauti et de Laufey, de Nál ; le frère de Byleistr, de Helblindi ; le père de Vanargandr, de Jörmungandr, de Hel, et Nari, d’Áli ; le parent, l’oncle paternel, le compagnon de route et de siège d’Óðinn et des Ases, le visiteur et l’ornement du coffre de Geirröđr, le voleur des géants, du bouc, du collier des Brísingar, des Pommes d’Iðunn ; le parent de Sleipnir, Mari de Sigyn ; l’ennemi des dieux ; le dévastateur de la chevelure de Sif ; l’artisan de malheur ; l’Ase malin ; le diffamateur et le trompeur des dieux ; le ráðbaniNote 4 de Baldr ; l’Ase lié ; l’ennemi obstiné de Heimdallr et de Skadi. »— Skáldskaparmál, chapitre 16 (traduction de Georges Dumézil)9,10
Le chapitre 33 du Gylfaginning propose les kenningar « calomniateur des Ases », « initiateur des tromperies », « honte de tous les dieux et de tous les hommes ». On lit également « père du Loup », « artisan de malheur », « corneille du mal » et « fils de Laufey » dans Lokasenna 10, 41, 43, 52. « Fils de Laufey » apparaît également dans Þrymskviða 18 et 20. Loki est appelé « frère de Býleist » dans Völuspá 51 et Hyndluljóð 40. La strophe 7 du poème scaldique Haustlǫng désigne Loki par le kenning « charge des bras de Sigyn ».
Parallèlement, un kenning pour le dieu Heimdall est « ennemi de Loki » d’après le chapitre 8 du Skaldskaparmal10. « Fils/fille de Hveðrungr » sont des kenningar servant à désigner respectivement Fenrir et Hel dans Völuspá 55 et Ynglingatal 327.
Parenté et filiation
Loki est le fils du géant Fárbauti et de LaufeyNote 5. Ses deux frères sont Býleist et Helblindi. Les sources primaires ne mentionnent ces personnages qu’en raison de leur parenté à Loki ; autrement nous ne disposons d’aucune information sur eux. D’après le poème eddique Lokasenna 9, le dieu Odin et Loki ont fait un pacte de sang ce qui a permis de l’intégrer dans le panthéon des Ases.
Loki est le parent de plusieurs créatures spectaculaires. Métamorphosé en jument, il engendra avec l’étalon Svadilfari le cheval à huit jambes Sleipnir, qui devient le monture d’Odin. Le chapitre 34 de la Gylfaginning de l’Edda de Snorri raconte que Loki a procréé trois enfants monstrueux avec la géante Angrboda : le loup Fenrir, le serpent de Midgard Jörmungand et Hel, qui sont élevés à Jötunheim. Comme les prophéties racontent que ceux-ci causeront le malheur des dieux, ces derniers décident de s’en débarrasser. Odin jette alors Jörmungand dans la mer et envoie Hel dans Niflheim, le monde des morts, dont elle devient la gardienne. Le loup Fenrir est quant à lui enchaîné11. Angrboda est également mentionnée comme mère de Fenrir dans le poème eddique Hyndluljóð 40.
Fárbauti | Laufey | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Svadilfari | Loki | Angrboda | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Sleipnir | Jörmungand | Fenrir | Hel | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Hyndluljóð évoque à la strophe 41 un mythe énigmatique où Loki mange le cœur brûlé d’une femme sorcière ou géante, et en tombe enceinte d’un monstre9,12. Le poème eddique Lokasenna évoque aux strophes 23 et 33 la métamorphose de Loki en femme féconde qui aurait enfanté ; nous ignorons les mythes auxquels ces strophes font référence13, mais la seconde pourrait être une référence à Sleipnir14. Lokasenna 40 mentionne également que Loki aurait eu un fils de la femme du dieu Týr, toutefois aucun mythe préservé ne le confirme, et nous ne connaissons pas de femme pour Týr15.
Loki est cependant marié à la déesse Asyne Sigyn qui selon l’Edda de Snorri lui donna un fils « Nari ou Narfi ». Loki a également un autre fils, Vali, dont la mère n’est pas mentionnée. Ceci est contradictoire avec l’épilogue en prose de la Lokasenna où Nari et Narfi sont deux fils distincts de Loki.
Sigyn | Loki | Inconnue | |||||||||||||||||||||||||||||||||||
Nari ou Narfi | Vali | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Nature
Dans la partie Gylfaginning de l’Edda de Snorri, Loki est décrit au chapitre 33 comme suit :
« Loki est beau et splendide d’apparence, mauvais de caractère, très changeant dans son comportement. Plus que les autres êtres, il possédait cette sagesse qui est appelée rouerie, ainsi que les ruses permettant d’accomplir toutes choses. Il mettait constamment les dieux dans les plus grandes difficultés, mais il les tirait souvent d’affaire à l’aide de subterfuges. »— Gylfaginning, chapitre 3316
Loki est compté parmi les Ases bien qu’il n’ait aucun lien de parenté avec eux ; il a été accepté dans la famille par Odin. Il apparaît dans de nombreux mythes comme compagnon de route pour Odin et pour Thor. Il sert en quelque sorte de bouffon pour les dieux, qui l’utilisent comme messager et semblent le considérer comme un inférieur. Malgré son ingéniosité, sa nature impulsive conduit à ce qu’il soit la cause de problèmes et de malheurs, qu’il est contraint de réparer sous la menace des autres dieux, ce qu’il réussit grâce à sa ruse et ses tromperies. Loki est un observateur curieux et détient le don de métamorphose, changeant sa forme parfois en saumon, en cheval, en oiseau, en phoque ou encore en mouche. Il peut également changer de sexe, se métamorphosant en jument ou en femme. Loki est foncièrement amoral, traître, injurieux et menteur, des qualités qu’il utilise pour sauver sa peau ou simplement par plaisir. Il s’amuse de farces perverses qui le mettent souvent dans des situations délicates, et il se révèle mauvais joueur. Finalement, sa nature négative et haineuse culmine dans sa part dans le meurtre gratuit du dieu Baldr. Il ne se soucie pas des répercussions de ses actes, et finit traqué comme un bandit; il est finalement puni jusqu’à la fin du monde prophétique, le Ragnarök, où, libéré, il mènera les géants et forces du mal contre les dieux17.
Mythes
Les récits nordiques proviennent de sources éparses avec peu d’informations chronologiques, ainsi les différents mythes mentionnés dans cette section n’ont pas volonté à être présentés de manière chronologique, excepté les mythes qui possèdent un repère de temps indéniable, comme la première rencontre entre Loki et Odin, forcément au début, et le Ragnarök à la fin. L’organisation des mythes présentée ci-dessous s’appuie néanmoins en partie sur la chronologie théorique proposée par le spécialiste Viktor Rydberg dans Investigations sur la Mythologie germanique, Volume II (1889)18.
Origine
Loki est le fils des géants Farbauti et Laufey, toutefois il fait partie du panthéon des Ases. Dans le poème eddique Lokasenna, à la strophe 9, Loki rappelle brièvement (et énigmatiquement) les circonstances de son adoption par les Ases, lorsqu’Odin et lui se sont liés par une fraternité sacrée, le rite du fóstbroedralag, un rite que se retrouve également dans le cycle héroïque de Sigurd19.
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La forge des attributs divins
Au chapitre 35Note 6 du Skáldskaparmál de l’Edda de Snorri le farceur Loki coupe la chevelure de la déesse Sif, épouse de Thor, pendant son sommeil. Lorsque Thor menace Loki de le broyer, ce dernier propose de récupérer chez les nains une chevelure d’or. Alors les nains fils d’Ivaldi fabriquent pour les dieux la chevelure de Sif ainsi que le bateau Skidbladnir pour Freyr et la lance d’Odin, Gungnir. Ensuite, Loki parie sa tête avec les nains Brokk et son frère Eitri qu’ils ne pourraient fabriquer des objets aussi précieux. À la forge, Eitri demande à Brokk d’actionner le soufflet sans s’arrêter avant qu’il n’ait retiré l’objet qu’il a fabriqué. Afin de gagner son pari, Loki métamorphosé en mouche vient piquer Brokk pour le distraire mais ce dernier continue à actionner le soufflet jusqu’au bout, et le forgeron retire du fourneau le verrat aux soies d’or Gullinbursti pour Freyr. Pour le second objet, Eitri place de l’or dans le fourneau et Brokk ne cède pas aux piqures de Loki avant qu’Eitri ne retire du fourneau un anneau d’or appelé Draupnir, pour Odin. Ensuite Eitri place du fer dans le fourneau en exigeant à Brokk de ne pas arrêter d’actionner le soufflet sinon tout serait gâché. Mais Loki en mouche le pique entre les paupières jusqu’au sang, alors Brokk s’arrête un court instant, et il en a fallu de peu pour que tout soit gâché. Ils sortent du fourneau le marteau Mjöllnir pour Thor, mais à cause de Loki le manche du marteau est trop court. Brokk et Loki présentent les objets aux Ases pour qu’ils décident lesquels sont les plus précieux. Les Ases décident que le marteau est la plus grande protection possible contre les géants du givre. Ainsi le nain a gagné le pari pour la tête de Loki. Ce dernier essaye alors de s’échapper grâce à ses chaussures qui lui permettent de courir à travers les airs et la mer, mais Thor le rattrape pour qu’il honore son engagement. Afin de sauver sa peau, Loki déclare qu’il avait mis sa tête en gage et non pas son cou. Finalement, le nain Brokk se contente de lui coudre les lèvres21.
Intrigues avec les géants
Chez Útgarða-Loki
Je suis le géant Skrymir, illustration d’Elmer Boyd Smith (1902).
Les chapitres 44 à 47 de la Gylfaginning racontent la légende de Thor, Loki et Thjálfi chez le roi géant Útgarða-Loki. Au chapitre 44, Thor et Loki sont reçus par un paysan pour la nuit. Les boucs de Thor servent de repas mais Thjálfi, le fils du paysan, casse un os pour récupérer la moelle. Le lendemain matin, Thor bénit les restes des boucs qui ressuscitent, mais l’un d’entre eux boite. Furieux il accuse les paysans d’avoir cassé un os. Terrifiés ils acceptent de lui donner en compensation leurs deux enfants comme servants, Thjálfi et Roskva. Au chapitre 45, les quatre protagonistes marchent vers Jötunheim, et se reposent une nuit dans une grande maison. Ils découvrent le lendemain matin que la maison était en fait le gant du géant Skrymir, qui propose de les accompagner. L’arrogance et les moqueries de Skrymir sur leur petite taille énervent Thor à plusieurs reprises, mais ses grands coups de marteau font tellement peu d’effet contre le géant que ce dernier semble à peine les remarquer, demandant par exemple si un gland lui est tombé sur la tête. Skrymir leur indique ensuite la route pour atteindre le fort d’Utgard où réside le géant Útgarða-Loki et il conseille les compagnons de bien s’y tenir car les géants sont très puissants. Au chapitre 46 les compagnons arrivent à l’immense fort d’Utgard et se présentent au roi Útgarða-Loki qui en se moquant de leur petite taille leur demande s’ils ont quelconque talent supérieur aux autres hommes. Loki répond qu’il mange plus vite qu’aucun autre. Il se mesure alors à un certain Logi qui le défait au jeu puisque Loki n’a mangé que la viande alors que Logi a mangé les os également. Thjálfi affirme qu’il est plus rapide que tous les hommes, mais il perd sa course contre un garçonnet nommé Hugi. Thor déclare qu’il est bon buveur, mais il peine à baisser le niveau d’une corne à boire après trois traits. Riant de sa faiblesse, Útgarða-Loki propose à Thor de tenter de soulever son chat, mais le dieu parvient difficilement à soulever une de ses pattes. Furieux des moqueries du roi, Thor demande que quelqu’un se mesure à lui en lutte. Le roi le fait alors combattre sa vieille nourrice Elli qui réussit à mettre Thor sur un genou. Au chapitre 47 on lit que le lendemain matin le roi les accompagne à la sortie du royaume et demande à Thor s’il avait déjà rencontré d’adversaire plus puissant, ce à quoi Thor répond qu’il a effectivement subit un grand déshonneur. Alors Útgarða-Loki lui explique les illusions visuelles qu’il leur ont fait subir. Il avoue qu’il était le géant Skrymir et que ses coups de marteau l’ont en fait raté et ont créé trois vallées profondes. Loki s’était battu contre le feu sauvage, et Thjálfi contre son esprit. La corne que Thor but était reliée à l’océan et le dieu but tellement qu’il a créé les marées, le chat était en fait le serpent de Midgard que Thor a quand même réussit à soulever, et enfin la vieille qu’il combattit était en fait une personnification de la vieillesse. Tous les témoins furent impressionnés et terrifiés par les prouesses des trois compagnons, qui excédaient largement leurs attentes. Furieux Thor brandit son marteau pour frapper le géant mais celui-ci disparait ainsi que son fort22.
Le poème eddique Hymiskviða, à la strophe 37, attribue à Loki la responsabilité de la boiterie du bouc, mais la strophe suivante mentionne la compensation des deux enfants d’un géant, ce qui est plus en accord avec le récit du Gylfaginning23. Aux strophes 60 et 62 du poème eddique Lokasenna, Loki se moque de la rencontre de Thor avec Skrymir24.
Chez Geirröd
Le chapitre 18Note 7 du Skáldskaparmál raconte qu’un jour, Loki s’amuse à voler sous la forme de faucon qui appartient à Frigg. Il vole par curiosité dans la demeure du géant Geirröd et se pose sur une lucarne pour observer la halle. Voyant l’oiseau, Geirröd ordonne qu’on lui amène. Loki reste posé s’amusant des difficultés du serviteur à grimper jusqu’à lui, mais lorsqu’il décide de s’envoler il réalise que ses pattes restent collées. Loki est capturé et Geirröd soupçonne sa véritable nature d’humain, mais le dieu ne l’avouant pas le géant l’enferme dans un coffre pendant trois mois jusqu’à ce que Loki lui révèle son identité et pour racheter sa vie il lui jure d’attirer Thor dans son domaine mais sans son marteau Mjöllnir ni ses autres attributs puissants. Lorsque Thor et Loki arrivent dans la halle de Geirröd en tant qu’invités, les géants tentent de tuer Thor mais ce dernier parvient malgré tout à en sortir victorieux, massacrant Geirröd et ses deux filles25.
L’expédition de Thor chez Geirröd est également raconté dans le poème scaldique Þórsdrápa qui est vraisemblablement la source de Snorri Sturluson qui en cite des strophes. Toutefois dans le poème, Thor visite Geirröd accompagné de son valet Thjálfi et non de Loki. Loki est tout de même indiqué comme l’instigateur de l’expédition et est qualifié de « grand menteur » dès la première strophe26.
Vol de Mjöllnir
Thor abat le géant Þrymr, illustration de Lorenz Frølich (1906).
Le mythe burlesque du vol du marteau de Thor est raconté dans le poème eddique Þrymskviða. Thor se réveille et constate la disparition de son marteau Mjöllnir. Loki s’envole alors le chercher dans le monde des géants, et rencontre le géant Þrymr qui déclare l’avoir pris, et ne le rendrait qu’en échange de la main de la déesse Freyja. Loki retourne en informer Thor, et Freyja furieuse refuse de se donner au géant. Le dieu Heimdall propose de travestir Thor en mariée pour tromper le géant, ce qu’il fait alors non sans réticences. Loki l’accompagne déguisé en servante. Les deux dieux sont accueillis à un banquet du géant qui est trompé par le subterfuge. Le géant remarque quelques éléments étranges dans la façon d’agir de son épouse ; elle mange et boit beaucoup plus que l’on s’attendrait. Loki déguisé explique que c’est parce qu’elle a voyagé huit nuits de suite sans manger dans son empressement de prendre sa main. Þrymr demande ensuite pourquoi elle a des yeux aussi enragés. Loki répond que c’est parce qu’elle n’a pas dormi pendant huit nuits dans son empressement pour prendre sa main. Þrymr ordonne qu’on lui apporte le marteau pour consacrer la fiancée, alors Thor s’en empare, jette son déguisement et tue Þrymr avant de massacrer toute sa famille27.
Si le thème du poème émane sans doute d’un mythe authentique, cette version rédigée au XIIIe siècle, sans doute par Snorri Sturluson, trahit son christianisme par son ton évidemment satirique, amusé de la goinfrerie et de la brutalité de Thor, sans toutefois être méprisant28.
Le géant maître-bâtisseur et Sleipnir
Loki en jument séduit l’étalon Svaðilfari alors que le géant
maître-bâtisseur tente de le retenir. Illustration de Dorothy Hardy
(1909).
Au chapitre 42 de la Gylfaginning, un maître-bâtisseur se présente aux dieux et propose de leur construire une forteresse pour Ásgard en seulement trois semestres, ce qui les protégera des géants. Il demande alors comme payement la déesse Freyja, le Soleil et la Lune à condition qu’il réussisse son exploit. Les dieux acceptent, pensant qu’il ne réussirait pas. Mais l’étranger, avec l’aide de son étalon Svadilfari, entame la construction à une vitesse impressionnante. Inquiets qu’il réussisse sa prouesse, les dieux tiennent conseil et forcent Loki à empêcher l’étranger de finir son travail à temps. Loki se transforme en jument en rut pour distraire le cheval de l’étranger l’empêchant par ce biais d’accomplir à temps son ouvrage. Pris de fureur, le maître-bâtisseur révèle sa véritable identité de géant. Les dieux invoquent Thor qui lui fracasse le crâne avec son marteau. Loki fut néanmoins fécondé par l’étalon, et engendre le cheval à huit pattes Sleipnir, qui devient la monture d’Odin29.
L’enlèvement d’Idunn
Il s’envola avec elle, pommes magiques et tout, illustration d’Elmer Boyd Smith (1902).
Le premier chapitre de la partie Skáldskaparmál de l’Edda de Snorri raconte l’enlèvement d’Idunn. Odin, Loki et Hœnir voyagent loin de chez eux et capturent un bœuf pour le manger, mais étrangement la viande ne cuit pas. Un aigle perché sur un chêne au-dessus d’eux leur explique qu’il en est la cause et propose de laisser se faire la cuisson si les dieux lui permettent d’en manger tout son soûl. Ils acceptent, et le bœuf cuit, l’aigle emporte une grande partie de la viande. Alors Loki en colère frappe l’aigle avec une perche mais la perche reste accrochée à ses mains et au dos de l’oiseau qui s’envole. Saisi par la douleur, Loki supplie l’aigle de le relâcher, et ce dernier accepte à la seule condition que Loki attire la déesse Idunn et ses pommes hors d’Ásgard. Libéré, Loki emmène alors Idunn dans un bois hors d’Ásgard, sous le prétexte qu’il a trouvé d’autres pommes remarquables. Il lui recommande d’emporter ses propres pommes pour les comparer. Le géant Thjazi sous la forme d’un aigle s’empare d’Idunn et l’emporte chez lui à Thrymheim. Privés de ses pommes de jouvence, les Ases vieillissent rapidement. Ils tiennent conseil et comprennent qu’elle a été vue pour la dernière fois sortant d’Ásgard avec Loki. Ils le menacent alors des pires supplices s’il ne retrouve pas Idunn. Apeuré, Loki promet de la ramener et réclame à Freyja son plumage de faucon. Loki s’envole alors vers le Nord à Jötunheim pour la demeure de Thjazi où il retrouve Idunn seule, Thjazi étant sorti. Loki la transforme en noix afin de la porter dans ses serres et il la ramène vers Ásgard. Lorsque Thjazi rentre et constate la disparition d’Idunn, il prend sa forme d’aigle et se lance à leur poursuite. Les Ases voient alors Loki arriver vers eux avec la noix, poursuivi par un aigle, et comprennent la situation. Dès que Loki franchit l’enceinte d’Ásgard, les Ases enflamment les copeaux qui brûlent les plumes de l’aigle. Il tuent ensuite le géant au sol. Alors, Skadi, la fille du géant, marche vers Ásgard pour venger son père. Les Ases lui proposent comme compensation de choisir n’importe quel mari d’entre eux mais en ne regardant que leurs pieds. Elle choisit alors le dieu Njörd bien qu’elle ait espéré tomber sur Baldr. L’autre clause était de parvenir à la faire rire. Loki attache une corde à la barbe d’une chèvre et l’autre bout à ses propres bourses, et chacun tire tour à tour, ce qui fait rire la géante30.
Les strophes 2 à 13 du poème scaldique Haustlǫng racontent le même mythe en s’arrêtant à la mort de Thjazi, mais ne précisent pas la métamorphose d’Idunn en noix31. Snorri Sturluson a utilisé ce poème comme source pour son récit, et il le cite dans son œuvre. À la strophe 50 du poème eddique Lokasenna, Loki fait allusion à son rôle dans la mort du géant32.
L’or d’Andvari
Dans le poème eddique héroïque Reginsmál, on apprend que Regin élève Sigurd et lui raconte l’histoire de l’or d’Andvari. Ce mythe est également raconté dans la Völsunga saga et au chapitre 39Note 8 du Skáldskaparmál, avec peu de variations. Regin explique qu’Odin, Hoenir et Loki arrivent à une cascade et Loki tue avec une pierre une loutre qui mangeait un saumon. Loki se vante alors de sa double prise. Cette loutre n’est autre que Ótr métamorphosé, le frère de Reginn et de Fafnir, fils de Hreidmarr. Le soir même, les dieux se logent chez Hreidmarr avec leur butin. Hreidmarr et ses fils s’emparent des dieux et demandent en réparation assez d’or pour remplir et recouvrir la peau de la loutre. Loki est envoyé pour récupérer l’or, et il capture le nain Andvari métamorphosé en brochet. Loki exige l’or d’Andvari qui le lui donne. Le nain dissimule tout de même un anneau mais Loki le voit et lui prend, alors Andvari prononce la malédiction sur l’or. Les Ases remplissent ensuite la peau de la loutre et la recouvrent d’or. Hreidmarr voit qu’un poil de moustache dépasse, et donc Odin place l’anneau d’Andvari pour le recouvrir. Loki informe Hreidmarr de la malédiction sur l’or, et annonce la trame du cycle de Sigurd33,34.
Vol du collier des Brísingar
Il existe plusieurs allusions au mythe du vol par Loki du collier des Brísingar qui appartient à la déesse Freyja. Dans le poème scaldique Haustlǫng 9, et dans Skáldskaparmál 16, un kenning pour désigner Loki est « voleur du collier des Brísingar ». Le poème scaldique Húsdrápa préservé en partie dans le Skáldskaparmál, mentionne que Loki a volé l’objet précieux à Freyja. Celle-ci demande à Heimdall de le retrouver et ils découvrent que Loki en est le voleur. S’ensuit un combat entre les deux dieux métamorphosés en phoques, où Heimdall triomphe.
Dans le texte évhémériste Sörla þáttr rédigé au XIVe siècle, Freyja est la maîtresse favorite du roi Odin. Elle désire un collier fabriqué par des nains, qui lui donnent à condition qu’elle passe une nuit d’amour avec chacun d’entre eux, ce qu’elle fait. Un certain Loki est au courant du marché scandaleux et en informe Odin qui ordonne de ravir le collier à Freyja. Alors il lui vole métamorphosé en mouche pendant qu’elle dort. Lorsque Freyja réclame le collier à Odin, il lui rend à la seule condition qu’elle provoque une guerre éternelle entre deux rois, ce qu’elle réussit au troisième essai. Cette guerre se termine finalement avec l’avènement du christianisme.
Meurtre de Baldr
Représentation de Loki incitant Höd à tuer Baldr dans le manuscrit islandais du XVIIIe siècle NKS 1867 4to.
Le chapitre 49 de la Gylfaginning raconte que Baldr, l’un des fils d’Odin, rêve de sa mort prochaine ce qui inquiète les Ases. Sa mère Frigg fait alors jurer à chaque élément de ne jamais faire de mal à son fils. Ainsi les Ases s’amusent à honorer Baldr en lançant vers lui des objets qui conséquemment ne lui font aucun mal. Ceci déplaisant à Loki35, il prend l’apparence d’une femme et obtient l’aveu de Frigg qu’elle n’a pas demandé de serment au gui, tant cette pousse lui paraissait inoffensive. Loki recueille alors le rameau de gui, et incite le dieu aveugle Höd, frère de Baldr, de le lancer contre lui pour se joindre à l’activité. Loki guide le jet de Höd, et le rameau transperce Baldr et le tue devant la stupéfaction des Ases. Le dieu Hermód se porte alors volontaire pour voyager au monde des morts pour demander à la gardienne Hel de leur rendre Baldr. Celle-ci accepte à condition que toutes choses au monde le pleurent. Les Ases envoient donc des messagers à travers les mondes pour leur demander de pleurer la mort de Baldr, mais ils confrontent une géante appelée Thokk, qui est en fait Loki déguisé, qui refuse de le pleurer, empêchant ainsi Baldr de revenir des morts36.
Le poème eddique Baldrs draumar raconte le meurtre de Baldr par Höd, mais le rôle de Loki n’y est pas mentionné. De même, le poème Völuspá aux strophes 31 à 34 évoque ce meurtre sans impliquer Loki, toutefois la strophe 35 mentionne la punition de Loki (cf. infra). Dans le poème eddique Lokasenna, Loki se vante d’avoir causé la mort de Baldr :
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Le poème runique norvégien offre un moyen mnémotechnique pour mémoriser les runes, Loki est associé à la rune Berkanan (bouleau) et on lit à la strophe 13 : « Ruse à Loki valut misère »39. Il s’agit peut être d’une référence à son rôle dans le meurtre de Baldr[réf. nécessaire].
Querelle de Loki
Loki se querellant avec les dieux, illustration de Lorenz Frølich (1895).
Dans le poème eddique Lokasenna, le dieu malin Loki profère des insultes à l’encontre des principaux Ases lors d’un banquet. Le prologue en prose raconte que le géant Ægir tient un banquet pour tous les Ases. Loki est énervé par la louange des domestiques du géant, Eldir et Fimafeng, ainsi il tue le second et se fait chasser du banquet par les Ases. En revenant, Loki croise Eldir et le poème commence à cet instant. Eldir lui informe que les dieux parlent de leurs prouesses et ne parlent pas de Loki en bien. Dès la strophe 3, Loki précise ses intentions pour la suite :
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Entré dans la halle qui est devenue silencieuse à son arrivée, Loki exige à boire et Odin lui permet de s’assoir pour le calmer. S’ensuit un échange verbal entre Loki et les principaux dieux, où Loki les insulte et les nargue tour à tour. Beaucoup de mythes sont rappelés dans le poème, et d’autres qui ne nous sont pas parvenus. À la strophe 57, Thor, qui était absent, arrive au banquet et menace Loki, « être abject », de le tuer avec son marteau. Après un bref échange, Loki se résigne à partir car il sait que Thor le frapperait, puis il maudit Ægir. L’épilogue en prose raconte alors la capture et la punition de Loki par les Ases40.
Capture et supplice
Au chapitre 50 de la Gylfaginning, les dieux, excédés par le meurtre de Baldr, décident de rechercher Loki, qui s’était caché sur une montagne. Il s’y construit une maison dotée de quatre portes, une sur chaque façade, afin de pouvoir surveiller toutes les directions. Le jour, il se transforme parfois en saumon dans les cascades de la rivière Fránangr. Réfléchissant à la manière dont les Ases pourraient l’attraper sous sa forme de poisson, il invente le premier filet de pêche avec des fibres de lin. Il voit alors les Ases s’approcher, il jette le filet au feu avant de bondir dans la rivière. Kvasir entre en premier dans la maison et en voyant les cendres laissés par le filet il comprend son utilité pour pêcher les poissons, ainsi les Ases en fabriquent un à leur tour. Les Ases se divisent en deux groupes et remontent la rivière, finissant ainsi par capturer Loki. Thor attrape Loki par la queue, et depuis les saumons sont minces à l’arrière. Les Ases emmènent Loki dans une caverne, ainsi que ses fils Narfi (ou Nari) et Vali. Ils métamorphosent Vali en loup qui déchire son frère Narfi, et avec les boyaux de ce dernier ils attachent Loki à trois pierres. Skaði place un serpent au-dessus de lui, de manière à ce que le venin coule sur son visage. Sigyn, la femme de Loki, recueille le venin dans une cuvette. Toutefois, lorsqu’elle vide la cuvette pleine, du venin coule sur le visage de Loki ce qui le fait se tordre de douleur et causer les tremblements de terre. Loki restera ainsi jusqu’au Ragnarök41.
L’épilogue du poème eddique Lokasenna raconte en moins de détails le supplice de Loki. Une différence notable avec la Gylfaginning est que dans ce poème les deux fils de Loki sont Nari et Narfi, et Vali n’y est pas mentionné42. À la strophe 49 de ce poème, Skaði annonce à Loki qu’il sera entravé par les entrailles de son fils sur un rocher. Le supplice de Loki est également mentionné par la völva (prophétesse) à la strophe 35 du poème Völuspá, où Sigyn est décrite siégeant à ses côtés :
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Loki entravé (motif de la croix de Gosforth) (1908) par W. G. Collingwood.
Ragnarök
Le chapitre 51 du Gylfaginning raconte en détail les évènements de la fin du monde prophétique du Ragnarök. Le monde sera ravagé par les guerres et un hiver de trois ans, le Fimbulvetr. Toutes les chaînes se briseront, ainsi le loup Fenrir et Loki seront libérés, et le serpent Jörmungand dévastera les terres. Les géants et Loki accompagné du cortège des morts de Hel combattront les dieux sur la plaine de Vigrid. Presque tous périront. Fenrir engloutira Odin avant d’être tué par Vidar, Jörmungand et Thor s’entretueront, et Loki combattra le dieu Heimdall et ils s’entretueront également. Le géant du feu Surt enflammera le monde, avant qu’il renaisse des flammes45.
Le poème eddique Völuspá raconte également les évènements du Ragnarök, et a servi de source pour Snorri Sturluson. Le poème précise à la strophe 51 que Loki arrivera de l’est sur un bateau46, ce qui contraste avec la Gylfaginning qui mentionne également un bateau, Naglfar, mais c’est le géant Hrym qui le gouvernera45.
Témoignages archéologiques
Fibule de Nordendorf I
La fibule de Nordendorf I est une fibule d’argent de 13 cm découverte en 1843 vers Nordendorf, au sud de l’Allemagne et datée de la première moitié du VIIe siècle. Cette pièce figure une inscription runique qui semble mentionner des noms de dieux47. On lit :
- logaþore
- wodan
- wigiþonar
Si wodan et wigiþonar sont vraisemblablement les noms alémaniques des dieux Odin et Thor, logaþore pose problème. Certains spécialistes ont proposé Lódur et Loki, mais aucune conclusion satisfaisante n’a été trouvée48,3.
Détail de la croix de Gosforth.
Croix de Gosforth
La croix de Gosforth, retrouvée en Cumbrie (Angleterre), et datée de la première moitié du Xe siècle, présente un mélange d’iconographies chrétienne et païenne. Une image sur la face ouest représente certainement Loki enchaîné et protégé par Sigyn du venin d’un serpent49,50. Cette scène fait écho à une autre représentation de la sculpture, celle du Christ sur sa croix assisté par Marie-Madeleine51. Il s’agit là d’un exemple de syncrétisme entre la religion païenne nordique et le christianisme ; ici des mythes païens ont servi à établir des concepts chrétiens à une population christianisée et certainement versée en légendes nordiques52.
Croix de Kirkby Stephen
Le personnage attaché de la pierre de Kirkby Stephen.
Une croix fragmentée de la fin du Xe siècle, retrouvée à Kirkby Stephen en Cumbrie, porte une figure entravée dotée de cornes et d’une barbe. Ce personnage est parfois pensé représenter Loki53. La pierre, découverte en 1870, est en grès jaune pâle ; elle est aujourd’hui placée à l’entrée de l’église de Kirkby Stephen. Une pierre portant des gravures similaires, découverte à Gainford, dans le nord de l’Angleterre, est abritée à la cathédrale de Durham54.
Pierre de Snaptun
La pierre de Snaptun porte une représentation probable de Loki.
Au printemps 1950, une pierre plate semi-circulaire portant, gravé un visage moustachu, fut retrouvée sur une plage proche de Snaptun, au Danemark. Les gravures de la pierre, une stéatite de Norvège ou de Suède, ont été datées aux environs de l’an Mil. Le personnage moustachu fut identifié grâce aux cicatrices figurant sur ses lèvres, en référence à un conte du Skáldskaparmál, une section de l’Edda poétique, où les fils d’Ivaldi, des nains, cousent ensemble les lèvres de Loki55.
La pierre de Snaptun est une pierre d’âtre ; le museau du soufflet se plaçait dans le trou situé à l’avant de la pierre, et l’air produit par le soufflet poussait la flamme à travers l’orifice supérieur. La pierre protégeait ainsi le soufflet de la chaleur du feu et d’une exposition directe aux flammes. D’après Hans Jørgen Madsen, la pierre de Snaptun est « la plus belle pierre d’âtre ouvragée connue ». La pierre, qui pourrait suggérer une connexion entre Loki et la forge ou les flammes, est aujourd’hui exposée au musée Moesgård, près d’Århus au Danemark55.
Théories
Loki est une divinité complexe qui se laisse difficilement ramener à un seul élément explicatif. Si les philologues du XIXe siècle sont enclins à mettre en avant des explications naturalistes aux nombreuses indications notamment folkloriques d’une divinité du feu, Jan de Vries propose une théorie de « trickster » (de fourbe, d’escroc), puis Georges Dumézil, tout en rappelant les éléments naturalistes, préfère mettre en avant un type psychologique « mal né contestataire ». Pour Rudolf Simek, il s’agit de « la figure la plus complexe, mais aussi la plus négative du panthéon germanique »56. Jean Haudry avance que la mythologie de Loki ne peut être comprise que par la duplicité fondamentale du feu, puis de l’image héritée de la « parole de feu » car la parole elle-même est ambiguë, ce qui explique son rôle de satiriste, puis finalement de messager, d’être en marge qui peut tromper et persifler.
Éléments naturalistes
Des spécialistes ont longtemps cherché une fonction pour Loki, et Jacob Grimm en a fait un dieu du feu, ce qui a été repris par plusieurs spécialistes, le feu étant comme Loki ; ambivalent, bénéfique ou destructeur. Cette association est également issue de la proximité linguistique avec le mot logi (« feu »). Mais les mythes n’associent pas particulièrement Loki à un élément. Georges Dumézil note tout de même que le feu est parfois associé à Loki dans les proverbes et expressions qui ont survécu à l’époque moderne. Le vent est également parfois associé à Loki, et un de ses autres noms, Lopt, signifie « air » en vieux norrois57.
Sophus Bugge estime en 1888 que Loki est dérivé de Lucifer (« Luki-fer ») de la mythologie chrétienne, une théorie qui n’est plus acceptée aujourd’hui. En revanche, il n’est pas exclu que Loki ait été assimilé au diable par les populations nordiques christianisées. Le diable est, selon son nom grec, « celui qui divise », et la proximité de Loki avec le feu ne pouvait que favoriser ce rapprochement58.
Rudolf Simek estime que Loki n’a rien à voir avec le feu, ni avec aucun autre élément59.
Le mal né contestataire
Dans sa monographie de Loki (1933), Jan de Vries propose une nouvelle théorie qui présente le dieu nordique comme un trickster, un fripon fourbe et parfois dangereux. Georges Dumézil, dans son ouvrage Loki (1948, 1986), développe largement cette interprétation psychologique et sociale, présentant Loki comme un de ces « êtres « en marge », de naissance inférieure, traités en inférieurs, incomplètement adoptés par la société et se détachant eux-mêmes de la société »60. Il avance également que cette figure est une figure héritée de la période commune proto-indo-européenne et trouve des équivalents en termes de personnalité dans le farceur semi-divin Syrdon de la mythologie ossète (et caucasienne en général) et le personnage irlandais Bricriu. En effet, comme Loki, Syrdon est indirectement responsable de la mort d’un personnage héroïque quasi-immortel en poussant un autre à l’acte, et s’est même métamorphosé en femme pour obtenir des informations sur le point faible de sa victime. Bricriu est, lui, un semeur de zizanie. Il établit ainsi un personnage divin de satiriste qui utilise une partie de ses dons « à ruser, à tromper, à intriguer, et aussi […] à persifler, à nuire, à haïr »61.
Dumézil reconnaît, néanmoins, l’importance des « vêtements naturalistes » de Loki, mais préfère les considérer comme symboliques.
Le feu de la parole-qualifiante
Dans son étude de Loki (1988), Jean Haudry affirme qu’il faut reconsidérer la présence du feu, « presque omniprésent dans sa mythologie »62 et amène une nouvelle comparaison avec le dieu du feu indien Agni, dont l’une des désignations est la « qualification des seigneurs »63. Cette qualification est, dès le départ, ambiguë, aussi bien louange que calomnie. La parole, pareille au feu, est caractérisée par sa duplicité fondamentale. Le feu passant constamment du monde des ténèbres à la lumière58, la parole peut être bienfaisante ou dangereuse. Loki, comme Agni, assume également un rôle de messager, d’éclaireur et de compagnon. Haudry reconstruit ainsi une notion héritée de « parole de feu » qui permet une réinterprétation de la mythologie du dieu nordique, tant dans ses aspects naturalistes, que dans le type de mal né contestaire, persifleur, dont l’apparition, dans les sociétés traditionnelles est particulièrement redoutée: la médisance et la satire pouvant avoir des effets destructeurs.
C’est en tant que personnage subversif, qui pousse les dieux au parjure, que Loki joue un rôle décisif dans le Ragnarök, car l’énonciation de la vérité, l’ordre moral, l’ordre social et l’ordre du monde sont homologues64. Il correspond alors au démon indien Kali, celui qui provoque le dernier âge du monde, le Kali Yuga65.
Une divinité complexe
Les auteurs de synthèses comme Régis Boyer ou Rudolf Simek préfèrent mettre en avant la complexité de la divinité. Boyer souligne son aspect « intelligent, mais amoral, aimant à faire le mal pour s’amuser », un « tissu de traits contradictoires »66.
Le mythe de la punition de Loki a également été comparé à ceux du Titan grec Prométhée (un voleur du feu), du géant Typhon et du géant du Caucase Amiran59.
Folklore et survivances modernes
Axel Olrik a publié deux articles dans la revue Danske Studier, l’un en 1908 et l’autre en 1909, regroupés sous le même titre de Loki i nyere Folkeoverlevering (« Survivances de Loki dans le folklore moderne »), où il note de nombreux proverbes, expressions et gestes rituels qui se référent à Loki, ainsi que des contes et récits populaires qui le mettent en scène, dans plusieurs pays et régions d’Europe du Nord ; les pays scandinaves, l’Islande, les Îles Féroé, l’Angleterre et les Shetland. Une ballade des Îles Féroé recueillie au XIXe siècle implique également Odin et Hœnir, et son caractère païen était tel qu’il était interdit de la raconter au moment de sa rédaction. La plupart des récits modernes mettent en scène un Loki malin voir cruel, parfois étourdi. Au XVIIIe siècle en Telemarken (sud de la Norvège), Lokje était un mauvais esprit parfois associé au diable67.
Des expressions incluent au Danemark « porter des lettres de Lokke » (mentir), en Norvège « Lokje bat ses enfants » (lorsqu’un feu pétille fort). Un proverbe islandais est « Loki et Thor marchent longtemps, les orages n’en finissent pas » (Leingi geingr Loki ok Þór, léttir ei hríðum). Certains termes modernes tirent leur étymologie de Loki. En Islande, Lokabrenna désigne la canicule, et Lokasjóðr (« bourse de Loki ») les plantes qu’on appelle ailleurs « monnaie de Judas »67.
En 1898, le clergyman Robt M. Kennley raconte que pendant son enfance en Lincolnshire (Angleterre), il apporta de la quinine a un enfant malade et observa sa grand-mère frapper un à un avec son marteau trois fers de cheval cloués au pied du lit de l’enfant et récitant67 :
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Dans les œuvres modernes
Opéras
C’est un personnage, sous la graphie « Loge », de L’Anneau du Nibelung de Richard Wagner : il est physiquement présent dans L’Or du Rhin, et Wotan l’invoque à la fin de La Walkyrie.
Littérature et bandes dessinées
Loki apparaît dans de nombreux romans de fantasy, dont Le masque de Loki (en) (1990) de Roger Zelazny, la trilogie Everworld (1999-2001) de Katherine Alice Applegate, American Gods (2001) de Neil Gaiman, et les séries Amos Daragon (2003-2007) de Bryan Perro et Arielle Queen (2006-) de Michel J. Lévesque
Loki est un personnage Marvel Comics (première apparition en 1949 dans Venus, no 6)68. C’est également le nom du héros du manga et de l’animé Matantei Loki Ragnarok (en) et de Fairy Tail. Il apparait aussi dans Thorgal dans les tomes 29 à 32. Il apparait également dans la bande-dessinée Mythos.
Dans la série de livres «Gaïg», de Dynah Psyché, Loki est un Pookah, c’est-à-dire un lutin des bois farceur.
Cinéma et télévision
Loki apparaît ou a inspiré des personnages dans de nombreuses œuvres de cinéma et de télévision69.
Dans le film The Mask (1994), le masque est censé être celui du dieu Loki, qui apparaît en personne dans la suite Le Fils du Mask (2005) où il est interprété par Alan Cumming. Loki est également un ange de la mort interprété par Matt Damon dans le film Dogma (1999). Le personnage Marvel Comics Loki est interprété par Tom Hiddleston dans le film Thor (2011) ainsi que dans The Avengers (2012) et Thor : Le Monde des ténèbres (2013).
Dans la série de science-fiction Stargate SG-1 (1997-2007), Loki est un extra-terrestre de la race des Asgards, antagoniste des autres Asgards.
Dans la série fantastique Supernatural, Saison 5, épisode 19 : Une réunion de dieux païens à laquelle le dieu Loki est présent (il s’avérera que ce n’était qu’un usurpateur qui utilisait la ruse et la métamorphose pour se faire passer pour tel).
Dans la deuxième saison de Lost Girl, Bo apprend par Ryan (une Fée de l’Ombre) qu’il est un Loki[Quoi ?].
Jeux vidéo
Loki est régulièrement référencé dans les jeux vidéo, où il apparait sous différentes graphies soit en tant que véritable dieu nordique, soit en tant que personnage ou unité inventé qui porte son nom et s’inspire de sa nature. Parmi ces jeux on compte Valkyrie Profile (1999), Rune (2000), Age of Mythology (2002), World of Warcraft (2004), Loki (2007), Too Human (2008), StarCraft II (2010), The Binding of Isaac (2011), Divina (2012) et SMITE (2014)
Annexes
Notes
- ↑ Dans l’Edda traduite en français par Dillmann (1991) Loki apparait dans les chapitres 1, 4, 5 et 6. La numérotation des chapitres y est différente que dans la version originale car sa traduction n’inclut que les principaux passages en prose. Nous préciserons dans le corps de l’article par le moyen de notes le numéro de chapitre correspondant de la traduction de Dillman.
- ↑ Dans les poèmes eddiques Lokasenna 6, 19, Hyndluljóð 41, Fjölsvinnsmál 26, les poèmes scaldiques Haustlöng 8 et Þórsdrápa 1, et au chapitre 32 de la Gylfaginning
- ↑ Dans Völuspá 55 et Ynglingatal 32.
- ↑ « ráðbani » désigne celui qui tue par conseil9.
- ↑ La nature exacte de Laufey (géante ou déesse?) est incertaine.
- ↑ Dans l’Edda traduite par Dillmann (1991), ce passage est au chapitre 5.
- ↑ Dans l’Edda traduite par Dillmann (1991), ce passage est au chapitre 4.
- ↑ Dans l’Edda traduite par Dillmann (1991), ce passage est au chapitre 6.
- ↑ Dans la Völuspá, la völva se désigne à la troisième personne.
- ↑ « Hveralundr » pose problème, il pourrait signifier « arbre à chaudrons » ou « bosquet des sources chaudes »44.
Références
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- ↑ Jean Haudry, Loki, Naramsama, Nairyo.Sanha, le feu de la « parole-qualifiante » , Etudes Indo-européennes, p. 110-111 et p. 124-125, 1988
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- ↑ Certains spécialistes, dont Eugen Mogk, ont contesté le rôle de Loki dans le meurtre de Baldr. En effet, ce rôle n’est décrit précisément que chez Snorri Sturluson (Mogk considérait Snorri plus comme un créateur qu’un témoin de mythes nordiques), les poèmes eddiques étant évasifs selon eux, et la version fortement évhémériste du meurtre de Baldr par Höd dans la Gesta Danorum de Saxo Grammaticus ne mentionne même pas Loki. Georges Dumézil a toutefois défendu que le mythe tel qu’il est décrit par Snorri est bien un témoignage sérieux d’une des versions connues à l’époque. Il assure que les mentions évasives du meurtre de Baldr ne contestent pas le rôle de Loki, au contraire, et rajoute que la Gesta Danorum qui reproduit de nombreux autres mythes nordiques ne mentionne Loki nulle part, mais par contre Loki est remplacé dans sa fonction par un Gevarus qui conseille à Höd sur la manière de tuer l’invincible Baldr ( ref. Dumézil, 1986, p.102-117)
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- ↑ (en) « Loki » [archive], sur marvel.com (consulté le 29 août 2011)
- ↑ (en) « Loki (personnage) » [archive], sur IMDB (consulté le 30 août 2011)
Bibliographie
: publication utilisée pour la rédaction de cet article.Traductions annotées de sources primaires
- Régis Boyer, La Saga de Sigurdr ou la parole donnée, Les Éditions du Cerf, 1989, 292 p. (ISBN 2-204-03170-4)
- Régis Boyer, L’Edda Poétique, Fayard, 1992, 685 p. (ISBN 2-213-02725-0)
- Snorri Sturluson, L’Edda : traduit, introduit et annoté par François-Xavier Dillmann, Gallimard, 1991, 319 p. (ISBN 2-07-072114-0)
Études spécialisées
- Georges Dumézil, Loki, Paris, Flammarion, coll. « Nouvelle bibliothèque scientifique », 1986 (1re éd. 1948), 259 p. (ISBN 2-08-081342-0, présentation en ligne)
- Jean Haudry, « Loki, Naramsama, Nairyo.Sanha, le feu de la « parole-qualifiante » », Études Indo-européennes, 1988, p. 99-130
- Bernard Mezzadri, « Les brocards de Loki et la toile d’Arachné », Mètis. Anthropologie des mondes grecs anciens, vol. 13, no 13, 1998, p. 439-450 (lire en ligne)
- (da) Axel Olrik, « Loki i nyere Folkeoverlevering 1-2 », Danske Studier, 1908-1909
- (en) Jan de Vries, The problem of Loki, Folklore Fellow Communication 110, 1933
Études généralistes
- (en) Richard Bailey, « Scandinavian Myth on Viking-age Sculpture in England », Old Norse Myths, Litterature and Society, 2000, p. 15-23 (lire en ligne)
- Régis Boyer, Yggdrasill : La religion des anciens Scandinaves, Paris, Payot, 1992, 249 p. (ISBN 2-228-88469-3)
- Georges Dumézil, Mythes et dieux de la Scandinavie ancienne, Gallimard, 2000, 376 p. (ISBN 978-2070755868)
- Patrick Guelpa, Dieux & mythes nordiques, Septentrion, 2009, 265 p. (ISBN 978-2-7574-0120-0, lire en ligne)
- (en) Andy Orchard, Dictionary of Norse Myth and Legend, Cassell, 1997, 223 p. (ISBN 0-304-34520-2)
- (en) Rudolf Simek, Dictionary of Northern Mythology : Translated by Angela Hall, Cambridge, 2007, 424 p. (ISBN 978-0-85991-513-7)
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