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samedi 6 juillet 2024

Pédocriminalité : Mathilde Brasilier dénonce son père Jean-Marie Brasilier

 

 

Inès Chatin cite un autre architecte parmi les amis de son père adoptif Jean-François Lemaire, l'Italien Ricardo Gaggia.

Ici, il est encore question de Claude Imbert, accompagné de Michel Tournier, proche de Gilles Deleuze, ancien élève du lycée Carnot.

Et bien sûr, de Gabriel Matzneff.

 

Lire ou relire :

http://satanistique.blogspot.com/2024/06/pedocriminels-de-la-rue-du-bac-de.html

http://satanistique.blogspot.com/2024/07/le-lycee-carnot-lorigine-de-la-bande-de.html

http://satanistique.blogspot.com/2024/07/claude-imbert-journaliste-pedocriminel.html


 

https://www.challenges.fr/tribunes/mathilde-brasilier-j-ai-vu-claude-imbert-avec-michel-tournier-chez-mon-pere_897162

Mathilde Brasilier : « J’ai vu Claude Imbert avec Michel Tournier chez mon père »

ENTRETIEN - Après la révélation simultanée par Challenges et Libération de deux mouvances pédophiles dans le VIe arrondissement de Paris, il apparaît que les deux univers sont interconnectés. Mathilde Brasilier témoigne notamment aujourd’hui de l’implication de Claude Imbert aux côtés de son père Jean-Marie Brasilier et de ses amis Balthus, Michel Tournier ou Gabriel Matzneff. Nouvelles révélations. [Attention, certains passages peuvent choquer.]

Ce dessin fut fait et offert par Mathilde Brasilier, dix ans, à son père Jean Marie Brasilier pour Noël 1969. Avec ce petit mot : "A papa, Joyeux Noël 1969 !" C'est notamment cette figuration du père les bras hérissés d'épines et la tête sans regard, rouge et menaçante, qui a corroboré l''hypothèse de l'inceste par la la thérapeute Catherine Dolto. Mathilde avait alors 40 ans et c'est ainsi quelle a pu se remémorer les agressions subies de l'âge de trois ans à dix ans.

Ce dessin fut fait et offert par Mathilde Brasilier, dix ans, à son père Jean Marie Brasilier pour Noël 1969. Avec ce petit mot : "A papa, Joyeux Noël 1969 !" C'est notamment cette figuration du père les bras hérissés d'épines et la tête sans regard, rouge et menaçante, qui a corroboré l''hypothèse de l'inceste par la la thérapeute Catherine Dolto. Mathilde avait alors 40 ans et c'est ainsi quelle a pu se remémorer les agressions subies de l'âge de trois ans à dix ans.

Mathilde Brasilier

Dans la dernière édition de notre newsletter « Le Plein d’idées », Mathilde Brasilier disséquait l’univers des relations de son père, Jean-Marie Brasilier, qui a abusé d’elle et de son frère pendant une dizaine d’années quand ils étaient enfants. Le même week-end du 15 juin, Libération révélait sur son site et avant un cahier spécial ce samedi, l’existence d’un réseau connexe, une véritable « secte », où sévissait également l’écrivain Gabriel Matzneff. Une organisation qui perpétrait des actes pédocriminels dans plusieurs lieux du VIe arrondissement de Paris. Principalement au domicile du docteur Jean-François Lemaire, rue du Bac et au 33 ou 35 rue de Varenne. Et à l’Hôtel Pont Royal, rue de Montalembert. Ce même hôtel ou Jean-Marie Brasilier, comme le révèle ici sa fille, se rendait fréquemment. Les deux réseaux semblent bien interconnectés. On voit mal comment l’enquête en cours sur le « réseau de la rue du Bac » ne s’élargirait pas à celui de Saint-Germain-des-Prés dont Jean-Marie Brasilier était un pivot. Et Gabriel Matzneff le dénominateur commun.

Lire aussiMathilde Brasilier : « L’inceste pédophile est toujours une œuvre collective. Voilà pourquoi, voilà mon histoire »

« Challenges - Le Plein d’idées » : Parmi les personnes identifiées par l’enquête de police suite aux révélations d’Inès, une des principales victimes du réseau de « la rue du Bac », il y a, rapporte le journal Libération, Jean-François Revel, académicien et éditorialiste à L’Express (mort en 2006), mais aussi Claude Imbert, fondateur et ex-directeur du Point décédé en 2016… Ces noms vous disent-ils quelque chose ?

Mathilde Brasilier : Oui, Claude Imbert était un proche de mon père ainsi que le peintre Balthus, le Prix Goncourt Michel Tournier ou encore l’écrivain Emil Cioran. Lorsque j’étais enfant, j’ai vu Claude Imbert à plusieurs reprises dans l’agence d’architecture de mon père, située au 6 rue Antoine-Dubois, au pied des escaliers venant de la rue Monsieur le Prince. Je me souviens que, lorsque j’utilisais les locaux de l’« Agence » pour travailler sur mon diplôme d’architecture, de janvier à juin 1983, j’ai vu à plusieurs reprises Claude Imbert et Michel Tournier. Puis mon père sortait avec eux en me disant qu’ils allaient prendre un verre à la brasserie Lipp.

« Il écoutait les messages. Les mêmes noms revenaient régulièrement : Balthus, Tournier, Cioran, Imbert »

 

Cette « Agence » était le bureau de votre père où il était censé organiser sa vie professionnelle…

Exactement. Il y avait un ensemble téléphonique sophistiqué pour l’époque avec magnétophone, enregistreur et grandes enceintes acoustiques. Mon père avait interdit à ma mère d’installer le téléphone dans l’appartement familial, alors qu’il avait lui-même trois postes téléphoniques dans son agence. Ce fut d’ailleurs un sujet de dispute récurrent entre mes parents, d’autant que ma mère était obligée de descendre rue Antoine-Dubois pour téléphoner. Lorsque mon père descendait à son agence avec nous (moi et mon frère), il écoutait les messages enregistrés et les mêmes noms déjà cités revenaient régulièrement.

Y a-t-il d’autres points du dossier de la rue du Bac qui vous soient familiers ?

MB Oui, l’Hôtel Pont Royal mentionné par Inès Chatin était un lieu que fréquentait souvent mon père. Dans l’article de Libération, elle confie que c’est dans ces murs qu’étaient organisées des réunions de nature sexuelles avec des mineurs. Des attouchements et des viols. Lorsque ma mère a appris que mon père y allait régulièrement, elle m’avait confié avoir téléphoné à son beau-frère qui habitait tout près dans la rue de l’université pour savoir s’il était au courant que mon père fréquentait l’Hôtel Pont Royal. Mon oncle avait confirmé en être informé.

Dans sa déposition à la police, mon père évoque d’ailleurs, sans le nommer, un lieu où il se rendait parfois pour rencontrer des « professionnelles ». Ma mère s’était disputée avec mon père à ce sujet pour des raisons que j’ignorais alors. En tout cas, elle avait laissé entendre vouloir divorcer.

Quelles étaient les activités professionnelles de votre père ? Quel était son emploi du temps ?

Suite à notre retour de la Villa Médicis en 1961, mon père a demandé à son beau-père de financer l’agence d’architecture de la Rue Antoine-Dubois (300 m2 étage et sous-sol), justifiant qu’en tant qu’architecte Prix de Rome, il serait appelé à réaliser beaucoup de projets.

Tout laissait penser que l'« Agence » était l’épicentre d’un travail d’équipe d’architectes alors qu’en fait votre père n’a quasiment jamais gagné de concours et donc jamais travaillé sur un chantier réel.

Exact. L’aménagement simulait une agence d’architecture en pleine activité, avec de grandes tables à dessin, une machine à tirer les plans, etc. Il y avait de grands plans affichés, celui du Prix de Rome, puis des études pour restructurer des villes au Sahara. Également des maquettes des concours échoués, notamment le projet du Centre Pompidou. Il n’a gagné aucun des concours auxquels il a participé.

Son vrai métier, c’était celui d’enseignant aux Beaux-arts…

Oui. Il exerçait la fonction de directeur de l’ « Atelier Brasilier » qui donnait quai Malaquais mais en fait, son activité s’est vite réduit à huit heures de cours par semaine. Il disposait donc de beaucoup de temps libre, durant lequel il avait des rendez-vous rue Antoine-Dubois ou à l’extérieur, notamment à la Brasserie Lipp. Il ne disait jamais clairement ce qu’il faisait de ses journées. Il évoquait ses amis. Toujours les mêmes. Comme ma mère était très contrariée de ses fréquentations sulfureuses, elle était soulagée lorsque mon père partait dans son château en Touraine ou ailleurs. En revanche, elle ne cachait pas son inquiétude lorsque mon père tardait à « remonter » de son agence rue Antoine-Dubois.

Elle suspectait que la luxueuse agence de la rue Antoine-Dubois serve de QG pour des activités qui n’avaient rien à voir avec son métier d’architecte…

Il y avait ce sous-sol déjà évoqué (5 ou 6 mètres sous plafond) qu’il avait aménagé comme salle utilisée principalement aux réunions de la Société des architectes diplômés du gouvernement (SDAG). Le reste du temps, l’espace était inoccupé et c’est ici qu’ont eu lieu un certain nombre de sévices sexuels subis durant notre enfance. Pour séparer le vaste sous-sol du rez-de-chaussée, il avait élaboré un système de trappe blindée qui donnait au lieu un aspect clos assez similaire à « l’espace bateau » décrit par Inès Chatin au domicile de la rue du Bac du docteur Lemaire.

« Ma mère était très en colère de l’intrusion de cet homme qui avait fait de la prison pour des sévices sexuels pédophiles »

 

Votre père a hébergé pendant plusieurs mois un ami à lui dans ce local qui avait été condamné pour pédophilie en suisse. Qui était-ce ?

En effet, en 1966-1967, mon père a hébergé rue Antoine-Dubois pendant plusieurs mois un peintre : Marc Suzor. C’était le fils du médecin de mes grands-parents, le docteur Suzor, lorsqu’ils résidaient en Touraine au Château de Meigné-le-Vicomte. Ma mère était très en colère de l’intrusion de cet homme qui avait fait de la prison en Suisse pour des sévices sexuels pédophiles sur son neveu et sa nièce. Malgré ce conflit entre mes parents, mon père l’avait invité en Touraine. Le pire est arrivé alors que Marc Suzor nous a invités, mon frère et moi, à faire une promenade en voiture. Malgré la nette désapprobation de ma mère, cet homme nous a emmenés.

Vous évoquez le château de famille Brasilier à Meigné-le-Vicomte. C’est là qu’après un dernier rendez-vous avec votre père, votre cousin Sébastien, le fils de la sœur de votre père, un garçon très brillant d’une vingtaine d’années qui vient d’entrer à Polytechnique, se suicide dans une voiture en faisant passer du gaz d’échappement dans l’habitacle.

Vous pouvez imaginer ce que je peux penser sans pouvoir le prouver… D’autant que le fils de mon oncle André Brasilier, Stéphane, s’est suicidé par overdose à 21 ans. Avec mon frère, cela porte à 3 les suicides au sein de ma famille. C’est lourd.

Le souvenir d’une scène avec des enfants vêtus de capes blanches, place Furstenberg

 

Pouvez-vous exclure avoir été conduit vous et votre frère aux adresses des relations de votre père ou encore de celles du docteur Lemaire ?

Je n’ai pas le souvenir d’avoir été à l’Hôtel Pont Royal. Mais nous sommes allés très souvent chez Balthus, cour de Rohan. Ce qui contrariait énormément ma mère, lorsqu’elle l’apprenait. J’ai en outre le souvenir qu’un jour, mon père nous a emmenés au 4 Place Furstenberg, juste à côté du musée Delacroix. Balthus a ouvert la porte puis nous a fait descendre dans un sous-sol où j’ai le souvenir d’enfants vêtus de capes blanches. J’avais 4 ou 5 ans. L’image est imprécise mais je me souviens de la peur que nous avions eue.

Dans l’affaire de la rue du Bac, le rôle du médecin Jean-François Lemaire est central. C’est lui qui adopte Inès et organise à son domicile les rendez-vous. Quelles sont vos interrogations sur votre propre médecin de famille.

Notre médecin de famille, le docteur Chambionnat, qui soignait les notables du quartier avait son cabinet Boulevard Saint-Germain à deux pas de l’Église. Lorsque j’ai eu 7 ans, mon père a décidé de transférer ma sœur aînée qui dormait alors dans la seule chambre donnant sur la rue Dupuytren. J’ai été « placée » dans cette chambre, à proximité de celle de mes parents, alors que mes 4 frères et sœur dormaient côté cour.

« Maintenant, tu vas bien dormir ma jolie ! »

 

C’est alors que les viols se sont multipliés ?

Oui. Je me le suis remémoré bien plus tard grâce à la psychanalyse : mon père a commencé alors à faire des intrusions de plus en plus fréquentes, de nuit, dans cette chambre. Je suis alors devenue insomniaque. Et je le suis toujours. Après des nuits blanches, j’étais épuisée. Ma mère appelait alors le médecin de famille, le docteur Chambionnat, qui pratiquait une injection de vallum. Je me rappelle sa phrase : « Maintenant, tu vas bien dormir ma jolie ! ».

J’ai appris depuis la parution de notre premier entretien que plusieurs enfants du quartier avaient été « soignés » sous injection de vallum. A l’âge de 6-7 ans, alors que j’avais cessé de marcher durant plusieurs jours, le même médecin avait diagnostiqué une « crise de croissance ». Pure invention. Par la suite, j’ai eu fréquemment des crises de tétanie, notamment lorsque les portes du métro se refermaient. Le même médecin me faisait des injections de calcium ou de magnésium. Ce qui n’a jamais guéri quoi que ce soit… Ces crises de tétanie/spasmophilie ont définitivement cessé après… la mort de mon père.

Depuis qu’elle était adolescente, ma sœur m’a toujours dit qu’elle redoutait les attouchements sexuels quand elle consultait.

Le médecin n’hésite pas non plus à faire interner votre père…

Ce même médecin de famille a décidé de faire interner mon père lorsqu’il a été victime d’une crise de paranoïa-schizophrénie l’hiver 69-70. Certainement suite à une tentative de viol que nous avions esquivée mon frère et moi, et dont le souvenir m’est revenu à l’âge de quarante ans. Il est probable que la décision d’internement de mon père a été prise par crainte que mon père soit dénoncé ou se dénonce. Lui et son réseau.

Mon père est resté six mois dans cet établissement. Ma mère, qui était seule habilitée à lui rendre visite, m’a confié plus tard qu’il déchirait les photos de moi et mon frère qu’elle lui apportait.

« Mon grand-père paternel, aristocrate royaliste, était à la tête du mouvement Rose-Croix »

 

Dans l’affaire de la rue du Bac, les références de l’écrivain Gabriel Matzneff au monde gréco-romain, à l’initiation par les adultes au culte des corps juvéniles, sont très nombreuses. Il parle lui-même de « secte ». Une culture de l’élitisme et de l’initiation. Dans la famille Brasilier, il y avait un lien historique très fort avec l’ancien mouvement occultiste « Rose-croix ». Notamment entre votre grand-père Jacques Brasilier et Joséphin Péladan, écrivain, dramaturge et critique d’art qui fonde l’Ordre de la Rose-Croix kabbalistique en 1888.

Mon grand-père paternel, aristocrate royaliste, était à la tête du mouvement Rose-Croix, « mouvement de la rosace » qui siégeait rue de Vaugirard en compagnie notamment du peintre Puvis de Chavannes. Dans le manuscrit d’Axël, texte adapté de Josephin Peladan, il est question de Janus comme dans le récit d’Inès Chatin. Dans les cérémonies rosicruciennes, il est également question de poignard*. On retrouve donc tant dans l’affaire de la rue du Bac que dans celle de mon père une construction culturelle qui met en avant les enfants comme symboles de pureté.

Mon père, proche de Jean-Marie Le Pen et qui ne cachait pas son antisémitisme, n’avait de cesse de nous enseigner la méfiance des personnes extérieures et l’importance symbolique de la lignée du même sang. Je pense que tout le mal prend racine dans l’idée ressassée par mon père que le cercle familial est un lieu clos, incestuel, une forteresse jalousement défendue qui doit se préserver à tout prix des êtres venant de l’extérieur. Qui doit gérer les pulsions dans l’entre-soi.

Propos recueillis par Guillaume Malaurie

*Voir Luc Racine, auteur de Symbolisme et analogie : l’enfant comme figure des origines, page 115.

 

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