Avant de frapper et de tuer Marie Trintignant en 2003, Bertrand
Cantat s’en était déjà pris physiquement, par le passé, à certaines de
ses compagnes, révèle une enquête publiée ce jeudi par « le Point ».
Contrairement à ce qu’affirmaient les proches de Cantat lors de son
procès, le comportement violent du chanteur était bel et bien connu de
son entourage depuis plusieurs années, et une véritable omerta aurait
régné autour de ce sujet, écrit l’hebdomadaire.
Selon un membre du groupe Noir Désir, cité par nos
confrères, Kristina Rady, l’épouse de Bertrand Cantat, aurait demandé à
plusieurs proches de mentir lors du procès du chanteur. »Elle ne
voulait pas que ses enfants sachent que leur père était un homme
violent », raconte le musicien, qui a préféré resté anonyme.
« Je savais qu’il avait frappé la femme avec qui il était avant
Kristina. Je savais qu’il avait tenté d’étrangler sa petite amie, en
1989. Je savais qu’il avait frappé Kristina. Mais ce jour-là, nous avons
tous décidé de mentir. Nous étions tous sous son emprise. Et nous
pensons qu’il se soignerait. »A en croire cet ancien partenaire de
Bertrand Cantat, les membres du groupe Noir Désir n’étaient d’ailleurs
pas les seuls à savoir que le chanteur était violent.
« Beaucoup de gens dans le milieu bordelais savaient que Kristina
avait été battue avant l’affaire Vilnius, mais ils se sont tus »,
précise-t-il.
« J’espère que vous pourrez encore entendre ma voix »
Selon « le Point », Bertrand Cantat aurait d’ailleurs continué de se
montrer menaçant et violent envers Kristina Rady après sa sortie de
prison, en 2007. Le chanteur l’aurait notamment harcelée et menacée
après qu’elle a choisi de le quitter un temps pour un autre homme.
Bertrand Cantat se serait montré si menaçant qu’il arrivait à la jeune femme de cacher ses enfants chez une voisine.
« Clairement, elle les laissait chez nous pour les protéger. [...]
Elle avait peur que son mari ne vienne la chercher violemment. Kristina
semblait être à la fois sous emprise, amoureuse, tiraillée, perdue »,
raconte celle-ci à l’hebdomadaire.Malgré cette violence, Kristina Rady finira par revenir vers Bertrand Cantat. Elle sera retrouvée pendue, chez elle, en 2010.
Dans son enquête, fournie, « le Point » retranscrit également des SMS
et des mails que Kristina Rady a adressés à son amant à cette époque.
« S’il apprend que tu connais mon numéro, c’est fini pour moi »,
écrit-elle notamment. « A plusieurs reprises, j’ai échappé au pire »,
raconte-elle également dans un message vocal laissé sur le répondeur de
ses parents.
« Il fait des choses horribles avec moi devant sa famille. […]
J’espère qu’on va pouvoir s’en sortir et que vous pourrez encore
entendre ma voix. »Joint par « le Point », l’avocat de Bertrand Cantat a répondu qu’il n’avait pas pu joindre son client.
Ses copines brestoises sont encore très loin de présenter
des excuses à leurs victimes ou à leurs proches, elles préfèrent au
contraire éliminer tous les survivants et y travaillent d’arrache-pied
avec leur complice le malade mental au clavier – son « arme », comme il
le revendique haut et fort.
Comme déjà dit, leurs assassinats des années 1970 et 1980 s’étant
soldés par de très lourdes peines de réclusion criminelle pour ceux qui
s’étaient fait prendre, elles ont depuis réorienté leurs attaques
ciblées vers des ingénieurs anonymes qu’elles assassinent ou font
assassiner pour le compte de patrons voyous : c’est bien plus facile,
sans aucun risque, et ça rapporte gros… Voyez le malade mental au
clavier : il n’a même plus besoin de travailler pour vivre…
Silke Maier-Witt faisait partie des terroristes de la Fraction armée
rouge (RAF) ; Jörg Schleyer est le fils du patron des patrons
allemands, assassiné par la RAF en 1977. Quarante ans après le funeste
«automne allemand», ils se sont rencontrés, elle lui a demandé pardon.
Quarante ans plus tard, une ancienne membre de la Fraction armée rouge demande pardon
Alors que le pays panse encore les plaies de ce funeste automne 77,
qui vit culminer la violence entre la Fraction armée rouge (RAF) et le
gouvernement de la RFA et où l’on assista en un mois et demi à une
succession de faits sanglants – de l’enlèvement du patron des patrons à
Cologne à une prise d’otages aussi rocambolesque que tragique entre
Palma de Majorque et Mogadiscio –, voici que l’heure du pardon arrive.
Un épisode important dans l’histoire de la Fraction armée rouge, qui
s’est déroulé à l’hôtel Marriott de Skopje, en Macédoine.
Le tabloïd Bild a publié mardi la rencontre entre une
ancienne terroriste de la RAF, Silke Maier-Witt, et le fils du patron
des patrons allemands, Jörg Schleyer, dont le père fut envoyé ad patres
le 18 octobre 1977. Fait rare pour des ex de la RAF : elle parle. Fait
inédit : elle s’excuse auprès d’un proche d’une victime. «Cela semble si plat à dire, mais d’abord je demande pardon», dit
l’ex-terroriste, condamnée à dix ans de prison pour avoir participé à
l’enlèvement et à la séquestration, suivie du meurtre, de Hanns-Martin
Schleyer. Ce n’est pas elle qui l’a tuée, elle n’était même pas là. Elle
ne l’a même jamais rencontrée, c’était une exécutante. Elle prenait des
notes. Au terme des heures d’entretien, le fils Schleyer ne saura
d’ailleurs pas qui a tué son père. Stefan Wisniewski ? Willy Peter
Stoll ? Rolf Heissler ? Rolf Clemens Wagner ?
Sept heures de rencontre
Mais c’est bien elle qui a transmis ce message, adressé à Libération et à l’agence de presse allemande Deutsche Presse-Agentur le 19 octobre 1977, qui scelle officiellement la mort de Schleyer : «Après quarante-trois jours, nous avons mis fin à l’existence misérable et corrompue de Hanns Martin Schleyer. Schmidt [le chancelier allemand, ndlr], qui
dans son calcul a depuis le début spéculé avec la mort de Schleyer,
peut en prendre livraison rue Charles-Péguy à Mulhouse. Sa mort est sans
commune mesure avec notre douleur après le massacre de Mogadiscio. Nous
ne sommes pas étonnés par la dramaturgie fasciste des impérialistes
pour détruire les mouvements de libération. Le combat ne fait que
commencer.» Le correspondant de Libé de l’époque se rendit à l’adresse dite, et y trouva, comme indiqué, le corps sans vie du patron des patrons.
Aujourd’hui, Silke Maier-Witt a 67 ans, est retraitée et vit à
Skopje. Elle a passé sept heures avec Jörg Schleyer, 63 ans. Cette
rencontre orchestrée par Bild, et commentée par la plupart des
journaux allemands, semble répondre à ce récent discours du président
allemand, Frank-Walter Steinmeier, le 18 octobre dernier. C’était le
jour des quarante ans de la mort de Schleyer, et, devant les proches des
victimes de la RAF, Steinmeier exhortait les terroristes à prendre
enfin la parole. «Aux coupables, qui sont restés silencieux pendant
de nombreuses années, je voudrais dire très clairement qu’ils sont
coupables une deuxième fois – coupables envers les proches des victimes,
non pas légalement, mais moralement.» Avant d’ajouter : «Parlez et répondez aux questions qui sont encore ouvertes. Au moins, vous le devez aux proches.»
De son côté, Jörg Schleyer a demandé au bureau de la présidence de
communiquer les dossiers confidentiels concernant le meurtre de son
père, qui ne furent jamais divulgués. «C’est précisément ce savoir qui ne peut être refusé aux survivants endeuillés après quarante ans.»
Selon le criminologue Jean-François Gayraud, l’organisation compta 200 sympathisants et militants sur huit ans d’existence10.
Au plan international, Action Directe mena notamment des actions avec
les Cellules communistes combattantes de Pierre Carette (Belgique), la
Rote Armee Fraktion (Allemagne), divers groupes armés italiens (Brigades
rouges, Communistes organisés pour la libération prolétarienne, Prima
linea), les Fractions armées révolutionnaires libanaises et des groupes
extrémistes turcs11.
Action directe est le résultat de la fusion des membres des GARI (Groupes d’action révolutionnaire internationalistes), des NAPAP (Noyaux armés pour l’autonomie populaire)12 et des Brigades internationales. Ces trois groupes appartiennent à la même famille de pensée que la Gauche prolétarienne, mouvement maoïste dissous en 1974, qui prônait le recours à la violence comme arme politique. Les GARI ont été fondés en 1973 par des anarchistes
espagnols anti-franquistes exilés en France, qui ont basculé dans la
lutte armée l’année suivante, après la condamnation à mort et
l’exécution de l’anarchiste catalan Salvador Puig i Antich. Les NAPAP forment un autre mouvement anarchiste, animé par Frédéric Oriach
qui s’est fait connaître en 1977 à l’occasion de l’assassinat de
Jean-Antoine Tramoni, ancien vigile des usines Renault qui avait abattu
cinq ans plus tôt le militant maoïste Pierre Overney.
Les Brigades internationales ont organisé en 1976-1977 plusieurs
attentats contre des diplomates étrangers en poste à Paris. Ces trois
organisations ont suivi un cheminement idéologique similaire. Elles ont
en commun le recours aux attentats à l’explosif, aux mitraillages
d’édifices publics et de sièges de sociétés, aux assassinats dits
politiques et aux attaques de banque comme moyen de financement. Elles
coopèrent avec d’autres groupes armés européens et s’apportent un appui
logistique mutuel11. Leur rapprochement aboutit en 1977 à la création d’une « coordination politico-militaire interne au mouvement autonome en France ».
Cette coordination se transforme en 1979 en une « organisation de guérilla » qui commence alors à revendiquer ses attaques sous le nom d’Action directe13, expression empruntée à l’anarcho-syndicalisme du début du XXe siècle, mais avec laquelle la pratique d’Action Directe n’a rien à voir14, au nom de la lutte contre l’impérialisme capitaliste, des symboles de la puissance de l’État, le grand patronat et la défense du prolétariat. Pour s’alimenter en armes et explosifs, ils réalisent des vols et braquages.
Des divergences idéologiques apparaitront en effet au sein du groupe.
En mars 1982 Jean-Marc Rouillan et ses amis rendent public un manifeste
intitulé Pour un projet communiste. Selon Christophe Bourseiller,
ce texte se réclame clairement d’une « idéologie communiste
libertaire » « antiautoritaire, antiléniniste, et antistalinienne ». Le juge Bruguière qualifie la doctrine élaborée par Rouillan de « compromis entre le marxisme-léninisme et les thèses libertaires ». Elle serait largement inspirée des thèses des Brigades Rouges15.
Il considère qu’Action directe « n’a guère de base idéologique » : dans
un premier temps, le groupe revendique ses débuts anarchistes, puis
tente de trouver des justifications théoriques à ses actions.
Jean-François Gayraud est encore plus sévère : pour lui « la faiblesse
quantitative (des textes publiés par Action directe) le dispute à
l’indigence intellectuelle. Au mieux il s’agit d’une pâle adaptation des
thèses léninistes, et au pire, dans d’autres occasions, Action Directe
se contentera, comme le fera remarquer charitablement Frédéric Oriach, de traduire dictionnaire en main les productions des Brigades Rouges et de la Fraction Armée Rouge10 ». Les journalistes d’extrême-gauche Bertrand Le Gendre et Edwy Plenel
font état de nombreux témoignages allant dans le même sens : « il n’y
avait, le plus souvent, aucun lien entre la théorie politique et leur
pratique. La première servait seulement de couverture, de justification
idéologique. D’emblée, l’aventure individuelle, sur fond le plus souvent
d’origine sociale petite-bourgeoise, l’emporte sur la cohérence
intellectuelle16. »
Tel n’est pas le cas de la « Branche lyonnaise ». André Olivier et
ses proches se définissent comme « marxistes-léninistes et défendent
l’héritage de Mao ». André Olivier, ancien militant de la Cause du Peuple,
a intégré en 1975, la « mouvance autonome où se côtoient ex-maos et
anars ». Action directe étant un mouvement non autoritaire, la branche
lyonnaise a toute latitude pour se positionner sur des idéologies
différentes de celle de Rouillan et Ménigon. Selon Christophe
Bourseiller, le seul combat réel oppose les foquistes libertaires de Paris aux maoïstes de Lyon17. Ces derniers affichent un antisionisme qui se transforme rapidement en antisémitisme18. Les divergences qui apparaissent entre les deux groupes donnent lieu à une rupture définitive pendant l’hiver 1981-198219.
Au mois d’août 1982, une nouvelle rupture a lieu avec deux courants
« mouvementistes » qui se sont progressivement opposés à la lutte armée,
dont le groupe des Toulousains, anarcho-écologiste, autour de Michel
Camillieri.
Selon certaines sources, le groupe Action directe aurait pu être
commandité, voire manipulé par un État étranger afin de commettre
certains assassinats. C’est la thèse que soutiennent les journalistes Romain Icard20 et Dominique Lorentz21. Le nom de l’Iran, que le contentieux Eurodif opposait à la France, est souvent cité. Cette thèse, considérée comme vraisemblable par Gilles Ménage11
(ancien directeur de cabinet de François Mitterrand chargé des
questions de renseignement, de police et de sécurité), se fonde
notamment sur le fait que Georges Besse, assassiné par Action directe,
avait été président d’Eurodif. Le juge Alain Marsaud
a indiqué d’autre part qu’au moment de leur arrestation, les
responsables du groupe (Jean-Marc Rouillan, Nathalie Ménigon, Joëlle
Aubron et Georges Cipriani) projetaient d’enlever et de séquestrer le
président d’Eurodif22. Yves Bonnet, ancien directeur de la DST,
se dit convaincu qu’Action directe a été commanditée pour certains
assassinats ; il se fonde notamment sur la proximité de Mohand Hamami,
militant du groupe, avec la Fraction armée révolutionnaire libanaise (FARL)23.
Création et première période
La première manifestation « idéologique » violente du groupe date du 1er mai 1979 : il s’agit du mitraillage de la façade du siège du Conseil National du Patronat Français (CNPF), rue Pierre 1er de Serbie à Paris. Le commando est composé d’André Olivier, Maxime Frérot, Ménigon et Rouillan24.
Le 25 mai, un attentat à l’explosif est commis contre une agence
immobilière à Sceaux; il est revendiqué pour la première fois par le
groupe Action directe. Six autres actions sont réalisées jusqu’au 26
mars 1980. Il s’agit d’attentats à l’explosif ou de mitraillages contre
des bâtiments ministériels ou des organismes censés représenter le
pouvoir ou le patronat. Le 16 mars 1980, un attentat vise les locaux
réputés secrets de la DST rue Rembrandt à Paris. Le 18mars1980, la façade du ministère de la Coopération, boulevard des Invalides est mitraillée. Le ministre Robert Galley
vient de quitter son bureau, qui est atteint par plusieurs balles. Des
tracts signés Action directe dénonçant « l’État négrier » sont
abandonnés sur place25.
À la suite de cet attentat, les différents services de police se
mobilisent contre Action directe. Dirigée par le commissaire Jean-Pierre
Pochon, la discrète Brigade Opérationnelle Centrale (BOC) des Renseignements Généraux suit alors attentivement le groupe dont la dérive de plus en plus violente inquiète les autorités26.
Jean-Marc Rouillan est déjà connu des services de police : il a fait
l’objet de plusieurs interpellations pour détention d’armes depuis 1974.
Un coup de filet est opéré le 27 mars et vingt-huit suspects identifiés
et repérés par la BOC sont interpellés, parmi lesquels à Paris Mireille
Munoz, Carlos Jaurégui, Pedro Linarès Montanes, Serge Fassi, Pascal
Trillat, Mohand Hamami et Olga Girotto, une militante italienne du
groupe terroriste Prima Linéa. Des armes, un stock de cartes d’identité
françaises et italiennes vierges et 600 kg
de dynamite sont saisis. Au total dix-neuf suspects (en incluant quatre
ressortissants italiens suspectés d’avoir participé au hold-up de
Condé-sur-l’Escaut et arrêtés dans le Var) seront déférés à la Cour de
sûreté de l’état27.
Jean-Marc Rouillan, Nathalie Ménigon et André Olivier, considérés comme
les chefs d’Action directe, échappent cependant à l’interpellation28. Ils ne désarment pas. Le 5 août, un commando de quatre hommes et deux femmes braque la mairie du 14e arrondissement.
Ils s’emparent de fiches d’état-civil, de cachets officiels, de mille
cartes grises et de plusieurs centaines de passeports et de cartes
d’identité. Dans les mois et les années qui suivront, les policiers
retrouveront des documents issus de ce vol en possession des membres
d’Action directe qui seront arrêtés.
Le commissaire Pochon monte alors un stratagème pour capturer les
dirigeants d’Action directe que la méfiance instinctive rend difficile à
localiser : sur une idée de leur informateur, Gabriel Chahine29,28, le commissaire et ses hommes se font passer pour des émissaires de Carlos dans le cadre d’une action groupée visant à faire sauter le barrage d’Assouan et voulant rencontrer les membres d’Action Directe pour s’associer à eux. Le 13 septembre 1980, Jean-Marc Rouillan et Nathalie Ménigon, pensant rencontrer le terroriste Carlos, sont pris dans une souricière et arrêtés rue Pergolese à Paris.
Au cours de l’interpellation Nathalie Ménigon tire à plusieurs reprises
des coups de feu sur les policiers. Ils avoueront onze attentats et
mitraillages commis à Paris depuis le 1er mai 197929.
Ils sont déférés le 19 septembre devant la Cour de sûreté de l’état. Le
même jour, le poste de garde de l’École militaire est mitraillé. Cette
action est revendiquée par Action directe.
Suspension des attentats
En décembre, Action directe publie un communiqué indiquant qu’il
suspend ses opérations violentes pendant la campagne présidentielle30,31.
Après l’élection de Mitterrand en 1981,
le nouveau gouvernement joue l’apaisement et fait voter une loi
d’amnistie qui remet en liberté Rouillan et dix-sept autres militants
(sur 248 détenus libérés)32.
Nathalie Ménigon, accusée de tentatives d’homicide contre agents de la
force publique, doit normalement rester incarcérée. Elle entreprend une
grève de la faim pour faire pression sur le juge d’instruction Guy Joly.
L’action est soutenue par diverses manifestations dont certaines sont
violentes et relayée par des soutiens politiques et une partie de la
presse de gauche et d’extrême gauche. Le juge la fait libérer pour
« raisons médicales » le 17 septembre 198129. Ces libérations, ainsi que celles de membres d’autres groupes terroristes (Groupes anarchistes autonomes, Noyaux armés pour l’autonomie prolétarienne, indépendantistes basques, corses et bretons) suscitent la fureur des policiers ayant procédé à leur interpellation33.
À partir de novembre 1981, Action directe participe à l’occupation
d’ateliers clandestins dans le Sentier et de plusieurs immeubles à
Barbès. Plus d’une centaine de familles immigrées, majoritairement
turques, sont relogées dans des squatts. Selon le commissaire Marcel
Leclerc, l’objectif est de recruter de nouveaux militants parmi les
immigrés. À cette occasion, Jean-Marc Rouillan et ses amis établissent
des liens avec des mouvements extrémistes turcs qualifiés
d’« extrêmement durs »15. De nombreux incidents et manifestations ponctuent cette campagne.
En décembre 1981, le journaliste Jean-Louis Baudet, qui est en
relation avec les responsables d’Action directe, prend contact avec l’Organisation de libération de la Palestine lors d’une réunion organisée par Giovanni Senzani, l’un des leaders des Brigades rouges. Divers objectifs et moyens d’action sont étudiés en commun.
Pendant l’hiver 1981-1982, après de nombreux débats internes,
l’organisation se scinde en quatre groupes : deux décident d’arrêter la
lutte armée (dont le courant « mouvementiste-nationaliste » de Michel
Camillieri (Camilleri) qui prône la création d’« ateliers autogérés ») ;
autour d’André Olivier se forme l’Affiche rouge (surnommée par la police et les médias Action directe-branche lyonnaise ou encore Action directe-branche nationale) qui commettra plusieurs attentats antisémites33, tout en continuant une lutte anti-impérialiste, et enfin Action directe (appelé aussi Action directe-branche internationale) avec Jean-Marc Rouillan et Nathalie Menigon qui s’allie à la Fraction armée rouge dans le cadre de la stratégie d’« unité des révolutionnaires en Europe de l’Ouest » à partir de 198530. Les Textes de prison 1992-1997
d’Action directe évoquent une « rupture définitive » avec la « branche
lyonnaise ». La rupture avec les courants « mouvementistes » sera
parachevée début août 1982 : ceux-ci opposent un refus définitif à la
poursuite des attentats.
Reprise des « actions politico-militaires »
Action directe poursuit la lutte contre « l’impérialisme américain »
et le sionisme. Les 24 et 25 décembre, sept attentats sont commis contre
des magasins de luxe, le 19 février le local des organisations turques à
Paris est visé. Le 13 mars 1982, l’informateur Gabriel Chahine, dont le
travail d’intoxication a permis l’arrestation de Jean-Marc Rouillan et
Nathalie Ménigon, est assassiné à son domicile. Cet assassinat n’est pas
revendiqué. Cependant les Textes de prison 1992-1997 des responsables d’Action directe mentionnent que c’est un commando de l’organisation qui a effectué « l’exécution »34. Selon l’ancien policier Patrice Lastère, c’est Régis Schleicher, déguisé en postier, qui a abattu Chahine35.
Le 30 mars 1982, l’antenne du ministère de la défense israélien à
Paris est mitraillée. Cette action est revendiquée depuis Beyrouth par
la Fraction armée révolutionnaire libanaise (Farl). Le 8 avril, Joëlle
Aubron et Mohand Hamami sont arrêtés. Joëlle Aubron était la locataire
d’un box situé rue Borrego dans lequel ont été découverts un stock
d’armes, des documents d’identité et des chéquiers volés. L’une des
armes trouvées dans la cache a été utilisée pour le mitraillage. Joëlle
Aubron est identifiée comme ayant participé à deux hold-up le 15 avril
1981 rue La Boëtie et place des Ternes, au cours desquels un gardien de
la paix a été abattu36. Elle est condamnée à quatre ans de prison dont dix-huit mois avec sursis pour détention d’armes. Hamami est relaxé37. Elle épousera l’année suivante, en détention, Régis Schleicher.
En mars et en avril Action directe publie ses deux premiers textes théoriques : Pour un projet communiste et Sur l’impérialisme.
En juin, Action directe tente d’organiser une mobilisation contre le
sommet du G7 à Versailles, ponctuée par un spectaculaire attentat contre
le siège européen du FMI et de la Banque Mondiale.
Le 1er août, une rupture
définitive a lieu entre les « durs » minoritaires et les
« mouvementistes ». Les « durs » (autour de Jean-Marc Rouillan) sont
partisans d’une internationalisation de la lutte armée et de
l’intégration d’Action directe dans un front commun de lutte terroriste
avec les Brigades rouges italiennes, la RAF allemande et des groupes
belges et palestiniens. Les « mouvementistes » (autour d’Éric Moreau,
Meyer (Meïer) Azeroual, Michel Camillieri, Pascal Magron et Charles
Grosmangin) sont favorables à la lutte au sein des masses et des
entreprises. Regroupés dans un « Collectif révolutionnaire du 1er
août », ils font paraître un communiqué et dénoncent « les pratiques
autoritaires et bureaucratiques d’un des collectifs d’Action Directe,
visant à entraîner l’ensemble des unités sur une stratégie et une ligne
politique volontariste et élitiste (cela malgré de nombreuses
discussions internes). » Ils décident « l’éclatement d’Action Directe »
en expliquant : « Ce qui avant n’était qu’un mot d’ordre tendant à un
regroupement révolutionnaire ne nous appartient pas ; nous abandonnons
donc le sigle d’Action Directe à ceux qui voudraient l’utiliser. Contre
le capital, le combat se mène à la base sur tous les fronts de la guerre
sociale. »38
Le 17 septembre, Michel Camillieri, Charles Grosmangin, Pascal Magron
et Olivier Chabaud sont arrêtés en possession d’armes et d’explosifs.
Ils expliquent aux policiers qu’ils ont abandonné la lutte armée et
qu’il s’agissait pour eux de mettre ce matériel à l’abri39.
Un incident comparable a lieu le 20 novembre : la police découvre une
cantine et une glacière remplies d’armes, de munitions et d’explosifs
non loin d’une ferme de Saint-Sardos (Lot-et-Garonne) occupée par des
proches de Serge Fassi, lequel est arrêté40. Le 15 juin 1983 la 10e chambre du Tribunal correctionnel de Paris condamne Camillieri et Grosmangin à 5 ans de prison dont 18 mois avec sursis41.
Pascal Magron est condamné à quatre ans de réclusion, Olivier Chabaud à
8 mois avec sursis. Eric Moreau est condamné par défaut à 4 ans de
prison.
Entrée dans la clandestinité
Début août, à la suite de l’entrée au Liban des troupes israéliennes
et aux interventions françaises et américaines, Action directe commet
plusieurs attentats contre des sociétés américaines et israéliennes42.
Le 9 août 1982, une fusillade meurtrière a lieu au restaurant
Goldenberg, rue des Rosiers à Paris. On dénombre six morts et vingt-deux
blessés. Le 11 août, une bombe explose rue de La Baume à Paris, visant une société israélienne et blessant grièvement une passante43.
Le 17 août, Jean-Marc Rouillan dément toute participation à la tuerie
de la rue des Rosiers mais revendique les autres attentats44.
Devant le scandale, François Mitterrand annonce le soir même, parmi
plusieurs mesures antiterroristes, la dissolution du groupe Action
directe25.
Le 21 août 1982, avenue La Bourdonnais, une bombe se détache du
véhicule du conseiller commercial de l’ambassade des États-Unis. Elle
explose peu après, tuant deux démineurs de la Préfecture de police.
L’après-midi même, l’attentat est dans un premier temps revendiqué par
Action Directe, puis par la Fraction Armée Révolutionnaire Libanaise
(FARL)45.
Parallèlement, Action directe s’associe avec des Italiens du COLP et
commet une série importante de hold-up, dont certains meurtriers. Le
groupe se replie régulièrement en Belgique et joue un rôle non
négligeable au sein des Cellules communistes combattantes (CCC)46. Le 31 mai 1983, au cours d’une fusillade dans l’avenue Trudaine à Paris deux policiers sont tués et un troisième blessé47.
Le 30 juillet 1983 Action directe dévalise la bijouterie Aldebert,
place de la Madeleine. Le 13 octobre, le groupe commet un hold-up à la
Société générale place des Ternes. Le 14 octobre, une fusillade a lieu lors d’un autre hold-up à la Société générale avenue de Villiers.
Deux policiers sont blessés et l’un des malfaiteurs est abattu : il
s’agit de Ciro Rizzato, membre du groupe italien Prima Linea. Régis
Schleicher est identifié parmi les braqueurs.
Radicalisation
L’année 1984 marque un tournant pour le groupe48.
Le 2 août, il commet pour la première fois un attentat « aveugle ».
Cinq kilos d’explosif déposés dans le hall de l’Agence Spatiale
Européenne font six blessés. Le 23 août, une Renault 20 dans laquelle se
trouvent 23 kilos d’explosifs est placée devant le bâtiment de l’Union
de l’Europe Occidentale, avenue du président Wilson. Des appels
téléphoniques passés par une voix féminine (qui sera identifiée comme
Nathalie Ménigon) alertent cependant les forces de l’ordre à propos du
véhicule, qui est mis en fourrière. L’engin explosif sera désamorcé
quelques jours plus tard. En octobre, Action directe publie un
communiqué pour revendiquer la fusillade de l’Avenue Trudaine, tout en
laissant entendre qu’il s’agit d’une « bavure ».
En janvier 1985, un communiqué rédigé en français et en allemand fait
part de la fusion d’Action directe avec les derniers éléments de la
Fraction Armée Rouge. Le 25 janvier, l’ingénieur général René Audran est
assassiné devant son domicile à la Celle St Cloud. Une semaine plus
tard, Ernest Zimmermann, président des industries aérospatiales de la
République fédérale allemande est assassiné à Munich.
Le 26 juin, le véhicule dans lequel se trouve l’ingénieur général
Henri Blandin et son fils de douze ans essuie plusieurs coups de feu,
porte des Ternes. Le sang-froid de son chauffeur permet d’éviter qu’il y
ait des victimes. Action directe revendique l’attentat la semaine
suivante.
Les cibles sont choisies comme des symboles de l’ordre et de
l’oppression qu’Action directe entend combattre : policiers, grands
patrons, responsables de l’armement… D’autres tentatives d’assassinat
visent notamment Guy Brana, vice-président du Conseil National du Patronat Français, Alain Peyrefitte (mais le chauffeur de sa voiture sera tué49) et le juge Jean-Louis Bruguière.
La branche lyonnaise d’Action directe (l’Affiche rouge dirigée par
André Olivier, Emile Ballandras, Bernard Blanc et Max Frérot) commet 21
braquages et 12 attentats. Trois membres des forces de l’ordre (dont le général de gendarmerie Guy Delfosse tué au cours d’un braquage) et un convoyeur de fonds sont tués au cours de ces actions.
Arrestations
Emile Ballandras est arrêté le 10 octobre 1984. Le 28 mars 1986,
André Olivier, Joëlle Crépet et Bernard Blanc sont arrêtés. Maxime
Frérot est arrêté le 27 novembre 1987. En tout, 18 membres de l’Affiche
rouge seront arrêtés.
Régis Schleicher, animateur d’une branche d’Action directe
spécialisée dans les hold-up est arrêté en mars 1984 au Pontet
(Vaucluse) avec Claude et Nicolas Halfen, par la Brigade de recherches
et d’intervention et la PJ de Montpellier. En compagnie de Mohand
Hamami, de Franco Fiorina et Gloria Argano (deux italiens membres des
Communistes organisés pour la libération du prolétariat), ils ont été
identifiés par le juge Bruguière comme les auteurs de la fusillade de
l’avenue Trudaine. Cette arrestation intervient à l’issue d’une longue
filature d’Helyette Bess, gérante de la librairie anarchiste « Le Jargon libre » (XIIIe
arrdt). Surnommée la « vecchietta » (la vieille), cette militante est
très engagée dans les mouvements anarchistes extrémistes. Jusqu’à son
arrestation, elle a géré avec efficacité l’intendance du groupe et
veillé à sa ligne idéologique. Une partie des fonds qu’elle gère
provient du hold-up de Condé-sur-l’Escaut11.
Charles Pasqua est nommé ministre de l’intérieur le 20 mars 1986 dans le gouvernement de cohabitation dirigé par Jacques Chirac.
Dès son arrivée Place Beauvau, il fait d’Action directe une cible
prioritaire. Il souhaite incidemment symboliser la rupture avec
l’ancienne majorité socialiste, volontiers qualifiée de laxiste par ses
adversaires en matière de sécurité. Dans le même temps une vague
d’attentats islamistes fait de nombreuses victimes à Paris et le 17
novembre Georges Besse, PDG de Renault, est assassiné devant son domicile boulevard Edgar Quinet par Nathalie Ménigon et Joelle Aubron. Philippe Massoni,
directeur central des renseignements généraux est chargé de la
« traque » d’Action directe. Des dizaines d’inspecteurs placés sous les
ordres du sous-directeur chargé de l’antiterrorisme, Claude Bardon, sont
affectés à cet objectif. Des centaines de milliers de francs sont mis à
la disposition des enquêteurs, pour leurs déplacements ou pour acheter
d’éventuels renseignements. Des dizaines de sympathisants potentiels ou
imaginaires d’Action directe, connaissances, anciens militants, anciens
amis ou même anciens voisins sont interrogés50.
Les photos de Rouillan, Ménigon, Aubron et Cipriani sont affichées dans
tous les commissariats et une prime d’un million de francs est offerte
pour tout renseignement permettant de les localiser.
Le 21février1987, les principaux membres d’Action directe, Jean-Marc Rouillan, Nathalie Ménigon, Joëlle Aubron, et Georges Cipriani sont arrêtés à 20 h 55 par le RAID dans une ferme au gué Girault, lieu-dit de la commune de Vitry-aux-Loges, dans le Loiret.
C’est un renseignement parvenu à un inspecteur de la DST (lequel le
transmettra aux Renseignements généraux) qui révèlera qu’ils se cachent
dans cette ferme. Jean-Marc Rouillan et Nathalie Ménigon donnaient à
leurs voisins fermiers l’image d’un couple paisible, se faisant passer
pour des chercheurs « écolos » belges51.
La police saisit dans la longère huit armes, trente kilos d’explosifs,
de nombreux documents et une cache destinée à garder une prochaine cible
enlevée dans le but de l’échanger contre la libération de Régis Schleicher52.
En effet, tout est parti d’un billet de train Orléans – Saint-Pierre-des-Corps trouvé dans les poches de Georges Cipriani
lors de son arrestation en 1987 dans le Loiret. Les gendarmes ont alors
opéré des contrôles dans les agences immobilières, puis auprès de
nombreux propriétaires auxquels les loyers n’avaient pas été payés
depuis février. Ils sont ainsi entrés en contact avec les époux Robin
(un menuisier de la région), qui percevaient leur loyer en argent
liquide à Villeloin-Coulangé, et avec M. Denis Rancher, de Sepmes
(Indre-et-Loire), qui louait un studio au huitième étage d’un immeuble
avec vue plongeante sur l’autoroute à Chambray-lès-Tours. Georges
Cipriani et Joëlle Aubron passaient un bon nombre de week-ends dans la maison de Villeloin-Coulangé depuis octobre 1985.
Les enquêteurs de la 6e division
de la direction centrale de la PJ et les gendarmes d’Indre-et-Loire ont
d’abord trouvé l’attaché-case de Joëlle Aubron, contenant ses vrais
papiers, carte d’identité et permis de conduire. Dans deux cantines
métalliques, étaient stockés 12 kilos d’explosifs du même type que ceux
trouvés dans la ferme de Vitry-aux-Loges, un fusil semi-automatique, des munitions, des faux papiers et des carnets d’adresses. Une Super-Cinq
volée au cours de l’été 1985 à la société de location Hertz d’Amiens et
portant une fausse immatriculation se trouvait dans le garage.
Le long du pavillon surmonté d’un toit de tuile rouge, Joëlle Aubron
avait planté des tomates et elle en faisait des conserves soigneusement
rangées dans le cellier. La jeune femme et Cipriani se montraient
discrets malgré un va-et-vient de camionnettes perceptible par les
voisins certaines nuits. Dans la ferme isolée, la police trouve de
l’argent, des armes, des documents relatifs à l’assassinat de Georges Besse,
des listes de personnalités à enlever (au premier étage, un local a été
aménagé pour recueillir un otage en échange de la libération de Régis Schleicher). Un hasard sans doute : la résidence secondaire de Georges Besse est située à une trentaine de kilomètres de là, à Betz-le-Château.
Cette fois, ce n’est pas une dénonciation, comme à Vitry-aux-Loges,
mais bel et bien un travail en profondeur des gendarmes d’Indre-et-Loire
qui a permis la découverte de la planque53.
« Joëlle Aubron, échappée de la bonne bourgeoisie et
appliquée, dans les moments tranquilles, à surveiller ses chaudrons de
confitures. Elle aussi, en compagnie de Georges Cipriani, avait choisi
un coin retiré pour abriter ses rêves de feu et de sang : une ferme
louée à Villeloin-Coulange, dans l’Indre-et-Loire54. »
Suites judiciaires
Les attentats et assassinats commis par Action directe ont donné lieu à plusieurs procédures judiciaires et autant de procès.
Jean-Marc Rouillan, Nathalie Ménigon, Joelle Aubron et Georges Cipriani ont été condamnés en 1989 à la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d’une peine incompressible de dix-huit ans, pour l’assassinat de Georges Besse. En 1994 ils ont été condamnés à la même peine pour l’assassinat de René Audran,
les tentatives d’assassinat contre Guy Brana, vice-président du CNPF et
Henri Blandin, contrôleur général des armées, ainsi que les attentats
contre les locaux d’Interpol et contre ceux de l’Union de l’Europe
Occidentale.
Nathalie Ménigon avait préalablement (en février 1988) été condamnée à
douze ans de réclusion criminelle pour les tentatives d’homicide contre
les policiers dans le cadre de la fusillade de la rue Pergolèse.
Le procès de Régis Schleicher et des frères Halfen pour la tuerie de
l’avenue Trudaine s’ouvre le 3 décembre 1986. Dès le début de l’audience
Schleicher menace les juges et les jurés en leur promettant les
« rigueurs de la justice prolétarienne »55
et refuse par la suite de comparaître. La défection de cinq jurés
entraîne le renvoi du procès. En juin 1987, sept juges professionnels
condamnent Schleicher à la réclusion criminelle à perpétuité. Nicolas
Halfen écope de 10 ans de prison pour « association de malfaiteurs » et
Claude Halfen est acquitté fautes de charges suffisantes56. Frédérique Germain, Blondblond,
proche de Claude Halfen arrêtée le 31 mai 1983 lors d’un braquage et
inculpée d’association de malfaiteurs est le témoin central de ce procès56.
Le premier procès de la mouvance Action directe eut lieu en
janvier 1988. Vingt-quatre prévenus (dont deux détenus en Italie et un
en fuite) furent jugés en correctionnelle pour association de
malfaiteurs. Les peines prononcées furent les suivantes : dix ans de
prison (la peine maximum) pour le « noyau dur » (Régis Schleicher,
Jean-Marc Rouillan, Georges Cipriani, Vicenzo Spano, Joelle Aubron,
Nathalie Ménigon, Mohand Hamami (en fuite) et Claude Halfen); huit ans
d’emprisonnement pour Hélyette Bess (qui louait des planques,
recherchait des appuis, transportait armes, faux papiers et numéraire);
sept ans pour Salvatore Nicosia, Bruno Baudrillart (considérés comme des
trésoriers de l’organisation) et Jean Asselmeyer (« soutien
logistique »); cinq ans pour Dominique Poirre et Annelyse Benoit,
compagnes respectives de Asselmeyer et Baudrillart (« aides
médiatiques » du mouvement); six ans pour Nicolas Halfen; dix-huit mois
avec sursis pour la journaliste Paula Jacques et l’écrivain Dan Franck (pour l’aide qu’ils apportèrent à Claude Halfen notamment57); Frédérique Germain fut dispensée de peine. Deux autres prévenues furent relaxés58.
Lors du procès en appel, ces peines furent confirmées pour Schleicher,
Rouillan, Cipriani, Spano, Aubron, Claude et Nicolas Halfen; les peines
d’Helyette Bess et Jean Asselmeyer furent réduites à six ans
d’emprisonnement; Nicosia fut relaxé du délit d’association de
malfaiteurs et condamné à quatre ans de prison pour recel de documents
administratifs et d’explosifs; Annelyse Benoît et Bruno Baudrillart
furent également relaxés du même délit (mais condamnés , dans une
procédure distincte, à la peine de trente mois d’emprisonnement dont
quinze avec sursis pour recel, recel de documents administratifs et
usage, falsifications de documents et usage)59.
En tout 22 membres d’Action directe ou de la mouvance sur 25 connus des services de police auront été arrêtés56. Manquent notamment à l’appel Mohand Hamami et Eric Moreau dont on a perdu la trace.
Pour la branche lyonnaise, André Olivier, Max Frérot et Emile
Ballandras ont été condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité en
1989 à Lyon (Frérot a été condamné une nouvelle fois à la même peine en
1992 pour l’attentat commis en 1986 contre la brigade de répression du
banditisme). Bernard Blanc a été condamné à vingt ans de réclusion.
Jugés une nouvelle fois en juin 1995 pour trente-trois attentats commis
entre 1982 et 1986, Max Frérot, André Olivier, Bernard Blanc et Emile
Ballandras ont été condamnés par la cour d’assises spéciale de Paris,
composée uniquement de magistrats à 30 ans de réclusion criminelle.
Joëlle Crépet, l’amie d’André Olivier, a été condamnée à six ans
d’emprisonnement. Renaud Laigle a été puni de trois ans de prison. Quant
à François Polak, la cour lui a infligé deux ans de prison60.
Mohand Hamami a été condamné par contumace à la réclusion criminelle à
perpétuité le 7 juin 1990 par la cour d’assises de Paris. Il a été
déclaré coupable de l’assassinat des gardiens de la paix Claude Caiola
et Emile Gondry et de tentative d’assassinat de plusieurs passants,
commis le 31 mai 1983 lors de la fusillade de l’avenue Trudaine61.
Selon les informations parvenues au juge Bruguière, il aurait été
arrêté en Algérie puis se serait enfui en Libye. Les services secrets du
colonel Kadhafi l’auraient ensuite infiltré dans des mouvements
palestiniens au Liban15
Les ambiguïtés du pouvoir à l’égard d’Action directe
La doctrine Joinet
Peu après l’élection de François Mitterrand, une « cellule de dissuasion » informelle est mise en place à l’Élysée autour de François de Grossouvre.
Elle est chargée de prendre contact avec les terroristes étrangers
répertoriés en France (ETA, RAF, Brigades rouges) pour les convaincre de
cesser toute activité sur le territoire. En contrepartie le
gouvernement promet de refuser toute demande d’extradition. Cette
démarche est étendue aux membres de groupes terroristes français
récemment amnistiés, dont les militants d’Action directe, que l’on tente
de persuader de renoncer définitivement à l’action violente62.
La politique de répression policière doit désormais céder le pas à
« l’antiterrorisme préventif » : le Parti Socialiste est au pouvoir
depuis le 10 mai 1981 et le gouvernement se doit de donner des signaux
différents, même à ceux qui ont choisi la violence pour accélérer le
changement.
Gilles Kaehlin, inspecteur des Renseignements généraux qui a fait
partie de la brigade du commissaire Pochon, est chargé de négocier
individuellement avec chaque membre du groupe63,64
pour qu’ils renoncent à la violence ou qu’ils quittent la France. Yves
Bertrand, qui fut Directeur central des Renseignements généraux,
explique que Kaehlin leur versait des sommes prélevées sur les « fonds
secrets » pour les aider à refaire leur vie à l’étranger65.
Dans leurs ouvrages consacrés à la traque d’Action directe, les anciens
policiers Jean-Pierre Pochon et Serge Savoie laissent entendre que
c’est au cours de leurs entretiens avec la « cellule » que le nom de
l’informateur Gabriel Chahine, à l’origine de l’arrestation de Rouillan
et Ménigon, a été communiqué, directement aux membres d’Action directe
ou ultérieurement via un collaborateur de l’Élysée26,66.
L’inspirateur de « l’antiterrorisme préventif » est Louis Joinet,
magistrat membre du cabinet de Premier ministre Pierre Mauroy. Sa
volonté de dialogue avec les terroristes ne relève pas exclusivement de
considérations idéologiques. Il cherche également à dissocier les
« durs » irréductibles des « mous » qui peuvent être réinsérés dans la
société67. Joinet cherche à diviser ces deux camps afin de restreindre les moyens des « durs ».
Parallèlement à l’amnistie, la Cour de sûreté de l’État a été
dissoute et les services de police sont incités à réorienter leur action
vers les groupes d’extrême droite.
Les provocations de Rouillan
Une fois libres, les membres d’Action directe font de nombreuses
déclarations publiques, se plaignant des filatures policières et mettant
en cause nommément les Renseignements généraux et le commissaire
Pochon. Ayant le sentiment de ne pas être soutenu par la hiérarchie,
celui-ci accepte en août 1982 une affectation aux Antilles31.
Jean-Marc Rouillan justifie les hold-up, qualifiés d’« opérations de
financement » ou de « réappropriation ». Il fait clairement état de
l’objectif d’Action directe de « destruction de la société capitaliste »
et de son intention de « maintenir une politique révolutionnaire »68.
Diverses actions sont menées pour obtenir la libération des détenus qui
n’ont pas été libérés par l’amnistie et qui ont entamé une grève de la
faim (Nathalie Ménigon, cinq personnes inculpées pour le hold-up de
Condé-sur-l’Escaut en 1979 et trois militants des NAPAP : Frédéric Oriach,
Michel Lapeyre et Jean-Paul Gérard). Une manifestation est organisée
devant l’Élysée, des épiceries fines et des restaurants sont saccagés à
Paris et en province, les locaux du Quotidien de Paris
et de l’AFP sont occupés, le journal de FR3 est perturbé. En août, la
police retrouve une voiture équipée d’un radio-téléphone qui a été
utilisée lors d’une de ces opérations. Elle s’avère être un véhicule de
fonction du député socialiste du XVIIIe arrondissement Lionel Jospin69.
La voiture a été déclarée volée en juillet. Cependant selon certaines
sources policières, elle aurait été prêtée aux membres d’Action directe
par le député70. Les neuf détenus sont progressivement libérés en septembre et en octobre.
Avec le soutien de personnalités de gauche et d’extrême gauche,
Action directe lance une maison d’édition (la Docom) et les magazines Rebelles et Sans frontière.
Des traductions de publications de l’IRA, de l’ETA, des Brigades rouges
et de l’OLP sont publiées, ainsi que les premiers textes théoriques : Pour un projet communiste et Sur l’impérialisme. Les membres d’Action directe mènent des actions de recrutement auprès des immigrés turcs dans les squatts du XVIIIe arrondissement. Le 7 décembre 1981 Rouillan est interpellé dans un squatt, 3, villa Poissonnière en compagnie d’Éric Waucquier, Jean Van Niewhuyze et Lahouari Benchellal. Au commissariat de la rue Doudeauville
Rouillan demande à téléphoner à l’assistant parlementaire de Lionel
Jospin, qui se déplace pour s’entretenir avec lui. Rouillan et ses
camarades sont libérés l’après-midi même. Le 19 janvier 1982 la police
procède à des interpellations dans les squatts des 10, 12 et 14, rue de la Charbonnière
où Action directe avait déployé son sigle sur l’une des façades.
Rouillan est interpellé en compagnie de Ménigon et Waucquier. Ils sont
rapidement libérés44.
En août 1982, le gouvernement décide la dissolution d’Action directe après la fusillade de la rue des Rosiers
et la revendication par Jean-Marc Rouillan d’un certain nombre
d’attentats anti-américains et anti-israéliens. Des avis de recherche
sont lancés par le juge Bruguière. Les « durs » d’Action directe plongent dans la clandestinité.
Les initiatives de Paul Barril
Cependant dès le 22 janvier 1983, le capitaine de gendarmerie Paul Barril,
membre de la « cellule élyséenne » créée l’année précédente auprès du
président Mitterrand pour contribuer à la lutte contre le terrorisme,
adresse une lettre à Rouillan. Rédigé sur papier à en-tête du palais de
l’Élysée et transmise par l’intermédiaire de l’avocat de Rouillan, ce
courrier lui propose une rencontre afin de « mettre au point un dialogue
permettant la régularisation de votre situation ». Barril précise :
« Je suis habilité par la présidence pour traiter directement avec
vous. »71
Cette lettre est en fait la dernière tentative de Barril, après quatre
mois de pseudo-négociations avec l’avocat de Rouillan, pour obtenir la
reddition de ce dernier. Paul Barril écrira plus tard que cette
initiative avait eu l’aval formel de Christian Prouteau, responsable de
la « cellule »72. Selon les journalistes Alain Hamon et Jean-Charles Marchand48,
il est vraisemblable que le gendarme a été « mené en bateau » par
Rouillan. En octobre 1983, la publication de ce courrier par la presse
(notamment Le Canard Enchaîné) provoquera l’embarras de l’Élysée.
Accusations des autorités italiennes
De nombreux membres de groupes armés italiens avaient trouvé refuge
en France à la fin des années 70. Ils étaient déjà une centaine lors de
l’arrivée au pouvoir de François Mitterrand.
Ils continuent à affluer au cours des années suivantes, jusqu’à
atteindre 300 « réfugiés » en 1984. Les pouvoirs politiques et
judiciaires français les considèrent avec une relative bienveillance.
Cependant à partir de 1982, les autorités italiennes multiplient les
mandats d’arrêt internationaux. La justice française les classe
généralement sans suite. Dans les rares cas où la chambre d’accusation
émet un avis favorable à l’extradition, le gouvernement ne la fait pas
exécuter11. En août 1984, dans un entretien avec le Corriere della Sera, le ministre de l’Intérieur italien Oscar Luigi Scalfaro
exprime son indignation face à cette situation, expliquant notamment :
« Quand je pense qu’il y a 300 terroristes en France, traités comme
s’ils étaient les frères Rosselli persécutés par le fascisme, je deviens
violacé de rage ! »
Gilles Ménage
admet que le pouvoir socialiste a « tardé à bien mesurer combien la
colonie de réfugiés italiens constituait un milieu propice au
développement des activités clandestines »11.
De fait, Olga Girotto (Prima Linea), Franco Pinna, Enrico Bianco,
Oriana Marchioni, Elisabetta Grasso, Vincenzo Spano (Brigades Rouges),
Franco Fiorina, Gloria Argano (COLP) ont participé à des braquages de
banque en France aux côtés de membres d’Action directe à partir de 1980.
Ils ont été arrêtés, puis remis en liberté. Cirro Rizzato (Prima Linea)
a été abattu lors d’un hold-up auquel il participait avec Régis
Schleicher.
En janvier 1985, le juge italien Rosario Priore accuse la France « d’abriter une multinationale du terrorisme »73.
Le juge antiterroriste Armando Spataro déclare : « Je soutiens que la
France ne respecte pas les conventions internationales en matière
d’extradition. Je citerai un exemple : celui d’Oreste Scalzone. La chambre d’accusation a exprimé un avis favorable à l’extradition, et c’est le pouvoir politique qui a dit non »74.
Il cite également en exemple le cas du journaliste Jean-Louis Baudet,
proche d’Action directe, que les juges italiens considèrent comme
l’élément de liaison entre les terrorismes allemands, italiens et
français. Celui-ci et sa compagne Catherine Legagneur, qui se déclare
sympathisante des Brigades rouges
et de l’OLP, ont été arrêtés le 17 novembre 1983 pour possession
d’armes, d’explosifs et de documents administratifs vierges ou
falsifiés.
Pour sa défense, Baudet explique qu’il a été chargé, peu après
l’arrivée des socialistes au pouvoir, de récupérer les armes des
terroristes et de les convaincre d’abandonner la lutte armée. Il déclare
travailler en liaison avec des personnes proches de l’Elysée, dont
l’inspecteur Gilles Kaehlin48.
Jean-Louis Baudet a été condamné le 4 juillet 1984 à quatre ans de
prison pour infraction à la législation sur les armes et les munitions.
Catherine Legagneur a été condamnée pour ces mêmes faits à deux ans de
prison avec sursis. Le juge Spataro questionne : « Nous voudrions
connaître des autorités françaises la conclusion de leur enquête sur les
mandataires de Baudet et les objectifs qu’ils poursuivaient. Pourquoi
la France maintient-elle une telle attitude, alors que les terroristes
italiens sont impliqués dans des affaires très graves, par exemple
l’assassinat de deux gendarmes avenue de Trudaine à Paris en mai
1983 ? »74
Début 1985, sur 53 « cas sérieux » de demandes d’extradition
transmises par la justice italienne et examinés par la Chancellerie, 39
avaient été classés sans suite, 1 avait fait l’objet d’un avis
défavorable de la chambre d’accusation et 5 d’un avis favorable, sans
que le gouvernement ait accepté leur extradition. Huit étaient toujours
pendants11.
Le 22 février 1985, lors d’une conférence de presse commune avec le Président du conseil italien Bettino Craxi, François Mitterrand
définit la « doctrine Mitterrand » concernant les « réfugiés »
italiens : « Le cas particulier qui nous est posé et qui alimente les
conversations, est celui d’un certain nombre d’Italiens venus, pour la
plupart, depuis longtemps en France. Ils sont de l’ordre de 300 environ –
plus d’une centaine était déjà là avant 1981 – qui ont d’une façon
évidente rompu avec le terrorisme. Même s’ils se sont rendus coupables
auparavant, ce qui dans de nombreux cas est probable, ils ont été reçus
en France, ils n’ont pas été extradés, ils se sont imbriqués dans la
société française (…). Ils posent un problème particulier sur lequel
j’ai déjà dit qu’en dehors de l’évidence – qui n’a pas été apportée –
d’une participation directe à des crimes de sang, ils ne seront pas
extradés75. » En application de ces principes, il fallut attendre 2002 pour que la France extrade un ancien membre des Brigades rouges.
Les justifications de François Mitterrand
En octobre 1985, une rencontre a lieu en Belgique entre Jean-Marc
Rouillan et le conseiller politique d’un ministre du gouvernement
Fabius. Selon Jean-Pierre Pierre-Bloch et André Santini,
cette rencontre a pour objet de « proposer une trêve » et un « billet
de retour en France » aux membres d’Action directe en fuite70. Les deux élus UDF accusent les socialistes de « favoriser le terrorisme tout en déclarant vouloir le combattre ».
Le 23 février 1987, peu après l’arrestation des quatre dirigeants
d’Action directe, le président Mitterrand est questionné sur l’amnistie
dont ils ont bénéficié en 1981. Il rappelle que, sur les quatre, seul
Jean-Marc Rouillan a bénéficié de l’amnistie. Il s’emploie également à
en minimiser les effets, assurant : « si Rouillan n’avait pas été
amnistié, il tombait sous le coup de la loi : il était coupable de
délit, il n’était pas coupable de crime. Il eut été frappé d’une peine
que je ne peux imaginer puisqu’il n’avait pas été jugé, qui n’aurait pas
dépassé quelques mois, en raison de la relation qu’il y a entre la
faute que l’on commet et la peine qu’on a subie. Cela, c’est notre code
pénal. Il serait donc de toute façon libéré depuis 1981 ou début 1982,
dans l’hypothèse où il serait passé en jugement et où il aurait été
condamné »76.
Cette affirmation est douteuse dans la mesure où, en 1981, Rouillan
était suspecté de détention d’armes et d’explosifs, d’usage de faux
papiers, de vols à main armée et de onze attentats.
Gilles Ménage,
ayant exercé plusieurs postes clés au sein du cabinet de la Présidence
de la République sous François Mitterrand, admet pour sa part que les
premiers mois du septennat de François Mitterrand ont été marqués par
des hésitations à l’égard d’Action Directe. Il met cependant en cause la
politique menée avant 1981 « marquée par une faiblesse tout aussi
flagrante » dans l’action contre le terrorisme. Cette faiblesse est
notamment illustrée par les diverses arrestations de Jean-Marc Rouillan
tout au long des années 70 et la légèreté des condamnations qu’il eut à
subir. Il considère, que, passé les premiers mois, l’action des
gouvernement socialistes fut caractérisée par une « détermination sans
faille ». À l’appui de cette affirmation, il explique que dix-huit des
vingt-deux personnes citées à comparaître lors du procès de la mouvance
Action Directe en janvier 1988, avaient été arrêtées avant mars 198611.
Les demandes de libération anticipée de Régis Schleicher
ont été plusieurs fois repoussées par le tribunal de l’application des
peines. Le 23 juillet 2009, il lui est accordé un régime de semi-liberté77. Il a publié Clairvaux, instants damnés, un livre où il évoque le quotidien des détenus condamnés à de longues peines.
Les demandes de semi-liberté de Georges Cipriani ont été plusieurs fois rejetées (en 2005, 2007 et 2009). Ce régime lui est finalement accordé en 201078. Le 3 mai 2011, la Cour d’Appel de Paris lui octroie une libération conditionnelle79.
Le 10 mai 2007, le tribunal d’application des peines de Paris a accordé un régime de semi-liberté à Nathalie Ménigon,
emprisonnée depuis 1987. Elle travaillera la journée et retournera
dormir en prison, mais le parquet a immédiatement fait appel de cette
décision. Le jeudi 19 juillet 2007, la Chambre d’application des peines
de la Cour d’Appel de Paris lui a finalement accordé le régime de
semi-liberté80.
Nathalie Ménigon,
à qui un régime de semi-liberté a été accordé à partir du 2 août, a été
transférée mardi 24 juillet 2007 du centre de détention de Bapaume
(Pas-de-Calais) à la maison d’arrêt de Toulouse-Seysses. Ce régime de
semi-liberté est un préalable à une mesure de libération conditionnelle81,
finalement accordée le 17 juillet 2008. Elle est libérée en régime de
libération conditionnelle le 2 août 2008 sur décision du tribunal de
l’application des peines de Paris, après plus de vingt ans de prison82.
De ses années de prisons, il lui reste de graves séquelles physiques d’une hémiplégie due à deux accidents vasculaires cérébraux83.
Jean-Marc Rouillan a tenu une chronique sur l’univers carcéral dans le journal CQFD. Il a obtenu un régime de semi-liberté à partir du 17 décembre 200784. Cette semi-liberté a été révoquée en octobre 2008 à la suite de propos tenus lors d’une interview donnée au magazine L’Express85. Il obtient à nouveau en mai 2011 une mise en semi-liberté effective le 19 mai 201286.
En 2003, Helyette Bess est placée sous contrôle judiciaire dans une
enquête pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise
terroriste, falsification de documents administratifs et contrefaçon87 dans l’affaire du (nuovo) Partito Comunista Italiano88.
Soutiens
Depuis l’arrestation de plusieurs des membres d’Action directe et jusqu’à aujourd’hui, des groupes d’extrême-gauche, tel le Comité Unitaire pour la Libération des Prisonniers politiques, le Comité Unitaire de Défense des Prisonniers politiques, le Collectif pour la libération des Militant-e-s d’Action directe89 ou encore Secours rouge (Secours rouge/Association des Parents et Amis des Prisonniers communistes), mais aussi la Ligue des droits de l’homme90
militent pour leurs libérations. Parmi les organisations politiques,
l’Organisation communiste marxiste-léniniste Voie prolétarienne fera du
soutien aux prisonniers d’Action Directe une « question de principe »91.
Le 20 février 2006, une bombe explose à Berlin. Le 25 février 2006, un attentat vise Renault à Athènes, ne faisant que des dégâts matériels, en « Solidarité avec les prisonniers » d’Action directe92.
Connexions
Le hold-up de Condé-sur-l’Escaut
Le 28 août 1979, une attaque à main armée a lieu à la perception de
Condé-sur-l’Escaut (Nord). Six malfaiteurs masqués (dont une femme)
s’emparent de 16,3 millions de francs, destinés au paiement en liquide
des pensions trimestrielles des retraités des mines. Le hold-up a été
exécuté de façon quasi-militaire à la manière d’une action de commando.
L’enquête s’oriente vers des anciens membres des GARI en liaison avec
les Brigades rouges et des groupes terroristes français93.
Un suspect est arrêté trois mois plus tard. Il s’agit d’un
ressortissant espagnol nommé José de Miguel Martin, membre du Groupe
autonome de Madrid. Lui et son amie Annie Cuadrado sont connus des
Renseignements généraux pour leur sympathie envers la Gauche
prolétarienne et les GARI. À son domicile, les policiers retrouveront
des faux papiers, des chéquiers, les radios qui ont servi au commando
ainsi qu’une somme de 1.700.000 francs provenant du hold-up.
Le 28 mars 1980, en même temps que le coup de filet opéré contre
Action directe, quatre Italiens – trois hommes et une femme – sont
interpellés au Brusc, près de Toulon, par les polices judiciaires de
Nice et de Lille. Une partie du butin est retrouvée (150.000 francs),
ainsi que des armes de guerre et des faux papiers semblables à ceux
retrouvés chez les membres d’Action directe. Franco (ou François) Pinna
(ou Pina), Enrico Bianco, Luigi Amadori et Oriana Marchionni, épouse
d’Enrico Bianco, font partie des Brigades rouges25 et avaient des liens avec Action directe.
Le dossier est confié à la Cour de sûreté de l’État. En juin 1981,
huit autres personnes sont inculpés par le juge Michel Legrand de
« crimes commis en relation avec une entreprise tendant à entraver
l’exercice de l’autorité de l’État ». Il s’agit de six Français
(Jean-Pierre Cazenave-Laroche, Floreal Cuadrado, Raymond Delgado, Annie
Dessaux, Angela Herbon, Martine Fournier et Sylvie Porte) et un Allemand
(Werner Witteman). Cuadrado et Delgado sont des anarchistes espagnols
qui ont côtoyé Rouillan au sein des GARI52.
Le 17 juillet 1981, l’Assemblée nationale vote la suppression de la
Cour de sûreté de l’État. Le 23 juillet, celle-ci se dessaisit du
dossier de Condé-sur-l’Escaut en considérant que « rien ne permet de
penser qu’il s’agit d’un acte subversif dirigé contre l’État français ».
L’affaire retourne au tribunal de Valenciennes94.
Les inculpés échappent donc à l’amnistie votée le 4 août 1981. Après des manifestations diverses (cf supra), l’intervention de personnalités et groupements de gauche ou d’extrême-gauche95
et une grève de la faim, les cinq derniers détenus dans le cadre de
cette affaire seront libérés en octobre 1981 pour « raison médicale » en
même temps que Nathalie Ménigon.
Un procès aura finalement lieu devant la cour d’assises de Douai à
partir du 17 avril 1989, soit dix ans après les faits. Le parquet
rejette les motivations politiques mises en avant par les accusés et
soutient qu’il s’agit d’une affaire de droit commun. Sept accusés sont
présents. Les débats portent essentiellement sur l’application de la loi
d’amnistie d’août 1981. Quatre accusés de complicité et de recel de vol
avec armes sont acquittés (Martine Fournier, Sylvie Porte, Annie
Dessaux et Jean-Pierre Cazenave-Laroche). Raymond Delgado est reconnu
coupable de complicité et Floréal Cuadrado
coupable de recel. La Cour d’assises les fait cependant bénéficier de
l’amnistie. Seul Luigi Amadori est condamné à quatorze mois de prison
pour recel simple, probablement en raison du fait qu’il s’est acheté un
voilier avec l’argent recelé et qu’il était détenu pour une affaire de
drogue au moment du procès96.
Gilles Ménage tient pour acquis qu’une bonne part du butin de ce hold-up fut remis au groupe Action Directe11.
Les explosifs de Rochebesse
Le 18 septembre 1980, quelques jours après l’interpellation de
Nathalie Ménigon et Jean-Marc Rouillan, deux autres suspects sont
arrêtés. Il s’agit de Laurent Louessard, étudiant en sciences
économiques et surveillant d’externat au lycée Carnot à Paris97,
et de son amie espagnole : Maria Pilar Arago-Eltur, employée dans un
institut de sondage. Ils ont été tous deux signalés dans la mouvance
d’Action directe. Ils sont suspectés d’avoir établi des liens avec des
groupes terroristes italiens (Prima Linea) et espagnols (ETA militaire).
Maria Pilar Arago-Eltur reconnaît avoir participé à la création
d’Action directe en 1979 avec Laurent Louessard, Carlos Jaurégui,
Mireille Munoz, Ménigon et Rouillan. Elle indique que le groupe a
financé ses premières actions avec l’argent provenant d’un hold-up
commis fin juillet 1979 à la BNP, avenue de Villiers à Paris25.
Louessard, Jaurégui, Rouillan, Ménigon ont participé à ce hold-up avec
trois de leurs proches : Serge Fassi, Pascal Trillat et Pedro Linares
Montanes.
Au cours de leur interrogatoire, les deux jeunes gens révèlent
l’existence d’un important dépôt d’explosifs au sein d’une communauté
« hippie » au lieu-dit de Rochebesse, sur la commune de Chanéac en
Ardèche. Les 600 kg d’explosifs découverts lors des perquisitions du 27 mars proviennent de ce dépôt.
La communauté de Rochebesse est connue des forces de l’ordre. Elle
s’est implantée en 1969 dans un hameau isolé, sous la houlette de Pierre
Conty, soixante-huitard grenoblois98.
Avec ses amis adeptes du retour à la terre, il a pris possession de
plusieurs masures délabrées et élève quelques dizaines de brebis et des
vaches. Au fil des années, les rapports se sont tendus avec le
voisinage. Les membres de la communauté se livrent à des larcins et se
bagarrent avec les paysans. Le 24 août 1977, Conty et deux membres de la
communauté (Stéphane Viaux-Peccate et Jean-Philippe Mouillot)
commettent un hold-up au Crédit Agricole de Villefort en Lozère. Au
cours de leur fuite, Conty blesse grièvement un gendarme (qui mourra
quelques semaines plus tard) et abat de sang-froid deux villageois.
Jean-Philippe Mouillot se livre à la justice peu après. Stéphane
Viaux-Peccate est arrêté en Hollande lors d’une enquête sur la bande à
Baader99.
Ils seront condamnés en mai 1980 respectivement à 5 et 18 ans de
réclusion criminelle. Surnommé « le tueur fou de l’Ardèche », Pierre
Conty, qui n’a pas été arrêté, est condamné à mort par contumace100.
À la suite des révélations de Laurent Louessard et Maria Pilar
Arago-Eltur, la brigade criminelle, la police judiciaire de Montpellier
et les gendarmes investissent Rochebesse le 23 septembre 1980.
Marie-Thérèse (Maïté) Merlhiot, l’ancienne compagne de Conty est
interpellée en compagnie de deux amis vivant avec elle au hameau de
Treynas : Bruno Darribère et Jean-Pierre Bolognini. Dans une cache
dissimulée sous des éboulis, les policiers découvrent 1.250 kilos
d’explosifs, des fusils, des carabines et plusieurs centaines de
cartouches. Une partie des explosifs provient d’un vol commis dans une
carrière de l’Isère en 1975. C’est Bruno Darribère qui a indiqué à
Laurent Louessard l’existence de ce dépôt. Pendant l’hiver 1979, Laurent
Louessard et Philippe Franc ont transporté une partie de ces explosifs à
Paris101.
Frédéric Oriach
Frédéric Oriach
a longtemps été soupçonné de faire partie des dirigeants d’Action
Directe. L’intéressé s’en est défendu, tout en déclarant publiquement
approuver certains attentats commis par le groupe. Par ailleurs, Oriach a
été proche de Pierre Carette, fondateur des Cellules communistes combattantes102.
Ce groupe belge a commis diverses actions en commun avec Action
directe, notamment des vols d’explosifs et le partage d’armes et de
planques103
Dans la nuit de 12 au 13 mai 1977, Frédéric Oriach, Michel (Mickel)
Lapeyre et Jean-Pierre Gérard sont interpellés par des gardiens de la
paix rue Bobillot (Paris XIIIe arrdt). Les trois hommes sont tous armés.
Oriach est porteur d’un revolver de type Magnum et Gérard d’un autre
pistolet de calibre 7,65, qui a « servi » pour l’assassinat de Joaquin Zenteno Anaya, ambassadeur de Bolivie
en France le 11 mai 1976 et pour l’attentat contre Bartholome Garcia
Platta-Valle, attaché militaire à l’ambassade d’Espagne à Paris le 8
octobre 1975. Lapeyre est en possession d’un pistolet 11,43 qui a été
utilisé pour l’assassinat de Jean-Antoine Tramoni le 23 mars 1977 à
Limeil-Brévannes. J.-A. Tramoni est le vigile de la régie Renault qui a
abattu le militant maoïste Pierre Overney
lors d’une manifestation aux portes des usines Renault le 25 février
1972. Dans leur voiture et à leurs domiciles respectifs, les enquêteurs
saisissent diverses armes de guerre, des postes émetteurs-récepteurs et
divers documents : tracts et fiches mentionnant des immatriculations et
des relevés de trajet de véhicules des ambassades d’Israël et d’Iran.
Les enquêteurs soupçonnent Oriach et ses amis de deux autres
attentats au cours desquels un diplomate uruguayen a été tué et un
conseiller d’ambassade iranien a été grièvement blessé. Oriach, Lapeyre
et Gérard déclarent faire partie des NAPAP et se refusent à toute autre
déclaration. Ils rejoignent en prison trois membres présumés des NAPAP
arrêtés le 31 mars : Henri Savouillan, Maurice Marais et Egbert
Slaghuis, suspectés d’avoir fourni l’arme et les projectiles qui ont tué
Jean-Antoine Tramoni. Un septième suspect, soupçonné d’avoir assassiné
J.-A. Tramoni, est arrêté le 3 décembre : Christian Harbulot104. Il sera libéré après plusieurs mois de détention préventive et obtiendra un non-lieu dans cette affaire.
Le 23 mars 1978, Oriach, Lapeyre et Gérard sont condamnés pour
détention d’armes prohibées à 7 ans de prison dont 5 ans ferme. En
appel, leur peine est ramenée à cinq ans de prison, dont un avec sursis.
Libérés en mai 1980, ils sont arrêtés en juillet de la même année par
une patrouille de police peu après un attentat commis contre les locaux
des chemins de fer allemands (Bundesbahn) rue Condorcet à Paris IXe.
Lapeyre et Gérard reconnaissent leur participation à l’attentat. Le 14
septembre 1981, les trois hommes bénéficient de l’amnistie
présidentielle, en vertu d’une décision de la chambre d’accusation de la
cour d’appel de Paris. Cette décision intervient après diverses
manifestations violentes de groupes d’extrême-gauche réclamant leur
libération, ainsi que celle de Nathalie Ménigon et des sept inculpés
pour l’attaque à main armée de Condé sur l’Escaut.
Le 12 octobre 1982, Frédéric Oriach est arrêté à Paris par la Brigade
de recherches et d’intervention et inculpé « d’association de
malfaiteurs ». Il venait de se rendre à la gare du Nord pour consulter
des documents déposés dans une consigne. Il s’agit de fiches concernant
des objectifs d’attentats réalisés ou potentiels; parmi les documents
saisis se trouve également une sorte de mémoire rédigé par Oriach
concernant les actions menées par Action directe au cours de l’été 1982.
Ce texte, dans lequel Oriach parle de « notre groupe » et de « notre
action », tend à démontrer que les membres d’Action directe ont
participé à plusieurs attentats, notamment celui de l’avenue de la
Bourdonnais le 21 août (deux artificiers de la Préfecture de police tués
en tentant de désamorcer une bombe placée sous la voiture du conseiller
commercial de l’ambassade des États-Unis) et celui de la rue Cardinet
commis le 17 septembre (trois diplomates israéliens grièvement blessés,
ainsi qu’une quarantaine d’élèves du lycée Carnot). Ces deux attentats
avaient également été revendiqués par les Factions armées
révolutionnaires libanaises (FARL).
En avril 1983, un commando d’une dizaine de personnes saccage le
musée de la Légion d’honneur et y laisse des tracts réclamant la
libération de Frédéric Oriach. Une dizaine de personnes est interpellée à
la suite de ce saccage, parmi lesquels Martine da Silva et Christian
Gauzens, amis d’Oriach105.
En avril 1985, dans un courrier adressé au journal Le Monde, Oriach nie avoir jamais été proche d’Action directe106
Le groupe Action directe a revendiqué plusieurs actions (mitraillage,
braquage, plasticage, assassinat). À partir de juin 1984, Action
directe signe ses attentats et ses tracts en utilisant des noms de
commandos pour donner une symbolique forte à ses actions et pour créer
l’illusion du nombre.
De nombreux vols à main armée n’ayant pas entraîné mort d’homme ont
été revendiqués par le groupe comme des « expropriations
prolétariennes ». Durant sa première période, plusieurs attentats dans
des zones d’opération d’Action directe seront commis. Si le mode
opératoire, les revendications et les cibles peuvent les rattacher au
groupe, ils seront revendiqués sous différents noms. La police française
considérera ces attentats comme commis par la mouvance Action directe : Action directe du 27-28 mars, CLODO, Groupe Bakounine-Gdansk-Paris-Guatemala-Salvador,
Jeune Taupe, Casse-Noix, Moutons enragés, Nous, B.A.D.I.N.T.E.R. (du
nom du ministre de la justice d’alors, Robert Badinter, Bombeurs anonymes pour la défense des incarcérés très excités par Robery), Germain, Comité Riposte à la répression en Algérie56.
La « menace » d’une résurgence d’Action directe ou d’un nouveau groupe
terroriste à la manière d’Action directe est fréquemment agitée même si
ce n’est pas toujours pertinent. Par exemple Florence Rey et Audry Maupin seront décrit par une partie de la presse et des enquêteurs comme un couple « à la Rouillan et Ménigon »107.
Ces deux anarchistes autonomes avaient pris d’assaut une préfourrière
de la police. Ce braquage qui n’avait pas pour but de faire des morts a
dérapé en une course-poursuite à travers Paris et des échanges de coups
de feu avec la police résultant en la mort de cinq personnes, dont Audry
Maupin.
Évocation de réactivations possibles du groupe Action directe
En 2009, Julien Coupat et le groupe de Tarnac sont présentés par Michèle Alliot-Marie
comme des « héritiers en puissance d’Action directe ». La ministre de
l’intérieur évoque le retour du terrorisme de « l’ultra gauche »108.
Julien Coupat et ses proches sont accusés d’avoir placé des crochets
pour bloquer la circulation de TGV et d’avoir écrit un livre
« l’insurrection qui vient ». Non seulement les faits ne sont pas
prouvés, mais au point de vue de l’idéologie les spécialistes jugent que
« Julien Coupat n’a rien à voir avec Jean-Marc Rouillan »109.
En février 2011, six commissariats des Hauts de Seine reçoivent une
lettre présentant « la réactivation d’Action directe ». Le tract annonce
des actions contre la police dans la lignée du combat de Jean-Marc
Rouillan, Nathalie Ménigon et Joëlle Aubron. Même si l’on ne sait pas si
la menace était réelle, elle a été prise au sérieux par la justice qui a
saisi la section antiterroriste de la brigade criminelle de Paris dans
les heures qui ont suivi110.
Ces références régulières à Action directe montrent que le souvenir du
mouvement et de ses attentats reste toujours présent dans la mémoire
collective.
Bibliographie
Études sur Action directe
Alain Hamon et Jean-Charles Marchand, Action directe. Du terrorisme français à l’euroterrorisme, Le Seuil 1986
Jean-Pierre Pochon, Les stores rouges, Édition des Équateurs, 2008
Serge Savoie, La traque d’Action Directe, Nouveau Monde Éditions 2011
Fanny Bugnon, « »Le sang et les confitures ». Les procès d’Action
directe dans la presse française », dans André Rauch et Myriam Tsikounas
(dir.), La justice et les représentations du crime, Paris, Publications de la Sorbonne, 2012, p. 153-165.
Floréal Cuadrado, Comme un chat. Souvenirs turbulents d’un anarchiste, faussaire à ses heures, vers la fin du vingtième siècle, Éditions du Sandre, 2015, (ISBN978-2-35821-105-5).
Ouvrages des membres d’Action directe
Action directe, Pour un projet communiste, Docom 1982
Action directe, Textes de prison, 1992-1997, Jargon libre 1997
Jean-Claude Lutanie, Protestation devant les libertaires du présent et du futur sur les capitulations de 1980, sans mention d’éditeur, 1981, puis réédité en 2011 aux Éditions Lutanie [archive]
« Action directe, un terrorisme à la française » le 13 décembre 2013 dans 50 ans de faits divers sur 13e rue et sur Planète+ Justice de Clémence Badault (2006).
Histoire secrète d’Action directe, de Romain Icard, 2009, sur LCP.
↑ Selon la police en 1989 in (en) Michael Dartnell, Action directe: ultra-left terrorism in France, 1979-1987, Paris, 1995, 224 p. (ISBN0714645664, lire en ligne [archive]), p. 173
↑ a, b, c, d, e, f, g, h et i Gilles Ménage, L’œil du pouvoir, t 2, Face aux terrorismes, Paris, Librairie Arthème Fayard, 2000, 545 p. (ISBN2-213-60491-6)
↑ Julien Fragnon (docteur en science politique, Université de Lyon), Attentats politique en Europe [archive] Encyclopédie de la culture politique contemporaine, sous la direction d’Alain Renaut, 2008, pages 323 et suivantes.
↑ Selon Maria Pilar Arago-Eltur, militante d’Action directe arrêtée le 18 septembre 1980 (cf infra),
la décision de créer le groupe a été prise au printemps 1979, au cours
de réunions auxquelles participaient Jean-Marc Rouillan, Nathalie
Ménigon, Carlos Jaurégui, Mireille Munoz, Laurent Louessard et
elle-même ; l’appellation Action directe a été choisie sur proposition
de Carlos Jaurégui (cité dans Marcel Leclerc : De l’antigang à la criminelle – Plon 2000 et Jean-Pierre Pochon : Les stores rouges – Édition des équateurs 2008)
↑
L’action directe est l’action sociale directe des masses, sans
intermédiaire politique qui parle en leur nom, qu’il soit parlementaire
ou avant-garde. Elle n’a donc rien à voir avec la propagande par le fait pratiquée par le groupe AD. Cf. la brochure L’Action Directe rédigée par Émile Pouget, l’« inventeur » du concept.
↑ a, b et c Jean-Louis Bruguière, Ce que je n’ai pas pu dire, entretiens avec Jean-Marie Pontaut, Robert Laffont 2009.
↑
Remarquons cependant qu’en novembre 1992, peu après le procès de Max
Frérot, le « Comité de lutte des prisonniers d’Action directe » publia
un texte sévère à l’encontre de la « branche lyonnaise ». Intitulé « Du
militarisme aux divagations réactionnaires », les auteurs y définissent
les membres originels de cette branche comme « une coordination de
militants communistes assurant historiquement la continuité du mouvement
mao (ex-gauche Prolétarienne) ». Le texte met en cause des « errances
comme le localisme réducteur, le clanisme et son chapelet de
personnalisme et d’autoritarisme ». Il explique : « Pour être tout à
fait clair : dès l’hiver 79-80, la structure lyonnaise, toujours plus
réduite à son unité armée et à sa praxis ; ne pouvait plus se présenter
comme interne à l’organisation Action directe. » Il critique ensuite
« la manie militariste face à la stratégie de guerre révolutionnaire »
et « la fausse solidarité avec le prolétariat immigré ». (Textes de prison 1992-1997 – http://www.action-directe.net/userimages/tdp.pdf [archive]).
↑
Par ailleurs, l’ingénieur général René-Pierre Audran était responsable
des contrats d’armement avec l’Irak, en guerre avec l’Iran depuis 1980.
Il a supervisé en juillet 1984 une négociation avec l’Iran portant sur
des ventes d’armes ; or celle-ci a été brutalement interrompue par le
gouvernement français en septembre (Charles Villeneuve et Jean-Pierre
Péret, Histoire secrète du terrorisme, Plon 1987).
↑
Information mentionnée dans une note manuscrite d’André Olivier
retrouvée dans une « planque » stéphanoise de la Branche lyonnaise
(Roland Jacquard, La longue traque d’Action directe, Albin Michel 1987
↑ a, b, c et d Commissaire Marcel Leclerc, De l’antigang à la criminelle, Plon 2000
↑ a et b Serge Savoie, RG, La traque d’action directe, Nouveau Monde Éditions, 2011, 270 p.
↑ Le Monde 4.04.1980 Déférés à la Cour de sûreté de l’État dix-neuf terroristes présumés ont été écroués
↑ a et b Jean-Pierre Pochon, Les stores rouges, Édition des équateurs (2008)
↑ a, b et c Artiste d’origine égyptienne, alias « Youssef », qui a infiltré l’Extrême gauche et qui sera abattu par Action Directe en 1982, son nom ayant été donné par un membre des RG affecté à l’Élysée en 1981
↑ Patrice Lastère, Un flic passe aux aveux, Paris, JC Lattès, 2013, 284 p.
↑ Paris-Match, avril 1982 – cité dans Les stores rouges
↑
Selon Charles Villeneuve et Jean-Pierre Peret, Mohand Hamami était lié
aux milieux du terrorisme proche-oriental et notamment aux Farl de
Georges Ibrahim Abdallah (Histoire secrète du terrorisme – Plon 1987).
↑ Laurent Greilsamer, Les plumes et le goudron, Le Monde du 10.06.1983
↑ Philippe Boggio, « Les policiers toulousains s’interrogent sur les liens entre les milieux anarchistes des antinucléaires et Action directe », Le Monde, 16 décembre 1982 (lire en ligne [archive])
↑ Mitraillage de la voiture d’un fonctionnaire de l’ambassade d’Israël (1er août) et attentats contre une agence de la Discount Bank (7 août) et la société Nemor (8 août) – Le Monde du 14.08.1982
↑
Il semblerait que ces attentats contre des objectifs israéliens et
juifs, commis peu avant et peu après la fusillade de la rue des Rosiers
et critiqués par certains militants, aient accéléré la scission au sein
d’Action directe. Un communiqué transmis au nom d’Action directe à l’AFP
et à Libération évoque en effet son « éclatement » (…) « à la suite des
pratiques autoritaires et bureaucratiques d’un des collectifs d’Action
directe. » (Le Monde, 14.08.1982)
↑ a et b Charles Le Quintrec, Roland Jacquard, La longue traque d’Action directe, Albin Michel, 1987
↑ Alexis BODDAERT, « La découverte des planques d’Action directe Un travail de fourmi de la gendarmerie », Le Monde, 16 mai 1987
↑ Laurent GREILSAMER, « Au palais de justice de Paris Les quatre dirigeants d’Action directe comparaissent devant une cour d’assises spéciale », Le Monde, 17 novembre 1993
↑
Face à ces menaces, la passivité dont firent preuve l’avocat général
Saludo et le président Versini fut vivement dénoncée par le président de
la cour d’assises de Paris André Giresse (André Giresse-Philippe
Bernert, Seule la vérité blesse, Plon 1987)
↑ a, b, c et d (en) Michael Dartnell, Action directe: ultra-left terrorism in France, 1979-1987, Paris, 1995, 224 p. (ISBN0714645664, lire en ligne [archive]), p. 172 et 173
↑
Le juge Bruguière estime que Paula Jacques hébergeait Claude Halfen en
étant parfaitement au courant de ses activités; elle écoutait les
communications radio de la police lorsque Halfen et ses complices
commettaient des attaques de banque (Jean-Louis Bruguière, Ce que je n’ai pas pu dire, entretiens avec Jean-Marie Pontaut, Robert Laffont 2009)
↑ « Action directe en appel La cour confirme les peines contre les dirigeants mais en réduit d’autres et prononce deux relaxes », Le Monde, 6 juillet 1988 (lire en ligne [archive])
↑ Yves Bertrand, Je ne sais rien mais je dirai (presque) tout – Conversations avec Eric Branca, Paris, Plon, 2007, 226 p. (ISBN978-2-259-20295-4)
↑
Gabriel Chahine sera assassiné le 13 mars 1982. L’assassin ne sera
jamais identifié mais l’assassinat sera revendiqué plus tard par Action
directe.
↑ Charles Villeneuve, Jean-Pierre Péret, Histoire secrète du terrorisme, Plon 1987
↑ Notamment dans un entretien accordé à Jérôme Bonaldi sur France Inter, cité par Claude Cancès, Histoire du 36 quai des Orfèvres, Édition Jacob-Duvernet, 2010.
↑ a et b Jean-Pierre Pierre-Bloch et André Santini, Sécurité enjeu public no 1, Carrère-Michel Lafon, 1986.
↑ Courrier cité notamment par Edwy Plenel, La part d’ombre, Stock 1992 et le commissaire Marcel Leclerc, De l’antigang à la criminelle, Plon 2000
↑ Capitaine Paul Barril, Guerres secrètes à l’Élysée, Albin Michel 1996
↑ « L’Italie accuse la France d’abriter une » multinationale du terrorisme « », Le Monde, 30 janvier 1985 (lire en ligne [archive])
↑ a et b Philippe Pons, « L’attitude de Paris retarde certaines enquêtes contre le terrorisme nous déclare le juge Spataro », Le Monde, 8 janvier 1985 (lire en ligne [archive])
↑
Il n’a jamais réapparu depuis 1977. Le 22 mai 2000, la peine capitale
prononcée à son encontre a été prescrite. Christian Bonnet, ministre de
l’intérieur en 1977 aurait énigmatiquement déclaré à son sujet : « Il ne
nuira plus ». (Yannick Blanc Les Esperados, une histoire des années 1970, Éditions l’Échappée, 2011)
↑ Le Monde 25.09.1980 Un important stock d’explosifs est découvert près de la ferme ou habitait Pierre Conty et Commissaire Marcel Leclerc, De l’antigang à la criminelle, Plon 2000
↑ Le Monde 06.12.77 Le meurtrier présumé de M. Tramoni est arrêté
↑Le Monde du 27 avril 1983 Dix interpellations après le saccage du musée de la Légion d’honneur
↑Le Monde, 2 avril 1985 Une lettre de Frédéric Oriach
↑
Florence Rey est décrite comme une sorte de petite Nathalie Ménigon par
les enquêteurs : « En vingt-cinq ans de police judiciaire, je n’ai
jamais été confronté à un tel mutisme » dans Le Monde 9 juin 2006,
« Florence Rey, Audry Maupin : Tueurs nés ? » Un document de
Marie-Sophie Tellier – Faites entrer l’accusé – Série proposée par
Christian Gerin, présentée par Christophe Hondelatte, produite par 17
juin Média, réalisée par Bernard Faroux, rédacteur en chef : Christian
Huleu. Décembre 2003.