Et voilà, excellemment conseillé par l’ancien procureur de Quimper Thierry Lescouarc’h, sur lequel pèsent de très gros soupçons de corruption au moins durant l’exercice de ses fonctions dans le Finistère de 2014 à 2020, Eric Dupond-Moretti vient de se voir signifier sa mise en examen pour prise illégale d’intérêts.
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Éric Dupond-Moretti: une audition sur des charbons ardents
Le garde des Sceaux est convoqué ce vendredi devant les juges de la Cour de justice de la République pour conflit d’intérêts.
«Je ne vois pas pourquoi la Commission de l’instruction se priverait de mettre Éric Dupond-Moretti sur le gril toute la journée. Ne s’est-elle pas offert le luxe d’entendre le premier ministre Jean Castex, toute une demi-journée?» Pour ce bon connaisseur de la vie judiciaire, Éric Dupond-Moretti n’a pas fini de souffrir devant les juges de la Cour de justice de la République (CJR) qui l’a convoqué ce vendredi, à 9 heures précises, en vue d’une mise en examen.
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Le garde des Sceaux, soupçonné d’avoir voulu régler des comptes à propos de dossiers dans lequel il était impliqué comme avocat, sera accompagné de ses trois avocats – Olivier Cousi, Christophe Ingrain et Rémi Lorrain – pour affronter les trois juges de cette commission. La confrontation risque d’être d’autant plus électrique que les principaux protagonistes se connaissent fort bien. Entre eux, quelques procès d’assises aux incidents d’audience musclés, que les deux hauts magistrats, Janine Dray et Catherine Schneider, n’ont sans doute pas oubliés. Un temps, la rumeur a d’ailleurs couru que ces dernières pourraient même se déporter à cause de ce lourd passif. «C’est absurde», souligne cette source judiciaire, un brin agacée. «Il n’y aurait aucun sens de se déporter d’une audience et pas de l’instruction dans son ensemble». La surprise du chef serait la présence du parquet général à cette première comparution. La Cour de justice de la République ne dérogeant pas au droit commun de la procédure pénale, rien n’empêche François Molins, ou l’avocat général Philippe Lagauche, d’être présent. «Cela arrive une fois sur deux cent cinquante», soupire, un peu las, ce magistrat de la Cour de cassation qui n’imagine pas une seconde une telle provocation.
Une requête en nullité
La défense du ministre, tient en trois points: Éric Dupond-Moretti martèlera qu’il n’a fait que reprendre des dossiers lancés par son prédécesseur, Nicole Belloubet, et que suivre l’avis de son administration – laquelle incluait l’avis du procureur général, François Molins. Il devrait également insister sur le fait qu’une enquête administrative n’est pas une sanction disciplinaire et que le décret de déport de ses fonctions vers le premier ministre a précédé toute décision de poursuite disciplinaire.
La défense ne manquera pas de renvoyer à l’envoyeur l’accusation de conflit d’intérêts. Outre la spectaculaire mise en cause de François Molins, l’Union syndicale des magistrats, l’un des syndicats de magistrats à avoir porté plainte, a aussi été parti pris en assistant plusieurs magistrats dans les deux affaires qui valent aujourd’hui à Éric Dupond-Moretti d’être mis en cause.
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«Jamais un ministre étant passé devant la commission d’instruction de la CJR n’en est sorti sans être mis en examen. Et là, on sent bien que c’est ce que veulent les juges, il n’y a qu’à voir comment toute la procédure a été montée à l’envers», souligne-t-on dans l’entourage du ministre. Ce dernier point devrait servir de base à la requête en nullité de mise en examen, pour défaut d’indices graves et concordants. La défense commencera par soulever le fait que le garde des Sceaux a été convoqué par ses juges alors que la perquisition n’avait pas encore eu lieu à la Chancellerie et qu’un autre témoin clé n’avait pas été entendu, en l’occurrence sa directrice de cabinet Véronique de Malbec. À cela s’ajouteront les demandes d’actes, dont la plus retentissante sera la demande d’audition par la commission d’instruction de François Molins lui-même. Procéduralement, c’est lui qui devrait signer les réquisitions pour accorder ou refuser cette audition.
En tout état de cause, il s’agit du troisième garde des Sceaux dont la carrière politique ou ministérielle est mise à mal par la justice, pour ne pas dire en danger. On se souvient que, avant Éric Dupond-Moretti, la Cour de justice de la République avait mis fin à la carrière politique de Jean-Jacques Urvoas. Et que, en 2017, la mise en examen de François Bayrou l’avait écarté de la Chancellerie, quinze jours après sa nomination.
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