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mardi 6 août 2019
Le procureur de Nice bientôt muté
Quels que soient les problèmes que pose un magistrat, la solution
envisagée par son administration n’est quasiment toujours, au mieux,
qu’une simple mutation…
Jean-Michel Prêtre à Nice, en janvier 2017. Photo Valery Hache. AFP
Selon nos informations, Jean-Michel Prêtre sera proposé au poste
d’avocat général près la cour d’appel de Lyon par la chancellerie. Cette
nomination sera examinée par le Conseil supérieur de la magistrature en
septembre.
Le procureur de Nice va être muté
Le dernier faux pas du procureur de la République de Nice aura signé
la fin de sa carrière à la tête de ce parquet. Selon nos informations,
Jean-Michel Prêtre, 61 ans, va être muté à Lyon, où il deviendra avocat
général près la cour d’appel. Cette proposition devrait être examinée
par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) début septembre.
Autrement dit, il s’agirait d’une rétrogradation puisqu’il ne sera plus à
la tête d’un parquet, mais désormais soumis aux ordres d’un procureur
général. «Sa position était intenable», glisse une source proche du dossier.
Dans le cadre de l’affaire Geneviève Legay (cette septuagénaire
blessée lors d’une charge policière pendant une manifestation interdite
des gilets jaunes le 23 mars), Jean-Michel Prêtre avait initialement
dédouané les forces de l’ordre. Avant d’être obligé de reconnaître leur
implication : «Au regard des images extrêmement détaillées, on peut dire d’une manière certaine que le policier a bien poussé Mme Legay.» Lors
d’une audition, en avril, menée par Robert Gelli, le procureur général
d’Aix-en-Provence (demandée par le directeur des services judiciaires),
le magistrat a avoué avoir menti. Et a avancé une explication
déconcertante de franchise, qui s’est retrouvée dans la presse le
24 juillet, après que le Monde l’a révélée : il ne voulait pas
mettre le chef de l’Etat dans l’embarras puisque ce dernier affirmait
que la manifestante n’avait pas été touchée par la police. Quelques
heures avant la conférence de presse du parquet, Emmanuel Macron avait
en effet enjoint Geneviève Legay à faire preuve «d’une forme de sagesse» à l’avenir.
Restaurer l’image de l’institution
De sa propre initiative, Jean-Michel Prêtre aurait donc transformé
les déclarations présidentielles en une vérité judiciaire. Avant d’être
obligé de rétropédaler publiquement. Ce n’est pas tout : il avait confié
l’enquête à la concubine du commissaire qui sera mis en cause… En
juillet, le ministère de la Justice s’était contenté d’une brève
assertion : Jean-Michel Prêtre «est totalement indépendant, et décide souverainement de la communication qu’il souhaite mener dans chaque affaire».
Aucune poursuite disciplinaire n’avait alors été engagée, mais la
chancellerie n’a visiblement pas passé l’éponge sur la communication
trop zélée du magistrat. Il écope aujourd’hui d’une «mutation dans l’intérêt du service». Contacté par Libération,
le ministère de la Justice se refuse à tout commentaire. On imagine
volontiers que c’est pour restaurer l’image de l’institution, et contrer
toute suspicion dans les enquêtes à venir que Jean-Michel Prêtre,
procureur de Nice depuis 2015 (après être passé par le parquet
d’Aix-en-Provence, de Pointe-à-Pitre ou de Vesoul), est prié de faire
ses valises.
Durant quatre ans, à Nice, il aura eu à connaître plusieurs dossiers
emblématiques comme l’affaire Omar Raddad, dont il prononcera
l’épilogue : «Pour moi l’affaire est finie.» Ou encore
l’attentat du 14 juillet 2016 sur la promenade des Anglais, qui a fait
86 morts et une centaine de blessés. Chargé des premières investigations
sur le dispositif de sécurité, il a très vite – trop vite, lui
reprochera-t-on – classé l’enquête pour mise en danger de la vie
d’autrui.
Les controverses ou critiques autour de Jean-Michel Prêtre ne sont pas récentes. Mediapart
révélait qu’en 2009, alors qu’il était en poste en Guadeloupe, il a été
soupçonné d’avoir fait de fausses déclarations au sujet d’une
perquisition survenue dans une enquête sur le meurtre d’un syndicaliste.
Et ce, juste après avoir annoncé l’identité d’un premier suspect (qui
sera innocenté). Le site rappelait également cet épisode : en 2018, son
bureau et son domicile ont été perquisitionnés dans l’affaire de la
succession de l’hôtel Negresco. Les enquêteurs cherchaient à savoir quel
rôle il avait pu jouer dans cette transaction de plusieurs millions
d’euros, et s’il avait pu favoriser un repreneur en saisissant le
tribunal de commerce. L’enquête est toujours en cours. Contacté par Libération, Jean-Michel Prêtre n’était pas joignable dans l’immédiat.
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