Le meurtre de Patricia Bouchon, la joggeuse de Bouloc
REPLAY – Le 9 février dernier, après
quatre ans d’enquête infructueuse, un suspect a été mis en examen pour
l’homicide de Patricia Bouchon. C’est peut-être le premier pas vers la
résolution de ce crime mystérieux.
L’enquête vient en effet de connaître un important rebondissement
avec la mise en examen et l’incarcération, la semaine dernière, de
l’auteur présumé de cette assassinat qui a bouleversé toute la région il
y a 4 ans.
L’édito de Jacques Pradel
Crédit : Elodie Grégoire
Jacques Pradel
On s’approche peut-être de l’épilogue d’une enquête qui semblait dans l’impasse, malgré plus de 8.000 pièces de procédures, 1.500 personnes entendues, plus de 800 prélèvements ADN et une dizaine de suspects successifs mis en garde-à-vue. L’homme
qui vient d’être mis en examen avait été suspecté dès le début de
l’affaire mais laissé en liberté faute de preuves. Il est présenté comme
quelqu’un de fragile psychologiquement et le procureur de Toulouse
parle d’indices graves et concordants qui pèsent sur lui.
Nous revenons sur l’ensemble de l’affaire avec Patrick Isson, correspondant de RTL à Toulouse et Frédéric Abela de La Dépêche du Midi.
La fin d’une enquête hors du commun ?
L’enquête autour du meurtre de Patricia Bouchon, ce sont des
dizaines de policiers, et une cellule spéciale de la section de
recherche de Toulouse. En quatre ans, les enquêteurs ont procédé à des
centaines d’auditions, et à des dizaines de gardes à vue… Ce
meurtre incompréhensible a beaucoup touché la région: chaque année,
plusieurs centaines de personnes se rassemblent aux alentours du 14
février pour des marches en mémoire de cette mère de famille de 49 ans.
Ses enfants, son mari, et ses sœurs n’ont jamais baissé les bras, jamais
perdu espoir…Cependant aujourd’hui, même après la mise en examen de
Laurent Dejean, les gendarmes restent très prudents : il est
accusé « d’homicide volontaire » sur la base « d’indices graves et
concordants », mais aucune preuve sérieuse ne peut être à ce jour
retenue contre lui…
Un suspect fragile psychologiquement
La question principale qui se pose aujourd’hui est celle de
la santé mentale de Laurent Dejean. Il sera examiné par des experts
psychologues dans le courant de la semaine. Mais pour
l’instant, ses voisins et ses connaissances décrivent un homme gravement
perturbé, chômeur et toxicomane, qui a pour habitude d’errer, la nuit,
près de la zone où le corps de Patricia Bouchon a été retrouvé. Il a
déjà mentit aux enquêteurs au sujet de son véhicule, et a tenu des
propos étranges et décousus au sujet de la victime….
Nos invités
Frédéric Abela, journaliste à la Dépêche du Midi Patrick Isson, correspondant RTL à Toulouse, Me Hatoum, avocat de Laurent Dejean, et Me Juillard, avocat de la famille Bouchon
Vous pouvez à tout moment soumettre une affaire à
Jacques Pradel. Laissez votre message avec les principales informations
nécessaires à l’équipe de l’émission pour programmer, peut-être
prochainement, ce fait-divers dans L’Heure du Crime.
Les équipes d’identification à la recherche d’indices, , un jour
après la disparition de Patricia Bouchon (à gauche)/ DDM, Nathalie
Saint-Affre.
Reclus dans son modeste appartement, à Bouloc
et vivant d’une allocation adulte handicapé en raison de ses troubles
du comportement, Laurent Dejean, 35 ans, est officiellement accusé du
meurtre de Patricia Bouchon, la joggeuse tuée à Bouloc, au matin du 14
février 2011. Comme pour la famille de cette femme adepte de la course à
pied et secrétaire dans un cabinet d’avocats toulousain, il y a, pour
cet homme, que beaucoup de choses accableraient aujourd’hui, un avant et
un après février 2011.
Solitaire, artisan bien noté par ses patrons, Laurent Dejean fait
figure d’employé modèle comme plaquiste, dans cette commune qui l’a vu
grandir. Avant le meurtre, ce trentenaire célibataire, «impulsif et sans
histoire», fait des allées et venues entre son appartement, dans une
résidence bien tenue et la maison de sa mère, à la sortie du village
vers Fronton. C’est d’ailleurs sur cette route qu’il aurait pu croiser
la joggeuse. Il aurait été vu par un témoin à bord de sa Clio, jamais
retrouvée. Ponctuel, consciencieux, Laurent Dejean a des amis et une vie
sociale limitée, des plus ordinaires. C’est l’homme que l’on croise
sans vraiment regarder. Entretenant, peut-être, sa part de mystère.
Après le 14 février 2011, la face cachée du modeste plaquiste se
dévoile peu à peu. Et l’image de l’employé modèle se fissure
étrangement, loin des soupçons de ceux qui le côtoient. Quelques jours
après le meurtre, Laurent Dejean entame sa descente aux enfers. Les
premiers arrêts maladie atterrissent en cascade dans le bureau de son
employeur qui ne le reverra qu’une semaine. Interrogé par les gendarmes,
il explique qu’il s’était blessé à l’épaule. Il souffrait en réalité de
problèmes psychiatriques qui le conduisent, neuf jours après le meurtre
à consulter un spécialiste. Suivent de longues périodes d’absence et
une solide prise en charge psychiatrique. Laurent Dejean décroche. À
l’automne 2011, il est interné. Il suit un traitement lourd. Il est
coupé du monde et se fait oublier. Entre deux séjours dans les pavillons
psychiatriques, il revient à Bouloc mais n’est plus qu’une sorte de
fantôme errant dans les rues, multipliant les comportements troublants.
Il est vu en plein jour, sur son vélo, ou à pied lisant la Bible tout en
marchant. Ses accès de colère inquiètent ses proches. Parfois violent,
il se défoule contre des portes. Décrit comme «volcanique» et «sanguin»,
Laurent Dejean est une boule de nerfs cultivant parfois
l’autodestruction dans son rapport complexe à la mort. Happé pas ses
idées noires, il vit cloîtré chez lui, sous curatelle renforcée. Fin
2013, la diffusion publique du portrait-robot agit comme un déclic. À
Bouloc, les langues se délient à la vue de ce croquis représentant, a
priori, Monsieur-Tout-Le-Monde. Mais ils sont nombreux à reconnaître,
derrière ces traits anodins, le visage familier de Laurent Dejean,
guetté par l’amnésie. Comme si la diffusion officielle du portrait du
tueur avait libéré les consciences à un moment où le principal suspect,
isolé, poursuit son enfermement dans sa prison sociale et psychiatrique.
Dès lors, tout semble le désigner. Le fameux faisceau d’indices
accablerait cet homme au casier vierge qui a toujours nié le moindre
lien avec le meurtre. Placé en garde à vue en janvier et juin 2014, il
n’a jamais reconnu sa participation. Déni ? Amnésie ? Folie ? Quatre ans
après, cette nouvelle étape judiciaire pourrait lever le voile sur la
véritable personnalité de cet homme désormais accusé de meurtre.
Meurtre de Patricia Bouchon – Bouloc (31) – Reportage
Christian Faurie, l’ancien maire de Bouloc./Photo DDM Thierry Bordas
«Ce serait Laurent ? Super ils l’ont pris !» Hier matin, la nouvelle
de l’arrestation de Laurent Dejean n’a surpris personne dans le
voisinage immédiat de son petit appartement. Rama le côtoie depuis 2010.
«Il a changé du jour au lendemain après le meurtre, note celle qui,
parfois, lui apportait à manger. Il était dans son monde, j’ai commencé à
l’éviter. Il a pété les plombs, il disait que je faisais du vaudou
contre lui et il sonnait chez moi.» Comme tout le monde à Bouloc,
les voisins ont parlé du meurtre de Patricia Bouchon. «Il m’a dit que,
jamais, il n’aurait pu faire ça. Mais quand on m’a montré le
portrait-robot, j’ai tremblé.» Ses anciens employeurs, chez lesquels il a
travaillé deux ans, confirment : «Il parlait de cette affaire. Des
copains à lui avaient eu leur ADN prélevé. Il se sentait donc en lien
avec cette affaire mais voulait s’en éloigner. Après le meurtre, il a
repris une semaine puis s’est mis en arrêt.» Les enquêteurs leur ont
aussi présenté le portrait-robot : «Quand on cache la bouche, on a
l’impression de le voir en face.» Au travail, il ne faisait pas parler
de lui : «On l’a pris car il méritait de travailler. Il était vaillant
mais psychologiquement faible».
Laurent Dejean a grandi à Bouloc. L’ancien maire, Christian Faurie,
décrit «un enfant d’une famille ancienne boulocaine» qui a perdu tôt son
père maçon. «Il a fréquenté nos écoles. Mais c’est un jeune qui nous a
été signalé à plusieurs reprises en difficulté.» Afin de l’aider, «je
l’ai employé au sein d’un chantier d’insertion au syndicat
intercommunal. Les personnes y sont encadrées pour réaliser des travaux.
Ça se concrétise par des stages. Lui s’était orienté vers le montage de
cloisons.» À cette période, Laurent Dejean vit chez sa mère. «J’avais
été alerté par un membre de la famille car il était un peu violent avec
sa mère et qu’il lui prélevait de l’argent. On a fini par lui trouver un
logement social sur la commune. C’était à peu près au moment de
l’affaire.»
Dans son nouveau quartier, il se fait vite remarquer : «Il avait un
comportement particulier. Il faisait des déclarations le soir fort sur
son balcon, c’était des incantations. Les gens commençaient à être
inquiets. On a pris une mesure d’internement d’office. Ça a été
laborieux. Il s’est échappé en sautant par le balcon. Il est resté
plusieurs semaines à l’hôpital.»
Après cet épisode, le maire a recroisé Laurent Dejean : «Il m’a
remercié et m’a dit qu’il se sentait mieux.» Idem avec ses voisines :
«Quand il sortait de l’hôpital, il s’excusait.» La nuit de l’agression
de Patricia Bouchon, les voisins de l’impasse avaient entendu un homme
s’excuser.
Joggeuse de Bouloc : l’arrestation du suspect est aussi un pari
Publié le 11/02/2015 à 07:48
Meurtre de Patricia Bouchon – Bouloc (31) – Enquête
Lors de sa conférence de presse lundi, le procureur
Pierre-YvesCouilleau a répondu à tous les médias. Cette communication
peut-elle entraîner de nouveaux témoignages ?/Photo DDM, Michel Labonne
La mise en examen et l’incarcération d’un suspect, lundi, dans la mort de Patricia Bouchon en 2011, à Bouloc
en Haute-Garonne, ressemble à un pari. La suspicion, même appuyée sur
des indices «graves et (ou) concordants», ne fait pas les preuves mais
Laurent Dejean dort désormais en prison. L’homme qui était soupçonné
depuis plus d’un an par les enquêteurs de la gendarmerie nationale, a
été mis en examen lundi pour «homicide volontaire». Il est
officiellement mis en cause dans la mort de Patricia Bouchon, disparu le
14 février 2011 alors qu’elle effectuait un jogging à Bouloc, en
Haute-Garonne. Son corps a été retrouvé six semaines plus tard,
dissimulé sous un pont à Villematier, à 12 kilomètres du chemin de terre
où cette femme avait été violemment agressée.
Ses avocats, Mes Hatoum et Darribère ont beau dénoncer un dossier
«sans charge réelle», leur client dort en prison. Va-t-il le supporter,
lui déjà décrit comme psychologiquement «instable» ? Cet enfermement le
poussera-t-il à aller au-delà de ses déclarations déjà enregistrées dans
le cadre de ses deux gardes à vue, en janvier et en juin ? Ou se
renfermera-t-il à nouveau, privant les juges d’instruction, et les
enquêteurs, d’un nouveau fil à exploiter ? Quand, après la diffusion du
portrait-robot, le profil de Laurent Dejean s’est peu à peu imposé comme
une nouvelle hypothèse sérieuse — plus de 50 ont été traitées depuis
quatre ans -, les gendarmes de la section recherches de Toulouse ont
redoublé vérifications, investigations, recherches après la première
garde à vue, en janvier 2014. Objectif : retrouver cette fameuse Renault
Clio, aperçue par un témoin la nuit de l’agression et que Laurent
Dejean est soupçonné d’avoir conduite. Lui, pourtant, affirme le
contraire. Il refuse obstinément tout lien avec ce véhicule même si les
investigations des gendarmes ont permis de recueillir de nombreux
témoignages, une vingtaine, liant ce véhicule et leur suspect.
Pendant l’été, après le deuxième passage en garde à vue début juin
qui n’a pas permis de progression particulière, le Frontennais a été
scruté dans tous les sens. «Nous avons sondé, survolé, inspecté lacs,
rivières et retenues d’eau», résume le colonel Éric Matyn, patron de la
section de recherches. Sans succès. Si elle existe vraiment — pas un
gendarme de la cellule n’en doute — où se trouve cette Renault Clio ? La
mise en examen du suspect, objet de multiples articles et reportages,
peut-elle déclencher des souvenirs chez de nouveaux témoins ? Quatre ans
après, le pari paraît ambitieux. C’est vite oublier le choc d’octobre
2013 et la publication du portrait-robot. Beaucoup de proches de
l’ancien plaquiste ont soudain réalisé le lien possible entre Laurent
Dejean et l’homme crayonné à partir des souvenirs d’un
chauffeur-livreur. Dans cette affaire, les enquêteurs n’ont pas eu
beaucoup de chance — Patricia Bouchon encore moins. Quatre ans après, le
processus peut-il s’inverser ? Cela aussi motive le pari pris de
concert par les gendarmes, le parquet et les juges d’instruction.
Que reste-t-il de l’ADN retrouvé sur le corps ?
Pendant des semaines, après la disparition de Patricia Bouchon, les
gendarmes ont fouillé Bouloc et ses environs. Finalement, c’est en
cherchant un chien égaré qu’un chasseur a découvert le corps de cette
mère de famille, flottant sous un petit pont à Villematier (notre photo
DDM).
Les spécialistes de l’IRCGN, l’Institut de recherche criminelle de la
gendarmerie nationale, ont passé 48 heures à réaliser méthodiquement
des prélèvements sur la scène de crime. Un travail laborieux mais, au
final, trois ADN ont été révélés. L’un d’eux a longtemps intéressé les
enquêteurs. En effet, il a été retrouvé sur le bras de Patricia Bouchon,
entre le coude et l’épaule. Comme si une main avait tenu la joggeuse
lors d’une altercation.
Cet élément technique a, entre autres, permis d’écarter la
responsabilité d’un illuminé qui s’était présenté en juin 2012 à la
gendarmerie de Vielmur-sur-Agout comme le «tueur de Bouloc». Un Tarnais
qui, en réalité, ne savait même pas où se situait cette petite commune
sur la carte de la Haute-Garonne.
Quatre ans après la nuit du 14 février 2011, l’ADN n’a pas du tout
été évoqué par le procureur Couilleau, pourtant très précis sur les
indices «graves et, ou, concordants» qui ont motivé le placement sous
mandat de dépôt du suspect. En réalité cet ADN, qualifié parfois reine
des preuves, constitue aussi un piège. En l’occurrence, celui retrouvé
sur les vêtements de Patricia est partiel ce qui rend son utilisation
compliquée. Et il peut également s’agir d’un ADN de contact, «apporté»
par exemple par un gant porté par l’agresseur mais qui aurait touché une
autre personne. Cette possibilité évite d’établir un lien entre l’ADN
et Laurent Dejean…
Affaire Patricia Bouchon: le suspect a été conduit sur le lieu supposé du crime de la joggeuse de Bouloc
Mardi soir à 19h15, les enquêteurs ont procédé à la « mise en
situation » du suspect sur le petit chemin supposé être le lieu du crime
de Patricia Bouchon.
Les enquêteurs vont tenter d’analyser les réactions de l’homme mis en examen il y a quelques jours.
Par Michel Pech
Publié le 17/02/2015 | 20:49, mis à jour le 18/02/2015 | 16:20
C’est à la nuit tombée, vers 19h15, que les enquêteurs ont débuté
cette « mise en situation, à la demande du juge d’instruction » et en
présence du procureur de la République de Toulouse.
Cette mise en situation est une pratique usitée parfois par les
enquêteurs qui essaient de faire réagir le suspect, et cela dans le
cadre de l’instruction.
La presse était maintenue à bonne distance du chemin en gravier où des
traces de sang et de pneus avaient été relevées il y a quatre an.
La Clio blanche
Nos journalistes sur place ont pu noter la présence d’une voiture Clio blanche, une voiture qui a son importance.
En effet, parmi les indices « concordants » relevés par le procureur,
figure notamment le fait que le suspect a été reconnu par un témoin sur
portrait-robot et qu’il a toujours nié avoir eu une Clio claire, comme
celle signalée, alors que de nombreuses personnes de son entourage
l’associent à cette voiture.
Le suspect a toujours nié
L’homme qui réside à Bouloc est célibataire. Il n’a jamais été arrêté
mais faisait l’objet depuis un an d’une surveillance particulière des
enquêteurs. Selon nos informations, il correspond au portrait-robot
diffusé en 2013.
Rappel des faits
Le 14 février 2011, Patricia Bouchon, 49 ans, secrétaire dans un cabinet
d’avocats toulousains et mère de famille, était partie vers 04H30 faire
son jogging autour de Bouloc, à 25 km au nord de Toulouse.
Son corps avait été retrouvé un mois et demi après, vertèbres et crâne
enfoncés, un gant en latex enfoncé dans la gorge. Son meurtrier avait
aussi essayé de l’étrangler mais aucun abus sexuel n’avait pu être mis
en évidence.
Vidéo : le reportage d’Emmanuel Wat, Delphine Gérard et Denis Hémardinquer
Meurtre de la joggeuse de Bouloc : le suspect conduit sur les lieux du crime
Publié le 18/02/2015 à 07:29, Mis à jour le 18/02/2015 à 10:15
Meurtre de Patricia Bouchon – Bouloc (31) – Haute-Garonne
Hier soir, à l’entrée du chemin où Patricia Bouchon avait été agressée. / Photo DDM, Michel Labonne
Une mise en situation de l’homme suspecté d’avoir tué Patricia Bouchon, la joggeuse de Bouloc, le 14 février 2011, a eu lieu hier. Il a été conduit sur les lieux de l’agression.
Une Clio blanche à l’entrée d’un petit chemin privé à la sortie de
Bouloc dans la nuit froide de février. Hier soir, à partir de 19 heures,
les enquêteurs de la section de recherches de Toulouse, accompagnés du
juge d’instruction Fabrice Rives et du procureur de la République de
Toulouse, Pierre-Yves Couilleau, ont procédé à une mise en situation du
meurtrier présumé de Patricia Bouchon, la joggeuse tuée le 14 février
2011 à Bouloc.
Laurent Dejean, 35 ans, mis en examen pour homicide volontaire la
semaine dernière et écroué dans la foulée a été extrait de sa cellule et
transporté sur les lieux de la violente agression. Une mise en
situation rapide décidée dès la mise en examen du suspect.
Dans quel but ? Essayer de provoquer un déclic chez cet homme qui,
lors des deux gardes à vue qu’il a subies, en janvier et juin 2014,
puis, lorsqu’il était face au juge d’instruction, la semaine dernière, a
toujours nié sa participation au meurtre.
Hier, le suspect a d’abord été conduit à la gendarmerie de Fronton.
Avant son arrivée à Bouloc, sur les lieux du drame, les gendarmes ont
minutieusement marqué chaque endroit où des indices avaient été
retrouvés à l’époque.
Les indices matérialisés
Traces de pneu dans l’herbe, chouchou, boucle d’oreille de Patricia
Bouchon et enfin l’importante flaque de sang, au fond du chemin ont
ainsi été matérialisés et le scénario de l’agression envisagé. Une
Renault Clio, du type de celle que conduisait l’agresseur décrit par un
témoin, a été transportée sur les lieux. Pendant plus de deux heures,
soutenu par ses avocats, Mes Darribère et Hatoum, Laurent Dejean a
écouté. À Bouloc, la circulation a été coupée et un important dispositif
de gendarmes a bouclé le secteur.
Peu avant 22 heures, le cortège s’est de nouveau ébranlé, cette fois
en direction de Villematier à 12 kilomètres de là, au niveau d’un petit
pont sous la route dans lequel le corps de Patricia Bouchon avait été
retrouvé par hasard six semaines plus tard.
Hier soir, à l’heure où nous écrivions ces lignes, rien n’avait filtré du comportement du suspect.
En quelques dates
Lundi 14 février 2011 vers 4 h 30, comme chaque jour, Patricia Bouchon, 49 ans, part faire son jogging. Elle ne rentrera jamais.
Mardi 15 février des traces de sang sont retrouvées dans une impasse à la sortie de Bouloc. Un chouchou et une boucle d’oreille également.
29 mars, découverte du corps à Villematier.
Octobre 2011, Laurent Dejean est entendu pour la première fois.
Octobre 2013, diffusion du portrait-robot.
Janvier puis juin 2014, le suspect est placé en garde à vue.
Lundi 9 février 2015, Laurent Dejean est interpellé, mis en examen et placé en détention.
Publié le 19/02/2015 à 07:56, Mis à jour le 19/02/2015 à 10:22
Meurtre de Patricia Bouchon – Bouloc (31)
Mardi soir, les lieux du crime ont été matérialisés./Photo DDM Michel Labonne
La mise en situation, mardi soir, à Bouloc
n’a pas déclenché de réaction chez le suspect n°1 qui a continué de
clamer son innoncence dans le meurtre, en 2011, de Patricia Bouchon.
«Il n’y a pas eu d’avancée notable, notre client se dit toujours
étranger aux faits.» Les avocats de Laurent Dejean, 35 ans, l’homme
suspecté du meurtre de Patricia Bouchon, le 14 février 2011 à Bouloc (nos éditions précédentes)
n’ont pas noté de différences, mardi soir, dans le comportement de leur
client, pourtant transporté sur les lieux du crime à la demande du juge
d’instruction.
Pour Mes Darribère et Hatoum, cette mise en situation n’a pas fait
avancer les choses. «Notre client a été très coopératif, décrit Me
Hatoum. Mais il n’y a pas eu de changement de position de sa part.»
Il clame son innocence
De 19 heures à 1 heure du matin, enquêteurs, magistrats et défense, ont reproduit et suivi le parcours du meurtrier présumé (notre édition d’hier),
du petit chemin à la sortie de Bouloc où la joggeuse avait été agressée
et tuée, jusqu’à Villematier et ce pont sous la route principale où le
corps de la victime avait été retrouvé six semaines plus tard.
C’est à la nuit tombée, dans les conditions dans lesquelles Patricia
Bouchon avait été agressée le 14 février 2011 que tout a débuté,
derrière un large périmètre de sécurité. «Nous avons visité tous les
lieux. Notre client est resté sur sa position. Il continuait de clamer
son innocence.»
L’instruction va se poursuivre avec de nouvelles étapes. Le suspect devrait ainsi être auditionné à plusieurs reprises.
Laurent Dejean, un Boulocain de 35 ans, avait été interpellé le lundi
9 février au domicile d’un ami à Fronton. Il avait été immédiatement
présenté au juge d’instruction, mis en examen pour homicide volontaire
et placé en détention.
En janvier et juin 2014, il avait déjà été placé à deux reprises en
garde à vue et relâché à chaque fois, faute d’aveux et de preuves.
Meurtre de la joggeuse : le témoin capital reconnaît le suspect
Publié le 20/02/2015 à 07:45, Mis à jour le 20/02/2015 à 10:15
Meurtre de Patricia Bouchon – Bouloc (31)
La Clio, lors de la mise en situation mardi./Photo DDM Michel Labonne
Laurent Dejean, le suspect du meurtre de la joggeuse de Bouloc, a été confronté, mardi soir, lors de sa mise en situation sur les lieux du crime (nos éditions précédentes),
à l’auteur du portrait-robot diffusé en octobre 2013 par les enquêteurs
de la section de recherches de la gendarmerie de Toulouse. Selon nos
informations, ce chauffeur livreur a formellement reconnu celui qu’il
avait croisé cette nuit du 14 février 2011, jour de l’agression de
Patricia Bouchon.
Mardi soir, la mise en situation a consisté à recréer, dans les
conditions de l’époque, la scène de crime et ses à-côtés dont la
rencontre entre les deux hommes. Cette nuit-là, cet homme avait croisé
une Renault Clio à proximité immédiate du petit chemin. Il roulait vers
Fronton lorsqu’il a aperçu une femme qui faisait son jogging face à lui,
sur le côté gauche de la chaussée, à la sortie de Bouloc.
Quelques instants plus tard, il a dû freiner brutalement. Une
voiture, une Clio «grise ou claire» était en arrêt au milieu de la
route, tous feux éteints. Grâce à la lumière de ses propres phares, il a
pu distinguer le conducteur, un homme d’une trentaine d’années, mal
rasé, qui portait un bonnet. Lorsqu’il s’est présenté à la gendarmerie
après avoir appris la disparition de Patricia Bouchon, il a pu établir
un portrait-robot de l’homme. Ce témoignage capital fait aujourd’hui
partie des indices qui ont mené à la mise en examen de Laurent Dejean.
Pourtant, le dessin n’a été diffusé qu’en octobre 2013, près de trois
ans après les faits, à la demande insistante de la famille de la
victime. À partir de là, les langues se sont déliées et Laurent Dejean a
été placé en garde à vue à deux reprises, en janvier puis juin 2014.
La confrontation des deux hommes, dans les conditions de leur
rencontre, n’a pas infléchi le récit du témoin qui a reconnu l’homme
qu’il avait croisé.
Placé en détention provisoire depuis le 9 février, l’homme continue
de nier les faits. Toxicomane, psychotique et violent, il doit toutefois
faire face à un nombre important d’indices permettant de douter de sa
version des faits. Il vient notamment d’être reconnu par un témoin-clé
de l’affaire.
Il est celui que tout désigne mais que rien n’accable. Déjà deux fois
mis en garde à vue dans le cadre de l’enquête sur le meurtre d’une
joggeuse en février 2011 à Bouloc, près de Toulouse, Laurent a été
relâché autant de fois faute d’élément. Cette fois ci, le suspect a été mis en examen et placé en détention provisoire depuis le 9 février dernier,
sur la base «d’ indices graves et concordants» selon l’expression du
procureur de la République. Ce dernier a toutefois reconnu ne pas avoir
de preuve formelle de sa culpabilité.
Laurent est donc officiellement soupçonné d’être l’auteur du meurtre de Patricia Bouchon,
qui avait l’habitude d’aller courir tous les matins à l’aube. Le 14
février 2011, elle n’est jamais revenue de sa course. Son corps avait
été retrouvé un mois et demi après, vertèbres et crâne enfoncés, un gant
en latex enfoncé dans la gorge. Son meurtrier avait aussi essayé de
l’étrangler mais aucun abus sexuel n’avait pu être mis en évidence.
Laurent, 35 ans, est un artisan du bâtiment, vivant à Bouloc comme Patricia. Selon les informations de La Dépêche,
parmi les indices étudiés par les enquêteurs, figure son changement
drastique de comportement après le meurtre de la mère de famille. Si
Laurent a toujours vécu légèrement à la marge de la société à cause de
troubles psychologiques, ces derniers se seraient largement accentués
dans les semaines suivant le meurtre. Il est aujourd’hui considéré comme
«psychotique» par les enquêteurs. Juste après les faits, l’homme
enchaîne les arrêts maladie, ne se présente plus que pendant une semaine
à son travail, lui qui était jusqu’alors apprécié par ses patrons. A un
ami, il glisse «si j’étais impliqué dans cette histoire je me serais
fait enfermer chez les fous», avant d’être effectivement placé en
hôpital psychiatrique à l’automne 2011. La presse locale le décrit alors comme un fantôme,
qui, lors de ses retours à Bouloc erre dans les rues, récitant des
passages de la Bible à haute voix. Il lui arrive d’avoir des accès de
violence et de frapper les murs, les portes. Aujourd’hui encore, l’homme
avale chaque jour une forte dose de médicaments. Selon le parquet,
Laurent a longtemps été adepte des «paradis artificiels», pour les
désigner joliment.
Laurent reconnu par le témoin-clef
C’est à la fin de l’année 2013 qu’il entre dans le collimateur des
enquêteurs. Un portrait robot du tueur est diffusé dans la presse locale
et de nombreux témoins y reconnaissent Laurent. Placé en garde à vue en
janvier 2014, il nie sa participation, mais tient des propos
intrigants. «J’ai fait mon deuil pour Patricia Bouchon, je n’y pense
plus», a-t-il ainsi confié avant d’embrasser une photo de la victime.
Mais aussi: «C’est vrai que j’ai dit à mon travail que je me sentais
responsable de cette affaire» ou «je n’ai aucun remords de cette
affaire, je la connaissais à peine». Autre élément à charge, un témoin
qui a croisé Patricia Bouchon dans les minutes précédent sa mort assure
avoir aperçu une Clio claire aux sièges rabattus au même moment. Or, 24
personnes au total ont indiqué aux enquêteurs que Laurent avait une Clio
blanche et neuf d’entre elles ont précisé qu’il avait pour habitude de
rabattre les sièges. Lui assure ne plus savoir où est sa voiture. Il a
même été reconnu, selon La Dépêche, par un témoin-clé de l’affaire lors d’une confrontation.
Reste aux enquêteurs à passer des indices aux preuves. Le suspect a
ainsi été conduit mardi soir sur les lieux drames pour «une mise en
situation», dans l’espoir de provoquer un déclic chez Laurent. Ce
dernier n’a rien laissé filtré.
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